Dans quelle mesure est-il raisonnable de douter ?
Extrait du document
«
DIRECTIONS DE RECHERCHE
• Distinguer le « doute méthodique » (et conçu comme éventuellement provisoire) (cf.
Descartes) du doute dit «
sceptique ».
• Au nom de quoi pouvons-nous douter de tout (« définitivement »)?
— En effet on nous demande s'il est raisonnable de douter de tout, c'est-à-dire si l'on a raison de douter de tout.
— Ne serait-il pas alors contradictoire (et par là non raisonnable pour « la raison ») de dire que l'on a raison de
douter de tout ?
Cette question met en avant les difficultés liées au problème du doute dans le domaine de la réflexion.
En effet, si je
doute de tout ce qui m'entoure, si je suis plongé dans l'incertitude, comment puis-je fonder mon savoir ? sur quoi
peut s'appuyer mon esprit pour établir des connaissances si je remets en question le moindre objet du monde ? Mais
douter ne signifie pas douter de tout et systématiquement.
Car si le doute devient méthodique, comme le préconise
Descartes, s'il est le fruit d'un usage raisonnable de l'esprit, ne peut-il pas, au contraire, permettre à l'homme
d'accéder plus facilement à la connaissance vraie des choses ?
N'est ce pas cet usage de la raison que suggère la réflexion philosophique elle-même ? car en étant certain de ma
connaissance des objets du monde, je prends en effet le risque de me laisser guider par l'opinion.
Or, la philosophie,
ayant pour dessein la quête de la vérité, ne peut prétendre tout savoir d'emblée.
Loin d'être arrogante, la véritable
pensée philosophique doit au contraire faire preuve d'humilité et répondre, avant toute tentative dogmatique à la
célèbre injonction de Socrate : « Ce que je sais c'est que je ne sais rien.
»
Il s'agit donc de trouver cette mesure exacte de doute nécessaire à la pensée, cette part raisonnable d'incertitude
qui, loin de plonger l'esprit dans un scepticisme absolu doit au contraire l'inviter à fonder des raisonnements fiables.
I/ Les sceptiques de l'Antiquité ou le doute permanent
Le doute chez les sceptiques de l'Antiquité, consistait à suspendre son jugement, c'est à dire à se méfier de ce qui
se donne pour vrai et de s'en défier toujours afin d'approcher au plus près de la sagesse.
« La tranquillité, pensent
les sceptiques, advient en même temps que la suspension de l'assentiment sur toutes choses » écrit Sextus
Empiricus dans Esquisses pyrrhoniennes.
Il ne s'agit donc pas pour les Anciens, de douter de tout, de manière continue, systématique et excessive.
Les
sensations par exemples ne peuvent être remises en cause pas plus que l'existence même des choses.
Ce que
soutient le scepticisme c'est l'impossibilité dans laquelle l'homme se trouve de connaître les choses avec certitude.
En effet, quand nous cherchons à savoir, nous ne rencontrons que des voies sans issue, littéralement des apories
(du grec : a , préfixe privatif et poros, issue).
Dès que nous tentons de connaître les choses « telles qu'elles sont »,
nous nous retrouvons dans cette impasse.
Mais la pensée des sceptiques ne consiste pas à considérer que la vérité n'existe pas ou qu'elle est inaccessible à
notre intelligence.
Il y a seulement des désaccords actuels concernant les définitions mêmes, lesquels doivent nous
inciter à suspendre notre jugement, c'est a dire à éviter l'affirmation de toute certitude.
II/ Le scepticisme empirique de Hume
En s'inspirant vraisemblablement du scepticisme antique, la philosophie de
Hume s'affirme comme une critique du rationalisme dogmatique de la
métaphysique du XVIIème siècle.
Voyant dans l'expérience sensible un facteur
explicatif de notre croyance à la causalité, il réduit le principe même de
causalité à une simple opinion subjective, une association d'idées.
Hume: Expérience et Causalité
1.
La notion d'expérience : impressions et idées
Pour Hume, sont données à l'esprit d'abord des impressions, à savoir des
perceptions vives, et en second lieu les idées qui en sont les copies affaiblies
(Traité de la nature humaine).
Au point de départ de sa philosophie, nous
rencontrons donc, non seulement des données élémentaires, mais encore des
données qui ne se distinguent que par la manière dont nous en faisons
l'expérience.
Il n'y a pas d'extériorité, celle des choses* dont nous instruisent
les sens, ni d'intériorité, celle de l'esprit quand il réfléchit sur lui-même : il n'y
a que l'expérience et ses critères, la vivacité ou la faiblesse du senti.
2.
La critique de la causalité : la raison comme habitude
Toute la pensée relève alors des relations entre ces données et de la manière
dont nous les éprouvons.
C'est dire qu'il n'y a aucune relation, si ce n'est celles que l'esprit établit.
Ainsi, l'idée de
causalité, qui signifie qu'il y a une connexion nécessaire entre deux choses, la cause et l'effet, n'est pas perçue.
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