Cours philo complet
Publié le 17/06/2022
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COURS DE
PHILOSOPHIE
(1ère et Tle séries L/S)
Chapitre I _____ LES ORIGINES ET LA
SPÉCIFICITÉ
DE LA RÉFLEXION PHILOSOPHIQUE
Introduction
Définir la philosophie est une affaire complexe.
La tâche est difficile lorsqu’il
s’agit de répondre à la question : Qu’est-ce que la philosophie ? Elle est
d’autant plus difficile qu’il n’existe pas encore de consensus sur le plan
définitionnel.
Chaque philosophe dit ce qu’il entend par philosophie en donnant
sa propre définition.
Leurs points de vue se confrontent les uns contre les
autres, si bien qu’il ne peut pas y avoir de définition unanime.
Chez Socrate, par
exemple, la philosophie « ne consiste pas tant à connaître beaucoup de choses
qu’à être tempérant (vertueux ou juste dans sa conduite) » (Apologie de
Socrate) tandis qu’Aristote y voit « la connaissance dans la totalité des choses
dans la mesure du possible » (Métaphysique).
Même s’il est impossible de
trouver une définition partagée par tous, on peut dire approximativement ce
qu’est la philosophie, ce qui nous amènera à poser le problème de ses origines.
Après avoir dégagé les conditions d’émergence de la philosophie, nous
réfléchirons sur la spécificité du discours philosophique.
Il s’agira de comparer
la philosophie avec les autres modes de connaissance que sont le mythe, la
religion et la science.
Pour terminer, nous ferons l’histoire de la philosophie en
évoquant quelques figures emblématiques et des courants philosophiques qui
ont marqué l’histoire de cette discipline.
I.Qu’est-ce que la philosophie ?
Tenter de définir la philosophie, c'est déjà philosopher.
Tout homme est un
philosophe potentiel : nul besoin de s'appeler Socrate, Platon ou Aristote pour
philosopher, seul compte l'amour de la réflexion et du questionnement.
À la
différence des sciences humaines, des sciences naturelles et des sciences
formelles qui ont chacune un objet d’étude et une démarche propre, la
philosophie, elle, n’a pas d’objet d’étude propre.
Elle s’intéresse à tout, mais
elle a toutefois une préférence pour certains domaines tels que la métaphysique,
l’anthropologie et l’axiologie.
A la question « Qu’est-ce que la philosophie ? », on ne saurait répondre avec
exactitude.
La définition de la philosophie demeure un sujet controversé, car il
y a autant de philosophes que de définitions, ce qui rend impossible une
définition unanime, acceptée par tous.
C’est ce qui pousse le philosophe
allemand Emmanuel Kant à dire que chaque philosophie est bâtie sur les ruines
de la précédente et elle sera à son tour critiquée.
Même si en philosophie nul n’a
le monopole de la vérité et même s’il est difficile de dire ce qu’est la
philosophie, on peut néanmoins donner quelques considérations générales pour
avoir une idée sur ce qu’elle est.
•Selon une certaine tradition, c’est Pythagore qui a utilisé le mot philosophie
pour la première fois.
De passage à Phliente, Pythagore a eu de nombreux
échanges avec le souverain de cette ville, Léon.
Ce dernier, impressionné par
Pythagore, lui demandait sur quel art il s’appuyait, Pythagore répond qu’il ne
connaît pas un seul art mais qu’il est philosophe.
Le souverain lui demanda
de lui indiquer les traits à partir desquels il est possible d’identifier un
philosophe, Pythagore de répondre que ce sont ceux qui « observent avec
soin la nature, ce sont ceux-là qu’on appelle amis de la sagesse c’est à dire
philosophes ».
En fait, Pythagore se présentait en « philosophos » (amoureux
du savoir) et non en « sophos » (savant).
Pour mieux se faire comprendre, il
compare la vie à une foire et dit : « La vie des hommes est semblable à ces
grandes assemblées qui se réunissent à l’occasion des grands jeux publics de
la Grèce où les uns se rendent pour vendre et acheter, d’autres pour gagner
des couronnes, d’autres enfin pour être simples spectateurs.
De la même
manière, les hommes venus dans ce monde recherchent les uns de la gloire,
d’autres les biens matériels et d’autres, un petit nombre, se livrent à la
contemplation, à l’étude de la nature des choses : ce sont les philosophes ».
•Yyriot, le mot « Philosophie » vient du grec philo-Sophia que l'on traduit
généralement par « amour de la sagesse ».
Philo signifiant amour et Sophia,
sagesse.
Dans l’expression « amour de la sagesse », l’amour désigne une
recherche, une conquête, une quête ou un désir.
Le mot sagesse signifie ici la
connaissance.
Par sagesse, Descartes entendra « une parfaite connaissance de
toutes les choses que l’homme peut savoir, tant pour la conduite de sa vie
que pour la conservation de sa santé et l’invention de tous les arts » (Lettre
préface des Principes).
Le philosophe apparaît ainsi dans une posture de
recherche de sagesse sans prétendre l'atteindre.
A ce propos, Karl Jaspers
disait : « L’essence de la philosophie c’est la recherche de la vérité, non sa
possession.
Faire de la philosophie, c’est être en route ».
Selon les stoïciens,
l’objectif du philosophe, c’est plutôt la recherche du bonheur ou de l’ataraxie
c'est-à-dire absence de trouble ou la paix de l’âme.
Pour Leibniz, la
philosophie serait inutile si elle ne permettait pas aux hommes d’être
heureux.
« A quoi sert-il de philosopher, si la philosophie ne me permet pas
d’être heureux ? », dit-il.
C’est pourquoi toutes les philosophies, le stoïcisme
et l’épicurisme y compris, ont pour fonction de rechercher le bonheur.
•II- Les origines de la philosophie
a.
Origine historique
Pour beaucoup d’historiens, la philosophie serait apparue au 6ème siècle avant
Jésus Christ dans la Grèce antique à Milet.
Il y avait dans la cité grecque
certaines conditions politiques, économiques et sociales qui favorisaient la
réflexion philosophique et qui expliquent justement la naissance de cette
discipline en Grèce.
Mais certains attribuent à la philosophie une origine
africaine en soutenant qu’elle est née en Egypte, et c’est la conviction de
Cheikh Anta Diop.
Dans son livre Civilisation et barbarie, il soutient que les
Grecs n’ont fait que recopier les œuvres égyptiennes.
Il écrit à ce sujet : « Les
Grecs initiés en Egypte s’approprient tout ce qu’ils apprennent une fois rentrés
chez eux ».
Mais la thèse la plus répandue est celle qui situe l’origine de la
philosophie en Grèce au 6ème siècle avant Jésus Christ.
Certes, les Grecs n’ont
jamais nié avoir appris auprès des Egyptiens, mais ils ont utilisé leurs
connaissances dans le but d’une perspective radicalement nouvelle, d’où la
phase de rupture entre les anciennes manières d’expliquer l’univers et la toute
nouvelle manière de l’expliquer.
C’est pourquoi au 6ème siècle, il s’est produit
ce que les historiens appellent le « miracle grec », c’est à dire le déploiement de
l’esprit en terre grecque.
Et c’est ce qui fait dire à Pierre Hadot que « c’est en
eux que réside véritablement l’origine de la philosophie, car ils ont proposé une
explication rationnelle du monde ».
Martin Heidegger de confirmer ces propos
en soutenant que la « la philosophie parle grec ».
b- Origine causale
Selon Platon, c’est l’étonnement qui est à l’origine ou la cause de la
philosophie.
Dans le Théétète, il fait dire à son maître Socrate que la
philosophie est fille de l’étonnement.
L’étonnement est une réaction de surprise,
de stupeur ou d’émerveillement devant ce qui est nouveau, inhabituel, inconnu.
Après s’être étonné, l’homme s’interroge.
Il lui faut alors trouver des réponses
aux questions angoissantes.
Dans la Métaphysique, au livre A, chapitre 2,
Aristote écrit : « C’est, en effet, l’étonnement qui poussa, comme aujourd’hui,
les premiers penseurs aux spéculations philosophiques ».
L’étonnement philosophique signifie arrêt admiratif devant une chose
inhabituelle, mais aussi devant une chose habituelle.
Mais les hommes ne
s’étonnent que devant un phénomène qu’ils ne comprennent pas.
Or, les
phénomènes qui sont les plus communs nous échappent souvent, et le sentiment
de connaître ce que l’on voit n’est souvent qu’une illusion.
Selon le philosophe
allemand Arthur Schopenhauer, « avoir l’esprit philosophique, c’est être
capable de s’étonner des évènements habituels et des choses de tous les jours,
de se poser comme sujet d’étude ce qu’il y a de plus général et de plus
ordinaire ».
On peut donc dire que l’étonnement se produit devant ce qui est
habituel et dont la nature nous offre chaque jour le spectacle.
On retrouve la
même idée chez Bertrand Russel qui dit : « Dès que nous commençons à penser
conformément à la philosophie, au contraire, nous voyons que même les choses
les plus ordinaires de la vie quotidienne posent des problèmes auxquels on ne
trouve que des réponses incomplètes ».
Pour les Milésiens, chez qui la philosophie est née, c’est l’étonnement qui
engendre la philosophie.
L’étrangeté d’un phénomène, au lieu de susciter le
sentiment du divin, éveille plutôt l’esprit en forme de questions.
c-Philosophie et sens commun
Le sens commun est un ensemble d’opinions, de croyances et de certitudes
tenues pour vraies et supposées indiscutables.
C’est ce que Martin Heidegger
appelle le « on » qu’on retrouve dans la formule « on a dit ».
Ce n’est pas parce
qu’on a dit une chose que c’est vrai.
Les certitudes du sens commun sont
partagées par la majorité de la société, mais elles peuvent se révéler fausses
comme les superstitions, les préjugés, les illusions et les dogmes.
L’homme du
sens commun ne se pose pas de question, il pense que le monde est évident.
Il
prend les choses telles qu’elles sont et n’a pas besoin de se poser des questions.
Comme le dit Bertrand Russel, l’homme du sens commun c’est celui qui « n’a
reçu aucune teinture de philosophe » et il est « prisonnier de préjugés dérivés du
sens commun, des croyances habituelles à son temps ou à son pays ».
Russel
dégage ici l’identité de l’homme du sens commun.
Ce dernier ne critique pas et
ne s’interroge pas sur ce que tout le monde a dit.
Contrairement à lui, le
philosophe encourage l’esprit critique.
Il s’arme du doute pour examiner et
analyser tout ce qu’on lui dit.
Il se méfie des traditions, des coutumes et remet
tout en cause comme l’a enseigné Vladimir Jankélévitch qui dit : « Philosopher
revient à ceci : se comporter à l’égard du monde comme si rien n’allait de
soi » (La Mauvaise Conscience).
En d’autres termes, pour le philosophe, rien
n’est évident.
Le but de la philosophie est de corriger les fausses certitudes, les illusions et
erreurs du sens commun ou de la philosophie elle-même.
Elle est une critique
de tous les savoirs, opinions, croyances, réflexions philosophiques etc.
L’esprit
critique se manifeste par une remise en question ou, du moins, une « mise à
questions » de toute affirmation, de tout jugement.
La critique est une exigence
fondamentale de la philosophie.
Elle constitue, selon Marcien Towa (philosophe
camerounais contemporain), le début véritable de l’exercice philosophique.
Il
dit à ce sujet : « La philosophie ne commence qu’avec la décision de soumettre
l’héritage philosophique et culturel à une critique sans complaisance.
Pour le
philosophe, aucune donnée, aucune idée si vénérable soit-elle, n’est recevable
avant d’être passée au crible de la pensée critique ».
d-Conflit entre la philosophie, la société et la religion
Le philosophe est mal vu dans la société à cause de son esprit subversif, critique
et contestataire.
C’est ce qui explique le conflit qui oppose la philosophie à la
religion, mais aussi à la société.
La religion est fondée sur des vérités absolues
que le croyant admet sans en douter, alors que c’est le doute qui constitue le
fondement de la philosophie.
Car la philosophie est une entreprise qui va en
guerre contre tous les savoirs constitués en dogmes, elle s’inscrit dans la
dynamique perpétuelle de remise en question.
La question des rapports entre la philosophie et la société se pose parce que la
philosophie est victime de préjugés souvent négatifs.
Ces rapports sont parfois
caractérisés par une violente attitude de rejet, car le philosophe est souvent
perçu comme un homme marginal qui a des comportements atypiques.
La
philosophie n'a pas manqué de connaître des heurts plus ou moins durs avec la
société.
C’est le cas d’Anaxagore qui a été forcé à l’exil pour athéisme et qui,
par la suite, a payé une lourde amende.
Protagoras aurait tombé du haut d’une
falaise en fuyant Athènes où il était accusé d'athéisme.
Socrate a été condamné
à mort sous les chefs d'accusation de corruption des mœurs de la jeunesse et
d’impiété, mais aussi de rejet des lois de la cité.
Giordano Bruno a été brûlé vif
pour sa théorie de l’univers infini (contre Aristote pour qui l’univers est fini),
son rejet de la transsubstantiation de la trinité, son blasphème contre le Christ et
sa négation de la virginité de Marie.
Spinoza a été excommunié et exclu de la
synagogue pour sa théorie de l’immanence de Dieu.
Galilée a failli être
condamné à mort pour avoir soutenu que la terre est ronde et qu’elle tournait
autour du soleil.
Il a finalement été contraint à changer d’avis pour avoir la vie
sauve.
C’est dire que bien des philosophes ont souffert pour avoir défendu des
positions que l’Eglise ne partageait pas.
Pour rappel, la philosophie a été la
servante de la théologie pendant plusieurs siècles, et il était inadmissible qu’un
penseur soutienne des théories contraires à celles de l’Eglise.
Les hommes de
l’Eglise utilisaient la philosophie, surtout les textes d’Aristote, pour confirmer
les écritures saintes.
Tous ceux qui défendaient des pensées qui remettaient en
cause les écritures saintes en faisaient les frais.
C’est au 18ème siècle, dit siècle
des Lumières, que la philosophie est enfin sortie de la tutelle de la religion
grâce à de libres penseurs comme Voltaire, Diderot etc.
Le siècle des Lumières
a ainsi ouvert une ère où les philosophes pouvaient s’en prendre à la religion
sans craindre des représailles.
Les adversaires les plus redoutables de la religion
sont incontestablement Nietzsche, Marx et Auguste Comte qui considèrent que
la religion et Dieu sont une invention de l’homme.
Marx dira que « la religion
est l’opium du peuple » tandis que Nietzsche, dans une formule osée, annoncera
que « Dieu est mort ».
III-Histoire de la philosophie
Faire l’histoire de la philosophie revient à étudier les différentes doctrines
philosophiques.
L’histoire de la philosophie consiste à reconstruire,
comprendre, interpréter et critiquer les positions et thèses des penseurs comme
Platon, Aristote, Descartes, Kant, Hegel etc.
Nombre de penseurs en appellent
aux philosophies antérieures pour les appuyer, pour s'en inspirer ou encore pour
les critiquer.
L’histoire de la philosophie peut être divisée en trois époques : la
philosophie antique, la philosophie médiévale et la philosophie moderne.
-La philosophie antique
La question fondamentale qui occupait les philosophes de l’antiquité était celle
du principe de toute chose.
Cette époque a rendu célèbres des philosophes dits
présocratiques comme Thalès qui tenait l'eau pour le principe de toute chose et
Anaximandre qui soutenait que le principe premier dont dérive toute chose est
une substance infinie qu'il appelait apeiron.
Anaximène, désignait l'air comme
l'élément dont est composée toute chose.
Héraclite affirma que le feu constitue
l'élément fondamental de l'Univers.
Empédocle estime que toute chose est
composée de quatre éléments irréductibles : l'air, l'eau, la terre et le feu.
Pythagore enseignait que l'âme est prisonnière du corps, qu'elle sera délivrée de
celui-ci après la mort et réincarnée dans une nouvelle forme de vie.
C’est cette
même théorie que Platon, maître d’Aristote, a développée.
Mais le philosophe
le plus célèbre est incontestablement Socrate pour qui philosopher ce n’est pas
savoir beaucoup de choses mais se conduire d’une manière vertueuse.
L’antiquité grecque est également marquée par des écoles philosophiques
comme l’épicurisme fondé par Epicure, le stoïcisme fondé par Zénon et le
scepticisme fondé par Pyrrhon.
Ces écoles s’intéressaient à la question
« comment bien vivre ? ».
Pour elles, la philosophie doit être comprise comme
un mode de vie, non pas uniquement comme une réflexion théorique.
- La philosophie médiévale
La philosophie médiévale est constituée de penseurs musulmans et chrétiens
qui, en cherchant des arguments convaincants, ont fait appel à la philosophie
antique.
Les ouvrages de Platon, d'Aristote et d'autres penseurs grecs furent
traduits ou commentés par des érudits arabes comme Ibn Sinâ (Averroès), Ibn
Rushd (Averroès) et Ghazali.
En plus de ces penseurs arabes, il y a eu des
penseurs occidentaux qui étaient à la fois philosophes et théologiens à l’instar
de Saint Augustin, Saint Thomas d’Aquin et Saint Anselme.
Ces philosophes
musulmans et chrétiens ont tenté concilier la philosophie et la religion dans le
but de fournir des fondements rationnels à leurs convictions religieuses.
- La philosophie moderne et contemporaine
Cette ère est marquée par les 18ème 19ème et 20ème siècles.
Au 18ème siècle, la
philosophie s’est libérée de la théologie et les philosophes n’avaient plus à
craindre des représailles.
La théologie n’avait plus de pouvoir sur la philosophie
après plusieurs siècles de domination.
Les philosophes les plus connus de cette
époque sont Descartes, Spinoza, Kant, Hegel, Nietzsche, Rousseau, Jean Paul
Sartre etc.
IV-Les écoles philosophiques de l’antiquité grecque
La philosophie doit être comprise comme une manière de vivre, non pas
seulement comme une réflexion théorique.
Autrement dit, être philosophe c’est
vivre et agir d’une certaine façon.
L’idée que la philosophie est un art de vivre a
ainsi amené certains philosophes à imaginer qu’ils devaient guider les hommes
et les aider à vivre correctement.
Ceci explique la naissance, dans l’antiquité,
d’écoles philosophiques comme le stoïcisme, l’épicurisme et le scepticisme.
- L’épicurisme fondé par Epicure soutient que le but de la vie est d'atteindre le
maximum de plaisirs et d’éviter le maximum de douleur, c'est-à-dire chercher le
plaisir et fuir la douleur.
Pour Epicure, le plaisir résulte de la satisfaction des
besoins qui sont de trois types : les besoins naturels et nécessaires (manger,
boire et dormir), les plaisirs naturels et non nécessaires (les plaisirs sexuels par
exemple) et les besoins ni naturels ni nécessaires (fumer, se droguer etc.).
Les
épicuriens disent que l’homme doit chercher la satisfaction des besoins naturels
et nécessaires et éviter les excès.
Ils estiment que « vivre heureux, c’est vivre
caché », c'est-à-dire fuir la gloire, la richesse, le pouvoir etc.
qui peuvent être
source de souffrance.
En sommes, pour les épicuriens, tout ce dont la
possession engendre plus de douleur que de plaisir (pas au sens d’érotisme mais
d’ataraxie) est à éviter.
Ils recommandent de vivre loin des excès, de la luxure et
d’adopter une conduite sobre.
« Un peu d’eau, un de pain, un peu de paille pour
dormir, une peu d’amitié suffisent pour être heureux », disent-ils.
- Le stoïcisme fondé par Zénon rejette les biens matériels.
Les stoïciens
enseignaient qu’on ne peut atteindre la liberté et la tranquillité qu'en étant
insensible au confort matériel et à la fortune.
Ils enseignent que chaque être
humain est une partie de Dieu et que tous les hommes constituent une famille
universelle.
Les stoïciens font également la différence entre ce qui dépend de
nous (nos pensées) et ce qui ne dépend pas de nous (les décrets de Dieu).
Ils
recommandent à l’homme d’accepter courageusement ce qui lui arrive et qui ne
dépend pas de lui.
Parmi leurs slogans, on peut retenir celui-ci : « Supporte et
abstiens-toi » et ce n’est qu’à cette condition que l’homme vivra heureux.
L’homme doit savoir souffrir en silence et accepter tout ce qui ne dépend pas de
lui.
C’est ce que les stoïciens résument en ces mots : « Le destin mène celui qui
veut et traîne ce qui ne veut pas ».
- Le scepticisme fondé par Pyrrhon considère que l’homme ne peut atteindre
ni la vérité ni la connaissance ni la sagesse.
Pour les sceptiques, le chemin du
bonheur passe par une suspension complète du jugement.
Leur philosophie,
c’est que rien n’est vrai.
Contrairement au doute méthodique de Descartes
qui est provisoire, le doute des sceptiques est permanent, ils doutent pour le
plaisir de douter.
- V-Caractéristiques de la réflexion philosophique
La réflexion philosophique est caractérisée par la critique.
L’esprit critique est
un esprit d’analyse et d’examen ; il s’oppose au sens commun.
Philosopher,
c’est se poser des questions en permanence et Karl Jaspers l’a résumé en ces
termes : « Les questions en philosophie sont plus essentielles que les réponses
et chaque réponse devient une nouvelle question ».
En philosophie, les
questions ne sont pas posées, elles se posent ; mieux, elles s’imposent.
Parler
des caractéristiques de la réflexion philosophie revient à dire ce qu’est la
philosophie et à l’opposer au mythe, à la religion et à la science.
1-Philosophie et mythe
Le mythe est un récit imaginaire où interviennent des êtres surnaturels dont
l’action serait à l’origine du monde.
Le récit mythique est cru de façon
dogmatique par les membres du groupe social, on ne le critique pas : on y croit
sans chercher à avoir des preuves.
Exemple de mythe, on peut citer l’histoire
d’Adam et d’Eve.
En effet, d’après les religions révélées, Adam et Eve ont été
chassés du paradis pour avoir désobéi à Dieu.
Ensuite, ils ont été envoyés sur
terre où ils seront obligés de travailler pour vivre.
Ce récit a pour fonction de
justifier l’origine du travail.
Mais, il ne faut pas croire que le mythe est
irrationnel.
Au contraire, elle témoigne d’une « rationalité » certes différente de
la pensée philosophique.
En fait, à l’instar de la philosophie, le mythe aussi
cherche à fournir une explication du monde, des phénomènes divers pour
apaiser la curiosité humaine.
Fondamentalement, la différence réside dans le
fait que là où la philosophie se pose des questions, le mythe apporte des
réponses.
Au demeurant, la philosophie et le mythe sont deux domaines de la
raison, mais différents par la démarche.
Ils s’efforcent d’apaiser la curiosité
insatiable de l’homme.
Le mythe a pour fonction de justifier ce qui existe, de dire comment les choses
sont ce qu’elles sont et pourquoi les hommes doivent adopter tels
comportements.
Il est irrationnel alors que la philosophie est rationnelle.
Là où
la philosophie se pose des questions sans prétendre les solutionner, le mythe lui,
apporte des réponses à toutes les questions de l’homme pour apaiser sa
curiosité.
Dès l’avènement de la philosophie, le mythe devait être dépassé.
Pourquoi est-il toujours présent dans l’œuvre de Platon ? Quelle place occupe-til dans sa philosophie ? Dans l’œuvre de Platon, le mythe a une fonction
pédagogique.
Pour expliquer quelque chose, Platon part de ce que les Athéniens
connaissent.
Autrement dit, il les retrouve dans leurs croyances pour leur
expliquer des vérités a priori inaccessibles par la raison.
En bref, la philosophie
se sert du mythe comme moyen d’illustration d’un argument.
2-Philosophie et religion
Les rapports entre la philosophie et la religion ont souvent été difficiles.
Un
conflit existe entre elles : le philosophe est perçu comme un athée tandis que le
religieux est vu comme un borné ou comme quelqu’un qui ne réfléchit pas.
Tiré
du latin religare, la religion signifie lien que l’homme entretient avec une force
extérieure nommée Dieu et qui exige une soumission à lui.
La religion est
censée dire une vérité absolue, incontestable, indiscutable pour le croyant.
Ce
dernier considère comme vrai tout ce que disent les textes sacrés et il interprète
toutes choses en fonction de la religion.
La religion est fondée sur la foi et
repose sur des dogmes, c’est à dire des vérités absolues.
A l’opposé, le discours
philosophique est humain, libre et critique.
Ce n’est plus Dieu qui parle aux
hommes, mais c’est un homme qui s’adresse à ses semblables.
Pour toutes ces
raisons, la religion s’oppose à la philosophie qui, elle, est fondée sur l’esprit
critique alors pour le croyant, le doute n’est pas permis.
Le philosophe doit
avoir un esprit de doute et de remise en question.
Avec son esprit libre et
critique, il s’attaque à tout, même à la religion.
Cette dernière va ainsi subir des
critiques de la part de philosophes comme Karl Marx qui la considère comme
« l’opium du peuple ».
Pour lui, c’est l’homme qui a inventé Dieu.
Nietzsche,
pour sa part, proclame la mort de Dieu, tandis que Sartre fera de l’existence de
Dieu une présence sans incidence sur le monde.
A travers ces philosophes
athées, il est aisé de constater que philosophie et religion ont eu des rapports
complexes depuis leur origine, mais il serait exagéré d’y voir une opposition
radicale.
Loin de s’exclure, elles entretiennent une relation réciproque.
Certes, elles n’ont pas le même fondement, car la philosophie repose sur la
raison et la religion sur la foi.
Mais à bien des égards, elles traitent des mêmes
questions.
En effet, toutes les questions que soulèvent la métaphysique comme
celles qui sont liées à Dieu, à l’âme, au destin etc.
trouvent leur réponse dans la
religion, de sorte qu’on a pu dire que la philosophie pose des questions et la
religion y apporte des réponses.
C’est ce que montre Blaise Pascal selon qui la
religion et la philosophie sont deux genres distincts.
A son avis, l’homme est
raison et cœur et il peut atteindre la vérité soit par le cœur soit par la raison.
Mais Pascal précise qu’il y a des choses que la raison ne peut pas savoir à
l’exemple de Dieu, et c’est au cœur de le sentir.
C’est pourquoi il dit que « Dieu
ne se prouve pas, il s’éprouve ».
Poursuivant cette même idée, il affirme dans sa
Pensée 277 : « Le cœur a ses raisons que la raison ne connaît pas ».
Saint
Augustin parle d’une ressemblance entre religion et philosophie.
Pour lui, il y a
une similitude entre les textes bibliques et ceux de Platon.
Il sera amené à
conclure que la philosophie ne peut nous permettre d’atteindre la vérité et
qu’elle doit se subordonner (soumettre) à la religion.
Saint Thomas d’Aquin
pense lui aussi que foi et raison peuvent atteindre la vérité, mais il accorde la
supériorité à la foi.
Spinoza soutient que entre la philosophie et la religion, il
n’y a pas de parenté.
Il dit : « Ni la théologie ne doit être servante de la raison,
ni la raison celle de la théologie, mais l’une et l’autre ont leur royaume
propre ».
Notes
Philosophie et science
-L’histoire d’une rupture:
Philosophie et science sont nées au 6ème siècle avant Jésus Christ à partir d’une
rupture avec les premières approches du réel.
Insatisfaits des explications
données par le mythe, la magie et la religion, les premiers penseurs vont
expliquer le cosmos en faisant appel à la raison.
On assiste, dès lors, à la
naissance de la pensée rationnelle.
Ces premiers penseurs étaient en même
temps des philosophes et des savants à l’instar de Thalès, de Pythagore,
d’Euclide, d’Archimède etc.
Philosophie et science ont donc cheminé ensemble
pendant longtemps.
Mais petit à petit, les sciences se détachèrent de la
philosophie et constituèrent, chacune, un objet et une méthode spécifiques.
C’est à ce titre qu’on a pu dire que « la philosophie est comme une femme en
ménopause qui a cessé de procréer et dont les enfants devenus adultes n’ont
cessé de se démarquer d’elle pour se constituer en disciplines autonomes ».
A l’origine, la philosophie était présentée comme la mère de toutes les sciences.
Elle était une discipline encyclopédique, répondant au vœu d’Aristote qui la
définissait comme le « savoir de la totalité ou la totalité du savoir ».
Au fil des
siècles, les progrès des sciences finissent par prendre le dessus en rendant
impossible la maîtrise du savoir total par un seul homme.
La philosophie
comme savoir encyclopédique devient ainsi chimérique.
La science prit alors
son autonomie avec Francis Bacon qui, au début du 17ème siècle, inaugure la
rupture en introduisant la méthode expérimentale.
Dans le même siècle,
suivirent la physique avec Newton et Galilée, l’astronomie de Kepler.
Au 18ème
siècle, la biologie fera de même et les sciences sociales au 20ème siècle
conclurent définitivement la séparation entre la philosophie et la science.
Il ne
sera désormais laissé à la philosophie que la logique et la métaphysique.
Ainsi,
de la pensée encyclopédique du philosophe comprenant tous les domaines du
savoir, émerge la pensée du scientifique qui porte sur un objet particulier avec
une méthode d’étude particulière.
- Différence de méthodes, d’orientations et de préoccupations:
La science est caractérisée par son objectivité alors que la philosophie est
marquée par la subjectivité.
Lorsque les philosophes posent la même question,
ils y apportent des réponses différentes, subjectives.
C’est parce que chaque
philosophie exprime les sentiments de son auteur, ses convictions personnelles,
ses croyances.
Il y a une pluralité en philosophie alors que dans les sciences il y
a une unité.
La science est caractérisée par son exactitude parce qu’elle produit
les instruments de vérification de ses théories.
La procédure de la science est
particulière : elle passe par l’observation, l’hypothèse, l’expérimentation, la
vérification et l’élaboration d’une loi universelle.
La science dit ce qui est en se
posant le « comment », mais la philosophie s’intéresse à ce qui devrait être et se
pose le « pourquoi ».
Quand le savant se demande comment les choses se
produisent, le philosophe, par la spéculation, se demande le pourquoi des
choses.
La science va du sujet vers l’objet : elle est cosmocentrique alors que la
philosophie va du sujet vers le sujet : elle est humaniste.
Par exemple Pourquoi
y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? Pourquoi l’homme existe-t-il pour
mourir ? Philosopher revient à se placer du point de vue axiologique, c'est-àdire s’interroger sur la valeur de la connaissance, de l’intérêt de l’existence etc.
Où va l’homme ? D’où vient-il ? Que lui est-il permis d’espérer ? Quelle est sa
destinée ? Ce sont là sont des questions intrinsèques à la philosophie.
La philosophie et la science ne s’opposent pas radicalement.
Elles sont, à bien
des égards, complémentaires.
Car la philosophie réfléchit sur la science et c’est
ce qui fonde l’épistémologie.
La philosophie redevient une conscience de la
science et non une concurrence pour celle-ci.
Elle s’érige en gardienne face aux
dangers multiples que l’usage des découvertes scientifiques fait courir à
l’humanité.
Pierre Fougeyrollas écartait toute compétition entre la science et la
philosophie en affirmant : « Toute compétition entre la science et la philosophie
serait ruineuse pour celle-ci ».
Par ailleurs, même si la science est une connaissance exacte, elle a cependant
des limites internes et des limites externes.
Les limites externes concernent
toutes les questions qui sont hors de son domaine d’investigation, ce sont les
questions métaphysiques ou éthiques.
Ces préoccupations sont prises en compte
par la philosophie.
Les limites internes se rapportent à la connaissance
scientifique qui n’est pas figée, immuable : elle progresse, ce qui explique le
progrès scientifique.
Il faut souligner, enfin, que la science peut avoir sur
l’homme un impact positif comme négatif (les armes, les manipulations
génétiques, la pollution de l’air etc.).
Et c’est précisément à ce niveau que la
philosophie intervient pour réfléchir sur la science.
Cette réflexion est appelée
épistémologie.
La philosophie refuse toute définition et toute délimitation
Pythagore enseignait que l'âme est prisonnière du corps, qu'elle sera délivrée de
celui-ci après la mort et réincarnée dans une nouvelle forme de vie, supérieure
ou inférieure selon le degré de vertu auquel elle est parvenue.
La fin suprême de
l'homme serait de purifier son âme en cultivant les vertus intellectuelles, en
s'abstenant des plaisirs sensuels et en accomplissant divers rites religieux.
Il
dit : « La vie des hommes est semblable à ces grandes assemblées qui se
réunissent à l’occasion des grands jeux publics de la Grèce où les uns se rendent
pour vendre et acheter, d’autres pour gagner des couronnes, d’autres enfin pour
être simples spectateurs.
De la même manière, les hommes venus dans ce
monde recherchent les uns de la gloire, d’autres les biens matériels et d’autres,
un petit nombre, se livrent à la contemplation, à l’étude de la nature des choses :
ce sont les philosophes »
Autre version : celle de (Diogène Laërce : Vies des philosophes).
Pythagore
compare la vie à une foire et dit : « Dans la foule qui y assiste, il y a trois
groupes distincts : les premiers viennent pour lutter, les autres pour faire du
commerce et les autres encore qui sont des sages se contentent de regarder.
De
même dans la vie, les uns sont nés pour être esclaves de la gloire ou de l’appât
du gain, les autres qui sont des sages ne visent que le savoir.
»
La philosophie serait née de l’échec des premiers modes de connaissance à
satisfaire la curiosité des hommes.
Il s’agit du mythe, de la magie et de la
religion.
Calliclès a adressé à Socrate une critique en lui reprochant de toujours se
consacrer à la réflexion philosophique et il prétend que le plus important c’est
la recherche des richesses matérielles et du pouvoir.
Cette priorité accordée aux
biens mondains peut être résumée dans cette célèbre formule : « Vivre d’abord,
philosopher ensuite ».
Karl Jaspers : « La philosophie se trahit elle-même lorsqu’elle dégénère en
dogmatisme, c'est-à-dire en un savoir, ni en formule définitive, ni complète »
« L’étonnement engendre l’interrogation et la connaissance ».
Gaston Bachelard : Deux hommes, s’ils veulent s’entendre, ont du se
contredire ; la vérité est fille de discussion, non pas fille de sympathie »
L’histoire de la philosophie présente une multiplicité de systèmes
philosophiques au point que l’on se demande si cette diversité ne serait pas un
argument contre la philosophie.
Chaque philosophe vante sa conception,
prétendant qu’elle vaille mieux.
Mais aucune philosophie n’a pu enterrer
l’autre, et c’est ce que dit Georges Gusdorf dans Traité de métaphysique :
« Aucune philosophie n’a pu mettre fin à la philosophie bien que ce soit le vœu
secret de toute philosophie ».
Cette diversité de points de vue n’est pas pour
autant un handicap pour la philosophie.
Au contraire, elle lu permet de
s’enrichir de nouvelles idées.
Différences entre science et philosophie
Différences de préoccupation : La philosophie se caractérise par ce désir
d’expliquer l’homme tant du côté de son comportement (psychologie), du côté
de son milieu social (sociologie, anthropologie) que du côté de ses relations
avec d’autres êtres supérieurs (métaphysique).
Elle place l’homme au cœur de
ses préoccupations, ce qui n’est pas le cas de la science qui se limite à expliquer
les phénomènes de la nature, considérant l’homme absent de ses analyses, d’où
son objectivité.
Conséquence, la science est cosmocentrique alors que la
philosophie est humaniste.
Différence d’orientation : La science va du sujet vers l’objet alors que la
philosophie va du sujet vers le sujet.
Philosopher revient à se placer du point de
vue axiologique, c'est-à-dire s’interroger sur la valeur de la connaissance, de
l’intérêt de l’existence etc.
Où va l’homme ? D’où vient-il ? Que lui est-il
permis d’espérer ? Quelle est sa destinée ? Là sont des questions intrinsèques à
la philosophie.
Quand le savant se demande comment les choses se produisent,
le philosophe, par la spéculation, se demande le pourquoi des choses.
Par
exemple, pourquoi y a-t-il de monde plutôt que rien ? Pourquoi l’homme existet-il pour mourir ?
Platon dit dans la République ce qu’il faut pour qu’une société soit bien
gouvernée.
Pour lui, chaque classe sociale doit respecter sa place et que les
philosophes soient rois ou bien que les rois soient des philosophes.
Pierre Fougeyrollas exposant la conception du sens commun de la philosophie
L’activité scientifique, selon Pierre Fougeyrollas, nous conduit de victoire en
victoire pendant que la philosophie paraît une activité oiseuse.
Fougeyrollas
met l’accent sur l’inutilité et l’inefficacité de la philosophie devant les progrès
scientifiques spectaculaire dans les domaines de l’automobile, de l’audiovisuel,
de la téléphonie, de l’astronomie, de l’ordinateur, de la conquête de l’espace etc.
Il ajoute : « Comparée aux techniques, l’activité philosophique semble
inefficace, inutile, parasitaire ».
Fougeyrollas expose ici la conception que
l’homme du sens commun a de la philosophie.
Il utilise les verbes paraître et
sembler pour montrer que c’est l’homme du sens commun qui voit ainsi la
philosophie.
Aristote (Métaphysique) « Tous les hommes ont, par nature, le désir de
connaître »
Kant Critique de la raison pure : « on ne peut apprendre aucune philosophie…
on ne peut qu’apprendre à philosopher.
»
Gusdorf « aucune philosophie n’a pu mettre fin à la philosophie bien que ce soit
le vœu secret de toute philosophie.
» (Traité de métaphysique).
En réalité, chaque point de vue enrichit le débat philosophique car comme le
montre Hegel « quelle que soit la diversité des philosophies, elles ont ce trait
commun d’être de la philosophie.
» (Phénoménologie de l’esprit).
Kant « Aie le courage de te servir de ton propre entendement » (Réponse à la
question : qu’est-ce les Lumières?)
Deschoux : « Ce que la raison ne peut expliquer, le mythe permet au moins de
le dire » (Platon ou le jeu philosophique).
Karl Jaspers « L’homme ne peut se passer de la philosophie…Aussi est-elle
présente partout et toujours.
»
Même si elles semblent divergentes, la philosophie et la science sont
complémentaires, car les faiblesses de l’une sont la force de l’autre et vice
versa.
La philosophie est née de la critique du mythe.
Elle est née du mythe mais
contre le mythe, pour parler comme Jean Pierre Vernant.
Dans les mythes, on
invoque des êtres surnaturels pour donner un sens à la réalité.
Or, les premiers
philosophes vont partir plutôt de la réalité elle-même pour chercher à connaître
le monde.
Au lieu de se limiter à la simple imagination, ils utilisent la raison
comme principal instrument et donnent une explication rationnelle de la réalité.
Jean Jacques Rousseau affirme que les philosophes sont des charlatans
dangereux qui n’ont produit que des « ouvrages (…) d’où s’exhale la corruption
des mœurs » ?
Chapitre II _____ LES GRANDES INTERROGATIONS
PHILOSOPHIQUES
LA MÉTAPHYSIQUE, L’ANTHROPOLOGIE ET L’AXIOLOGIE
Introduction
Il est de la nature de l’homme de s’intéresser obstinément à ce qui le dépasse comme
Dieu, le destin et l’âme.
Outre sa propre nature, les concepts de Bien et de Mal
constituent des sources d’interrogation.
Selon Kant la question philosophique par
excellence est « Qu’est-ce que l’homme ? ».
Elle résume les trois questions
fondamentales de la raison que sont : « Que puis-je savoir ? Que dois-je faire ?
Que m’est-il permis d’espérer ? ».
Ces questions ont toujours intéressé l’homme
qui, dès lors, se trouve au centre des grandes questions philosophiques d’ordre
anthropologique, axiologique et métaphysique.
Il lui faut trouver des réponses à ces
problèmes inévitables pour satisfaire sa curiosité intellectuelle.
I.
La métaphysique
1.
L’histoire d’un vocable
Dans l’existence de toute chose, il y a des aspects physiques ou sensibles et des
aspects métaphysiques ou intelligibles.
Est métaphysique tout ce qui existe et qu’on
ne peut saisir par les 5 sens.
La métaphysique est composée du suffixe « méta » qui
veut dire au-delà et du radical « physique » qui signifie physis ou nature en grec.
On
doit le terme métaphysique à Andronicos de Rhodes (1er siècle avant J.
C.) qui, en
procédant à la classification des œuvres d’Aristote, a remarqué qu’il y a parmi ces
œuvres qui ne traitaient ni de politique, ni d’éthique, ni de logique c'est-à-dire du
cadre physique ou terrestre.
Ces écrits traitaient de l’âme, du monde, de Dieu etc.
qui
sont des objets situés au-delà du monde sensible.
Andronicos de Rhodes les classa
sous le nom de « méta ta physica » ou Métaphysique.
Mais les expressions
qu’Aristote avait retenues étaient « la science des premiers principes et des premières
causes » ou « la philosophie première », ou encore « la science de l’Etre en tant
qu’être ».
A travers ces différentes appellations qui signifient la même chose, Aristote
se demandait s’il existe un être qui serait à l’origine de tous les autres êtres.
Un être
sans lequel tous les autres êtres ne seraient pas, un être qui serait au-dessus de tout le
monde, qui serait unique, éternel, infini et parfait.
Ainsi, on peut se rendre compte
que toutes ces propriétés ne sauraient appartenir à un être humain, car l’homme est
faillible et imparfait.
Ces propriétés appartiennent, au contraire, à Dieu.
Au-delà de
son aspect divin, la métaphysique recherche l’origine ultime des choses ou leur sens à
travers la question du pourquoi.
D’ailleurs, André Lalande la définit comme « la
connaissance de ce que sont les choses en elles-mêmes par opposition aux apparences
qu’elles présentent » ou encore « la connaissance des êtres qui ne tombent pas sous
les sens ».
2- Les défenseurs de la métaphysique
La métaphysique va régner jusqu’au moyen âge et retiendra l’attention de Descartes.
Ce dernier cherchait un fondement à la philosophie et il l’a obtenu dans la
métaphysique.
On peut retrouver l’idée de la métaphysique comme fondement de
toute chose dans l’exemple de l’architecture.
En d’autres termes, la résistance d’un
bâtiment dépend de son fondement : plus le fondement est solide, plus le bâtiment est
solide.
Mais si le fondement est fragile, le bâtiment risque de s’écrouler.
Dans une
célèbre métaphore, Descartes fait cette comparaison : « La philosophie est comme un
arbre dont les racines sont la métaphysique, le tronc la physique et les branches qui se
réduisent à trois principales que sont la médecine, la mécanique et la morale ».
Ces
deux exemples montrent l’importance de la métaphysique, car ni le fondement du
bâtiment ni les racines de l’arbre ne sont visibles, et pourtant sans eux rien ne peut
tenir.
Ce qui signifie que toute chose visible repose sur de l’invisible.
Le but de la métaphysique est de saisir par la raison la réalité cachée, celle qui est
voilée et qui se situe derrière le monde des apparences.
Mais est-il possible d’accéder
à cette réalité ? Oui répond Platon.
A son avis, l’homme peut accéder aux Idées,
c'est-à-dire au monde intelligible, monde de la vérité, opposé au monde sensible fait
d’erreurs et d’illusions.
Selon Platon, on ne peut faire de science que du monde
intelligible.
Du monde sensible, on ne peut rien connaître du fait qu’il est sans cesse
changeant ; en plus de cela les sens trompent.
La vraie connaissance est celle des
essences qui sont immuables, éternelles.
Descartes considère également qu’on peut
connaître le monde intelligible.
Pour lui, la métaphysique est la première des sciences
et la science sans laquelle aucune autre science n’est possible.
Mais d’autres
philosophes rejettent la métaphysique qu’ils considèrent comme une pseudoscience et
pensent qu’elle ne peut rien apprendre à l’homme de concret sinon l’enfoncer dans
l’illusion de connaître les choses cachées.
3- Critiques de la métaphysique
La métaphysique a fait l’objet de plusieurs critiques de la part des matérialistes et des
empiristes.
Pour le matérialisme, toute connaissance passe nécessairement par
l’observation des phénomènes et pour l’empirisme toute connaissance passe par
l’expérience.
Selon l’empiriste, Hume, la métaphysique pousse l’esprit à sortir du
cadre du monde physique et elle n’est qu’illusions et sophismes.
Kant sera influencé
par Hume sur les limites de la raison, et il l’avoue en ces termes : « Hume m’a
réveillé de mon sommeil dogmatique » (Prolégomènes à toute métaphysique
future…).
Selon Kant, il n’est pas possible de connaître le monde des noumènes
comme Dieu, l’âme, le paradis, l’enfer etc.
par opposition au monde des phénomènes,
c'est-à-dire le monde dans lequel nous vivons.
C’est ce qui l’a amené à fixer les
limites de la raison.
Cette dernière ne peut pas connaître Dieu, l’âme ou l’au-delà,
c’est plutôt la foi qui les ressent.
Et c’est ce qui pousse Blaise Pascal à dire : « C’est
le cœur qui sent Dieu et non la raison » ou encore « Dieu ne se prouve pas, il
s’éprouve ».
Voilà pourquoi la métaphysique, dans son projet de connaître le fond des
choses par la raison, a échoué.
Pour Kant, elle ne peut pas être une science.
Et c’est
ce qui l’amène à dire que « la métaphysique est un champ de bataille où il n’y a ni
vainqueur ni vaincu » (Critique de la raison pure).
Même s’il ne la considère pas
comme une science, Kant soutient que la métaphysique est un besoin vital pour
l’homme.
Karl Marx, pour sa part, estime que la métaphysique est un instrument de
domination des bourgeois sur les prolétaires.
Les marxistes considèrent que la
métaphysique est une fiction idéologique de la bourgeoisie.
Ils estiment qu’elle doit
être rejetée, car elle divertit les prolétaires au lieu de les conscientiser sur leur sort
désolant ou de les aider à combattre les inégalités sociales.
Auguste Comte s’est
également dressé contre la prétendue supériorité de la métaphysique et rejette son
statut de connaissance fondatrice ou supérieure.
Pour Comte, la métaphysique est
dépassée et il l’explique à travers la loi des trois états de l’esprit humain : la pensée
théologique qui correspond avec l’enfance de la raison, la pensée métaphysique qui
correspond avec l’adolescence de la raison et la pensée scientifique ou positive qui
correspond avec la maturité de la raison.
Parmi les critiques les plus sévères contre la métaphysique, on peut retenir celles de
Nietzsche.
Pour lui, s’attacher à la métaphysique, c’est se conduire comme un
« vaincu ».
Il estime que ce sont les « vaincus » et les « ratés » de la vie concrète qui
ont créé « cet arrière monde métaphysique pour calomnier le monde concret ».
Nietzsche trouve que la métaphysique est au secours des impuissants qui n’ont rien à
espérer de cette vie et qui, imaginairement, se créent un au-delà et Dieu pour pouvoir
supporter leurs peines.
Il dit à ce propos « Soyez fidèles à la terre, l’au-delà n’existe
pas ».
Et dans une autre formule de mise en garde, il dit : « Méfiez-vous de tous ces
prêtres qui vous font croire en un au-delà alors que nous n’avons pas épuisé le sens
de la terre.
Le sens de la vie mes frères, c’est le sens de la terre ».
Malgré toutes ces critiques, peut-on dire que l’homme peut se passer de la
métaphysique ? Non, diront certains philosophes qui pensent que l’homme a une
disposition naturelle qui le porte à s’interroger sur son origine et son existence.
C’est
en ce sens qu’il faut comprendre les propos de Schopenhauer selon lesquels
« l’homme est un animal métaphysique ».
En somme, même si la métaphysique n’est
pas une connaissance exacte, elle demeure quand même une préoccupation
inévitable, d’où la réhabilitation de la métaphysique.
3- Nécessité et actualité de la métaphysique
En dépit des critiques qu’elle a subies, la métaphysique semble de plus en plus
d’actualité face au désir et à la curiosité de l’homme de connaître ce qu’il y a au-delà
de la terre.
Pourtant, sur le plan technique ou matériel, la science satisfait l’homme en
lui procurant beaucoup de choses.
Mais sur le plan spirituel, la science est incapable
de combler le besoin de l’homme et d’apaiser son angoisse sur des questions
existentielles comme : d’où venons-nous, où allons-nous, qu’est-ce que l’homme ?
Même si la science a investi plusieurs domaines de la vie de l’homme en essayant de
le rendre heureux, elle n’a pas pu liquider la métaphysique qui demeure un besoin
vital.
C’est ce que montre Kant qui, bien qu’ayant récusé la métaphysique comme
science, soutient qu’il est difficile sinon vain de vouloir y renoncer.
Il dit : « La
métaphysique est pour l’homme un besoin vital et il serait illusoire de voir l’homme y
renoncer un jour tout comme l’homme ne renoncerait pas à respirer sous prétexte
que l’air serait pollué ».
C’est la même idée que l’on retrouve chez Schopenhauer
selon qui l’homme est un animal métaphysique, c'est-à-dire un être qui ne peut pas se
passer de questions qui le dépassent parce qu’il est curieux par nature.
En vertu de
cette curiosité, l’homme se pose des questions du genre : d’où vient l’homme, où
va-t-il, quel est le sens de la vie, le sens de la mort, existe-t-il une autre vie après
la mort ? etc.
Pour montrer que la métaphysique n’est pas encore liquidée, Georges
Gusdorf déclare : « Loin d’affirmer la décadence de la métaphysique, il faudrait bien
plutôt souligner qu’elle est, en un certain sens, universalisée, qu’elle a acquis une
sorte de suprématie ».
Ceci pour dire que la métaphysique est inébranlable, elle est
plus présente aujourd’hui qu’hier.
II- L’anthropologie
La question anthropologique est à la fois scientifique et philosophique.
L’anthropologie se présente comme une étude ou une science de l’homme ou encore
une interrogation sur l’homme, cet être particulier qu’on tente de saisir et de
connaître de sorte que la question qui se pose est de savoir si on peut connaître
l’homme.
Kant fait de la question anthropologique une préoccupation majeure.
Il dit
que les trois questions de la philosophie sont : Que puis-je savoir ? Que dois-je
faire ? Que m’est-il permis d’espérer ? Ces trois questions se ramènent à la
question : « Qu’est-ce que l’homme ? », d’où une philosophie anthropologique chez
Kant.
L’anthropologie a pour projet une étude rationnelle de l’homme.
Mais est-il
possible d’avoir une connaissance rationnelle de l’homme ? Dans tous les cas,
l’homme est une réalité dont on peut envisager l’étude sous plusieurs angles.
Mais
deux approches s’imposent : l’approche métaphysique et l’approche scientifique.
1- Approche métaphysique
Dans le vocabulaire technique et critique de la philosophie, André Lalande
écrit « L’anthropologie est la science de l’homme en général ».
Cette définition est
celle que les philosophes métaphysiciens donnent de l’anthropologie.
Ils cherchent le
général et non le particulier.
Ils cherchent ce qui permet d’unifier les différences, ce
qui nous fait penser à Aristote pour qui il n’y a pas de science du particulier, il n’y a
de science que du général.
Dire que « l’anthropologie est la science de l’homme en
général », c’est supposer qu’il existe chez tous les hommes un élément qui permet
d’en faire un seul Homme malgré leurs différences : cet élément serait la raison.
Selon Aristote, l’homme est un animal raisonnable.
On retrouve la même définition
chez Descartes qui considère que l’homme est une « res congitans » (une substance
pensante) ou encore « une substance dont toute la nature n’est que de penser ».
En
étudiant l’homme, la métaphysique met de côté tout ce qui est concret.
Elle ne tient
pas compte de ses aspects physiques ni même de ses rapports avec le milieu social.
Elle étudie l’homme abstrait et non l’homme concret..
»
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