Dissert Le déterminisme est-il contraire à la Liberté
Publié le 04/09/2022
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Sujet de Dissertation : Le déterminisme est-il contraire à la liberté ?
La liberté humaine fait en philosophie l’objet d’une large controverse, elle
est pourtant l’un de ses sujets fondamentaux.
Les courants qui s’y sont succédés
peuvent d’ailleurs nous conforter dans l’appréhension d’une liberté opposée au
déterminisme.
On peut évidemment penser que l’individu saisi dans l’engrenage
des causes antécédentes ne correspond pas à celui qui est libre, exempté de
toute contrainte.
Depuis longtemps les défenseurs d’un libre-arbitre se sont
largement heurtés aux déterminismes qui émergent de la recherche scientifique,
notons bien ce pluralisme tant le déterminisme de Durkheim peut différer de
celui d’un biologiste.
Le libre-arbitre comme attribut ontologique semble perdre
de son éclat face à l’avancée de notre appréhension des différentes
déterminations.
L’objectif des sciences, qu’elles soient humaines ou naturelles,
consiste à dégager les « lois » qui régissent l’ensemble des phénomènes et des
rapports qui les lient.
Or, l’homme n’échappe pas au déterminisme que l’on
pourrait qualifier d’universel : de la sociologie aux réactions chimiques
élémentaires, la recherche a pour vocation de formuler des lois qui expliquent les
comportements humains.
Comme Kant le montrait déjà avec sa troisième
antinomie de la Raison pure, l’opposition entre les notions se dessine alors
nettement, il faudrait que l’individu soit doté d’un libre-arbitre ou non.
Rappelons
que cette constatation correspond à une définition du fait d’agir librement bien
précise.
Cela implique la possibilité réelle d’agir autrement dans un cas donné
ainsi qu’une faculté à l’auto-détermination, au sens où l’individu n’est soumis à
aucune cause extérieure.
Or, cela s’oppose à un déterminisme conçu comme un
enchainement de relations causales où une seule évolution possible d’un système
sera envisageable : il n’y a ici pas de choix, ni d’auto-détermination.
Cela dit, un
tel dualisme expose de fait les limites d’une conception absolue de la liberté ou
du déterminisme.
Il serait par exemple possible de pousser le raisonnement du
déterminisme jusqu’à l’absurde dans le cadre des lois : il suffirait à l’accusé au
tribunal de dire « jamais je n’ai voulu effectuer l’action X, seulement, j’y ai été
déterminé ».
Mais pourtant, une telle disposition judiciaire qui en fait un
responsable sous-entend bien que l’accusé a eu le choix, cela a été sa décision
bien que des facteurs aient pu l’influencer, le libre-arbitre se fonde donc sur la
contingence des actes humains.
Cette hypothétique déresponsabilisation poussée
à son paroxysme est problématique, elle fait fi de ce qui donne une dignité à cet
accusé, ce qui en fait justement un sujet de droits et devoirs.
Il faudrait donc
renoncer à cette idée de causalité déterminée chez l’homme, au moins dans une
certaine mesure.
Cela consisterait à attribuer un caractère inaugural aux actions
humaines, mais il faudrait alors arracher l’homme à l’ordre des choses, l’extraire
des lois si durement établies préalablement.
Seulement procéder ainsi en faisant
de l’homme « un empire dans un empire » tient d’une irrationalité qui
bouleverserait toutes les certitudes scientifiques, il faudrait alors se résigner à ne
pas attribuer de responsabilité morale au coupable.
Sans libre-arbitre, tout
deviendrait en quelque sorte excusable, mais il faut pourtant protéger le corps
social de la menace que ces coupables malgré-eux peuvent représenter.
La
justice ne deviendrait qu’une nécessité sociale mais dépourvue d’un motif moral,
mais cela serait réduire les hommes à des choses.
Et malgré la conscience et la
volonté, peut-on réellement exclure l’homme de l’engrenage des causes et
effets ? C’est pourquoi il faut rappeler le problème : un monde déterministe
s’oppose-t-il à la liberté humaine ? Porter l’une des deux notions vers l’absolu ne
semble pas convaincant, toute la question semble donc de savoir en quoi les
deux notions s’accordent.
Après avoir polarisé les deux notions l’une contre
l’autre et illustré les limites de la liberté quand elle est associée au libre arbitre,
nous tenterons de mettre en lumière le fait que l’étude des déterminismes
constitue un outil pour la liberté.
Enfin, nous tenterons de répondre à la
problématique de l’accusé avec la raison kantienne, où la liberté peut coexister
avec le déterminisme, en tant que prédicat impératif au droit et à la morale.
L’expérience constitue pour certains philosophes une preuve directe de
l’existence de la liberté, c’est notamment la position de Rousseau et Descartes.
Ce dernier voit par exemple dans Les Principes de la philosophie un exercice
élémentaire de liberté dans le choix du consentement.
La liberté d’indifférence
fait aussi office de preuve dans le sens où l’homme est en mesure de sortir d’un
dilemme comme celui de l’Âne de Buridan, ainsi la volonté n’a pas à être portée
par ce qui est bien ou mauvais.
Rousseau écrit dans La nouvelle Héloïse qu’il ne
peut que ressentir le sentiment intérieur de sa propre liberté, et ce malgré toutes
les démonstrations qu’il tient pour faussement logiques : « un raisonneur a beau
me prouver que je ne suis pas libre, le sentiment intérieur, plus fort que tous ses
arguments, les dément sans cesse ».
L’auteur fait en effet des détracteurs de la
liberté des sophistes, tant l’évidence sensible lui apparait.
Cela-dit on peut douter
de cette liberté par le sensible, peut-on faire confiance à ce seul ressenti ? Et
même à l’expérience personnelle ? Cela semble effectivement bien trop subjectif,
et ce seul sentiment varie d’un individu à l’autre sans pouvoir donner lieu à un
fondement scientifiquement solide.
Cependant la liberté d’indifférence de
Descartes n’est encore que selon l’auteur son degré le plus faible, il passe audelà de la sensation.
Ce qu’il définit comme une liberté absolue dans une Lettre à
Mesland réside quant à elle dans la capacité proprement humaine de pouvoir
s’auto-déterminer en rompant un rapport causal présupposé.
L’individu
normalement déterminé à préférer le choix A au choix B peut rompre cette
préférence supposée, car il est libre.
Mais nous pouvons assez vite en cerner les
limites : cela revient à agir de manière absurde en allant contre le meilleur choix
pour affirmer sa liberté.
C’est là l’aliénation la plus explicite : l’individu s’enferme
et se restreint lui-même en pensant affirmer être libre.
De plus, le choix est-il
réellement désintéressé ? Il y a bien pourtant une vocation à un tel acte, en
voulant affirmer son libre-arbitre par l’acte gratuit, l’individu démontre avec
ironie l’inverse : il a été déterminé par un motif.
Le libre-arbitre apparait alors
assez peu désirable, à quoi bon s’il ne réside uniquement que dans l’acte
absurde ? La conception de la liberté comme absolu s’affaisse assez vite face à
une conception déterministe de plus en plus portée par les progrès scientifiques.
On pourrait même dire que le libre arbitre ne se prouve pas réellement, en tant
que parti pris métaphysique.
En réalité s’efforcer à en faire la démonstration
semble plutôt donner raison à la thèse déterministe, dans le sens où ce librearbitre apparait comme un effet, attardons-nous là-dessus.
Laplace se place
comme une figure phare du déterminisme dans son Essai philosophique sur les
probabilités.
Notons que l’auteur envisage un futur conçu comme une voie
unique, sans alternatives ; il balaie de fait la possibilité réelle d’agir autrement
dans des circonstances données.
C’est donc un pan de ce qui définissait le librearbitre en introduction qui s’écroule.
En mettant en scène son « démon »,
Laplace fait la description d’un monde entièrement régi par des séries causales
indescriptibles du fait de leur complexité.
En présentant ce point de vue
déterministe, il établit donc que le futur est imprédictible de fait, au sens où les
technologies qui lui étaient contemporaines ne sauraient jamais appréhender les
rapports causals dans leur ensemble.
Seulement cette constatation tend à perdre
de sa superbe au profit de l’élaboration des lois qui régissent notre monde.
C’est
tout l’objet de la recherche scientifique qui tend à s’approcher du démon de
Laplace, représentation théorique de ce qu’est celui qui peut appréhender les
rapports causals dans leur ensemble.
L’élargissement du champ de la
connaissance scientifique a donc favorisé une approche déterministe des choses,
en témoignent le positivisme de Comte ou le scientisme de Le Dantec.
Le
dualisme entre météorologie et climatologie est par ailleurs un très bel exemple
des limites (tout du moins actuelles) de ladite science : tandis que l’une ne peut
observer qu’à court terme faute de moyens qui seraient inestimables, l’autre se
fonde sur la statistique et l’estimation.
Il convient aussi de faire remarquer que la
recherche scientifique a su trouver des failles à ce déterminisme qu’on pensait
absolu : la physique quantique est un exemple très récurrent mais la théorie du
Chaos fait aussi office de limite.
Cela dit, c’est dans ce référentiel déterministe
qu’on peut donc nier d’une certaine manière la liberté humaine au sens où
l’individu pourrait s’auto-déterminer.
En tant qu’énième rouage d’une immense
machine, l’homme serait bien présomptueux de penser pouvoir outrepasser les
règles.
C’est ce pourquoi l’homme dans son ensemble serait déterminé (selon
une somme de liens causals complexes, certes), au même titre que la chute
d’une pomme de son arbre.
C’est notamment ce qu’appuie d’Holbach dans son
Système de la Nature où il voit dans l’existence des institutions la preuve d’une
nécessité à la détermination.
Il est d’ailleurs intéressant de constater le point de
vue matérialiste qu’il a des choses, d’Holbach n’attribue donc pas de causes
métaphysiques aux évènements, ce qui renforce l’idée selon laquelle l’homme
n’est qu’un assemblage complexe d’atomes, porté par une multitude de réactions
biologiques.
Nous pouvons dans une certaine mesure nous appuyer sur ce que
soutient Spinoza : la liberté est une illusion, elle-même préservée par notre
ignorance des différents facteurs déterminants.
L’auteur, autre grande figure
philosophique du déterminisme, écrit dans une Lettre à Schuller que nous
sommes conscients de nos actes, mais pas des causes qui les déterminent.
C’est
là la cause de l’illusion de la liberté : l’individu croit ainsi avoir eu le choix, car il
est inconscient du fait qu’une seule éventualité était déjà déterminée.
La
métaphore de la boule de billard est là très explicite : la boule, qui vient d’être
choquée suit sa trajectoire.
Cependant elle ignore qu’elle a été choquée de
manière antécédente, de plus elle ne connait pas la loi physique qui la fait se
mouvoir, ici le principe d’inertie.
C’est donc une boule se croyant libre d’aller vers
là où on l’a frappée, qui....
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