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Dans quelle mesure l'ignorance s'oppose-t-elle à la liberté ?

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« Analyse et problème : • L'ignorance est le fait de ne pas connaître quelque chose : soit de ne pas en connaître l'existence, soit d'en connaître l'existence sans en avoir la compréhension.

A l'ignorance, on peut opposer la connaissance ou le savoir. Cependant, l'ignorance n'est jamais éradiquée : il nous est impossible de tout connaître. • La liberté est l'état de celui qui n'est pas soumis à des contraintes, externes ou internes.

Selon le type de contraintes envisagées, on peut entendre la liberté en plusieurs sens : - la liberté comme absence de toute causalité, s'opposant au déterminisme - la liberté physique - la liberté morale : une absence de contraintes internes (notamment les passions) - la liberté politique : absence de contraintes politiques et sociales, par opposition à l'oppression. • Pour se libérer des contraintes, encore faut-il les connaître : en ce sens, l'ignorance s'oppose à la liberté puisqu'elle la freine.

La méconnaissance des causes internes et externes qui déterminent nos actions et nos pensées entraîne la privation de notre liberté.

C'est également cette méconnaissance qui permet à d'autres d'avoir prise sur nous et de contrôler nos actions : à l'ignorant, on peut faire croire ce qui est faux et ainsi le dominer. • Cependant, si on voit bien que l'ignorance peut être un frein à la liberté, peut-on dire pour autant que la connaissance permet de se libérer ? La connaissance, qui dévoile les causes à l'oeuvre dans notre vie, n'apporte-telle pas au contraire la conscience que la liberté n'est qu'une illusion ? • C'est donc entre ces deux voies que le problème se pose.

D'un côté, l'ignorance est un frein à la liberté ; d'un autre côté, l'absence d'ignorance rend seulement conscient de notre asservissement.

Quelle valeur faut-il alors accorder à l'ignorance ? I – L'asservissement par l'ignorance : ignorance et liberté politique • Il s'agit ici principalement de l'ignorance des causes externes : phénomènes économiques, notions de justice, d'égalité, connaissance d'autres systèmes politiques etc.

Ce type d'ignorance est un danger pour la liberté lorsque l'ignorant est confronté à plus savant que lui.

En effet, il est aisé d'utiliser cette ignorance à des fins de manipulation.

Le discours politique dans sa dimension rhétorique s'appuie sur ce phénomène, utilisant des termes et des concepts qui ne sont pas bien connus de « l'ignorant » et parvenant ainsi à le convaincre. • Ainsi, dans le Gorgias, Platon montre le danger des sophistes et de leur rhétorique : c'est un art puissant qui est au service du pouvoir de son utilisateur.

Elle ne cherche pas la vérité, la vertu ni la justice mais la satisfaction des passions et plaisirs personnels au détriment des « faibles ».

Or l'ignorant est aisément victime de cette séduction par le discours. • Si l'ignorance met la liberté en danger, c'est qu'elle est synonyme de crédulité. Lorsqu'on ne sait pas, tout discours émanant d'une autorité, notamment politique, est perçu comme une vérité.

De plus, l'ignorance n'est pas seulement l'absence de connaissance, mais également un ensemble de connaissances fausses ou incomplètes, des préjugés, ou ce que les grecs appelaient la doxa.

Un discours habile peut tirer partie de la doxa, flatter son auditoire et le rallier à sa cause. • Dans ce contexte de liberté politique et de manipulation, la notion à opposer à celle d'ignorance est l'éducation plutôt que la connaissance.

L'éducation est ce qui permet de comprendre le fonctionnement d'une théorie, d'un discours, d'une thèse et, même si le sujet nous est peu connu, de distinguer ce qui relève de la démonstration et ce qui relève de l'idéologie ou de la rhétorique.

L'ignorance n'est donc un mal que si elle n'est pas consciente d'elle-même et mène à la crédulité. II – Ignorance et liberté morale • L'ignorance des causes internes s'oppose également à la liberté, mais il s'agit alors d'une liberté morale ou métaphysique.

Méconnaître nos mécanismes psychologiques, nos passions, c'est se leurrer sur les véritables motifs de nos actions.

On n'agit pas librement mais suivant un déterminisme interne (obéissant à des motifs inconscients par exemple, ou à l'exemple familial etc.).

Connaître ces causes internes au contraire permettrait de s'en détacher et d'agir librement. • Ce que l'on oppose ici à l'ignorance, c'est la conscience.

L'ignorance ôte la conscience de nos déterminations et donne l'illusion de la liberté : mais comme le montre Spinoza, il s'agit bien d'une illusion :. »

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