Corneille a écrit de la tragédie : « Sa dignité demande quelque grand intérêt d'Etat ou quelque passion plus noble et plus mâle que l'amour, telles que sont l'ambition ou la vengeance, et veut donner à craindre des malheurs plus grands que la perte d'une
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Les deux parties de cette dissertation sont indiquées par le texte même : expliquer — discuter. L'explication est donnée par les sujets précédents, par la doctrine de la tragédie grande. Le texte de Corneille vous dirige cependant ici vers les exemples qui devront nourrir votre développement; montrez comment dans les tragédies de Corneille, lorsque l'amour est en conflit avec quelque « grand intérêt », c'est toujours lui qui est sacrifié (dans le Cid, dans Horace, avec Curiace), ou bien comment l'amour n'est qu'un « agrément » rejeté au second plan (Horace, Cinna, Nicomède, Mort de Pompée, etc.). Mais, quand on y regarde de près, le texte de Corneille pose un problème dont nous n'avons pas parlé explicitement. Comme exemple de « grand intérêt », il cite l'ambition et la vengeance. Or ni l'honneur du Cid, ni le patriotisme d'Horace, ni la religion de Polyeucte, ni le patriotisme de Nicomède ne peuvent être appelés ambition ou vengeance.
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Corneille a écrit de la tragédie : « Sa dignité demande quelque grand intérêt d'Etat ou quelque passion plus
noble et plus mâle que l'amour, telles que sont l'ambition ou la vengeance, et veut donner à craindre des
malheurs plus grands que la perte d'une maîtresse.
» Expliquer et discuter cette opinion.
Les deux parties de cette dissertation sont indiquées par le texte même : expliquer — discuter.
L'explication est
donnée par les sujets précédents, par la doctrine de la tragédie grande.
Le texte de Corneille vous dirige cependant
ici vers les exemples qui devront nourrir votre développement; montrez comment dans les tragédies de Corneille,
lorsque l'amour est en conflit avec quelque « grand intérêt », c'est toujours lui qui est sacrifié (dans le Cid, dans
Horace, avec Curiace), ou bien comment l'amour n'est qu'un « agrément » rejeté au second plan (Horace, Cinna,
Nicomède, Mort de Pompée, etc.).
Mais, quand on y regarde de près, le texte de Corneille pose un problème dont
nous n'avons pas parlé explicitement.
Comme exemple de « grand intérêt », il cite l'ambition et la vengeance.
Or ni
l'honneur du Cid, ni le patriotisme d'Horace, ni la religion de Polyeucte, ni le patriotisme de Nicomède ne peuvent
être appelés ambition ou vengeance.
C'est que Corneille raisonne ainsi dans ses Examens et ses Discours qui sont de
1660 ; et à cette date il s'était tourné et se tournera surtout vers ces sujets d'ambition ou de vengeance (Mort de
Pompée, Rodogune, Sophonisbe, Agésilas, Attila, etc.).
Et c'est le choix même de ces sujets, d'un intérêt humain
beaucoup moindre, qui expliquera en partie la médiocrité croissante de ses pièces.
Discussion.
Deux aspects dans cette discussion : 1° Peut-on écrire des tragédies sur de « grands intérêts »? Nous
sommes ramenés aux sujets précédents : oui, à condition d'envisager les chefs-d'œuvre de Corneille et non pas les
pièces où il est tombé dans la convention; 2° Mais est-il vrai que les drames d'amour, ceux où il s'agit avant tout de
« la perte d'une maîtresse », sont indignes de la tragédie? Evidemment non; et les tragédies de Racine sont là pour
le prouver (en 1660, Corneille ne pouvait songer — et il y songe — qu'au médiocre Quinault).
Cette erreur évidente
de Corneille appelle une explication.
Elle est donnée d'abord par ce que nous avons dit dans les sujets précédents
sur le goût des contemporains de Corneille pour les grands intérêts, — puis par le fait que les tragédies et tragicomédies de Quinault et Thomas Corneille où l'amour domine ne peignent qu'un amour précieux tout à fait
conventionnel.
Ajoutons enfin que la génération de la Fronde est tout occupée d'ambition et de vengeance et que
l'amour n'est guère qu'un moyen pour l'ambition et la vengeance..
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