De quelle vérité l’opinion est-elle capable ?
Extrait du document
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Dans le langage courant, le terme "opinion" est bien souvent utilisé pour désigner l'avis personnel d'une personne,
qui ne vaut pas pour tout le monde.
Ce mot est la plupart du temps d'ailleurs connoté négativement.
En effet, il
découle du grec doxa qui renvoie à l'idée d'apparence.
L'opinion dès lors est une croyance, un assentiment qui n'est
pas fondé rationnellement et qui est toujours subjectif.
Ce qui semble donc s'opposer à la vérité qui désigne le
caractère d'un jugement qui ne peut que susciter l'accord.
Elle renvoie à l'opposé de l'opinion à une certaine
universalité, à une objectivité.
Comment l'opinion subjective peut-elle prétendre à la vérité objective? Cependant,
l'expression "de quelle vérité" du sujet laisse entendre qu'il pourrait y avoir plusieurs sortes de vérités.
L'opinion ne
peut-elle donc pas être un début de vérité? Si j'exprime mon opinion, c'est que je pense qu'elle a quelque chose de
vrai?
L'opinion est capable d'une vérité immédiate
La tradition philosophique a longtemps tenté de chasser l'opinion de tout discours prétendant à la vérité.
Néanmoins avoir une opinion, c'est- déjà émettre un jugement, c'est déjà tenir quelque chose pour vrai.
Il doit donc
y avoir déjà un rapport à la vérité.
Au premier abord, l'opinion a avoir avec une vérité personnelle, qui dépend
exclusivement de celui qui la pense.
L'opinion de telle personne dit la vérité de cette personne.
Platon dans La république caractérise l'opinion comme connaissance empirique et inférieure : empirique parce qu'elle
ne s'en tient à ce que les sens ou une première approche immédiate de la réalité peuvent procurer et inférieure
parce qu'elle n'est pas véritablement issue de la raison.
Pourtant il admet que l'opinion puisse être droite et qu'elle
est le premier degré de connaissance, même éloignée des exigences rationnelles.
Cela veut donc dire que l'opinion
peut contenir un début de vérité, une connaissance parcellaire.
La critique de l'opinion chez PLATON
Le refus de l'absolu
Comment définir la vérité ? N'est-elle pas profondément relative et subjective ? C'est ce que pensent les
adversaires de Socrate, comme les sophistes, qui font remarquer que si l'on considère que le vrai est ce qui
correspond à ce que les hommes vivent, force est de constater que la vérité est profondément relative.
Les
hommes ayant des sensibilités différentes, ce qui est vrai pour les uns ne l'est pas forcément pour les autres.
Il
faut donc dans ces conditions non pas parler de la vérité mais des vérités, en laissant celles-ci s'exprimer.
La
vérité concernant la vérité, c'est qu'il n'existe que des vérités humaines.
La vérité absolue est une dangereuse
illusion.
Il n'y a que les hommes et leur diversité.
Tout est relatif ?
Face au relativisme des sophistes, Platon choisit une autre voie.
Est-ce la bonne méthode, demande-t-il, que
de partir du vécu des hommes afin de penser la vérité? Non! homme n'est pas la mesure de toutes choses
comme le soutient Protagoras.
L'idée de la relativité humaine de la vérité relève de la flatterie.
Dire que chacun
a sa vérité, c'est flatter l'amour-propre de tout un chacun en faisant de celui-ci le détenteur du vrai, du simple
fait qu'il est.
Savoir, c'est se ressouvenir
La vérité, c'est justement que tout n'est pas affaire d'opinion et de vécu personnel; que le vrai n'est pas
simplement ce qui est «vrai pour moi» et que si on ne disposait pas de l'idée de l'homme en général, on ne
pourrait même pas parler de l'homme en particulier.
Je me connais parce que je me reconnais dans une chose
qui est autre que moi et par laquelle, me comparant à elle, j'en viens à pouvoir me penser.
Cette autre chose,
c'est l'idée de ce que je devrais être.
Un idéal du parfait présent en nous, nous permettant de progresser et de
nous transformer.
De plus, il faut bien voir qu'on ne peut chercher ce qui nous est totalement inconnu, sinon on ne saurait pas où
chercher.
Dès lors l'opinion nous montre un chemin à suivre, même si ce n'est pas le bon.
Elle nous donne un point
de départ pour notre recherche, qui peut être réfuté.
Mais on peut dire que la connaissance n'est jamais immédiate
et pleine.
Pour Bachelard, " En fait, on connaît contre une connaissance antérieure, en détruisant des
connaissances mal faites.".
L'opinion n'est qu'apparence
Si l'opinion est doxa (apparence), elle se situe à l'égard du monde sensible et mouvant.
C'est pourquoi Platon
exprime une méfiance immédiate envers l'opinion.
L'opinion est connaissance des sens et le philosophe grec insiste
sur le fait que les sens sont trompeurs.
De surcroît, l'opinion est souvent reçue et non trouvée : elle dépend du "on dit".
Elle représente ainsi une absence
de recherche, une passivité de l'esprit.
Comme le rappelle Heidegger, le "on" est synonyme d'anonymat et
d'irresponsabilité.
On doit donc admettre que l'opinion a toujours tort en principe, même s'il lui arrivait d'être dans le
vrai : c'est qu'elle n'est pas fondée sur la raison, elle ne résulte pas d'un raisonnement et elle est incapable d'être
défendue par une argumentation rationnelle.
"L'opinion a, en droit, toujours tort." (La formation de l'esprit.
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