DESCARTES: droit et devoir
Extrait du document
«
Il est des devoirs qui ne découlent pas du droit d'autrui, par exemple le devoir de
bienfaisance.
Le malheureux n'a, pour ce qui est de lui, de droits sur ma bourse que
dans la mesure où il suppose que c'est moi qui me ferais un devoir d'assister les
malheureux; quant à moi, mon devoir ne se fonde pas sur son droit : son droit à la
vie, à la santé, etc., ne concerne pas des individus mais l'humanité en général (le
droit de l'enfant à la vie concerne les parents) et ce droit impose à l'État, ou tout
simplement à ses proches, et non à l'individu, le devoir de l'entretenir.
(Quand on
prétend demander à quelqu'un d'aider à lui seul un pauvre, il répond souvent par
une échappatoire : il ne sait pourquoi ce serait lui, un autre le pourrait tout aussi
bien que lui.
Il y consent plus volontiers sous forme de contribution partagée avec
d'autres, d'une part, naturellement, parce que ainsi il n'a pas à supporter la totalité
de la dépense, mais, d'autre part, parce qu'il sent bien que ce devoir n'incombe pas
à lui seulement, mais également aux autres.) C'est en ma qualité de membre de
l'État que le pauvre doit exiger de moi l'aumône comme un droit, mais ici il formule
son exigence de manière immédiate alors qu'il devrait le faire par l'intermédiaire de
l'État.
Introduction
Ce texte de Hegel porte sur l'aumône.
Il montre que celle-ci ne saurait résulter d'un droit du pauvre sur mes biens.
Le
droit des pauvres ne s'exerce qu'au niveau de la collectivité.
L'État doit donc prendre en charge l'assistance des
pauvres.
Nous serons donc amenés à nous interroger sur la valeur et les limites de cette assistance organisée par
l'État.
A.
Explication
Ce texte de Hegel présente le « devoir de bienfaisance » — c'est-à-dire le devoir d'assister les pauvres — comme
l'exemple d'un paradoxe «II est des devoirs qui ne découlent pas du droit d'autrui ».
Il y a là un paradoxe car
habituellement droit et devoir sont réciproques.
Ainsi, si j'ai le devoir de ne pas voler les biens d'autrui, c'est parce
qu'autrui a le droit de les posséder.
Pourtant, il y a bien un devoir d'assister les pauvres.
De leur côté, les pauvres ont
bien droit à cette assistance.
Mais aucun individu n'a le droit d'exiger une aumône d'un autre individu.
C'est donc que
le droit des pauvres à l'assistance ne s'exerce pas vis-à-vis des individus, mais vis-à-vis de la communauté entière.
C'est donc en tant que membre de la communauté que j'ai un devoir à l'égard des pauvres.
C'est par l'intermédiaire de
la communauté, et en particulier de l'État, que le paradoxe peut être levé.
Reprenons à présent chacun de ces points.
1.
Le paradoxe.
Le pauvre n'a pas de droit sur moi.
Nul ne peut exiger de moi une aumône.
Toute mendicité ne peut être qu'un appel à
ma générosité : libre à moi de donner ou non, de décider à qui je viens en aide, de fixer le montant de mon assistance.
Est-ce à dire que je n'ai pas de devoir à l'égard des pauvres? Certes, il existe bien un tel devoir, mais il ne concerne
que le pauvre en général.
Il ne me lie à aucun individu en particulier.
II m'appartient en outre de fixer moi-même les
limites de ce que j'estime en mon devoir de faire.
Nul n'est tenu d'assister tout homme à toute heure.
Cela ne signifie pas non plus que le pauvre n'ait pas de droits.
Hegel parle à la ligne 6 d'un « droit à la vie ».
Ainsi, le
pauvre a droit à la santé et à tout ce qui est nécessaire pour vivre.
Cela fait partie des droits de chaque homme.
2.
Sa résolution.
Ce droit s'exerce vis-à-vis de la communauté.
Si le pauvre a droit à la vie, cela veut dire que la vie du pauvre est un
devoir pour les autres hommes.
Le droit du pauvre s'exerce donc vis-à-vis de l'homme en général, de la communauté
humaine.
On peut ainsi tracer autour de chaque individu une série de cercles concentriques, représentant autant de
communautés, de la plus petite à la plus grande, dans lesquelles l'individu est inséré : famille au sens strict (parents et
enfants) ou en un sens plus large, communauté politique (État), humanité en général.
Le devoir d'assistance ne s'applique à l'individu que comme membre d'une de ces communautés.
Le pauvre est alors
pris en charge par la famille, le clan ou le village.
Il l'est enfin et surtout par l'État : l'État prélève des impôts sur les
individus et en redistribue une partie aux pauvres.
C'est le cas du revenu minimum d'insertion (R.M.I.).
C'est
l'administration qui redistribue l'argent issu de l'impôt à ceux qui répondent aux critères requis pour recevoir le R.M.I.
Le texte de Hegel propose de remplacer la charité privée par une assistance organisée au niveau de l'État, la mendicité
étant remplacée par des démarches auprès de l'administration compétente.
Donc, pour Hegel, refuser de faire l'aumône
n'est pas une preuve d'égoïsme ou d'avarice : il y aurait dans cette attitude le pressentiment du caractère collectif du
devoir à l'égard des pauvres.
B.
Commentaire
I.
L'État libère le mendiant de l'asservissement à son bienfaiteur.
1.
L'aumône asservit celui qui la reçoit.
Même si le pauvre n'a aucun droit sur moi, et si je n'ai pas de devoir particulier à son égard, tout geste de bienfaisance.
»
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