Conscience psychologique et conscience morale ?
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RAPPEL DE COURS: LA CONSCIENCE MORALE
La conscience n'est pas seulement l'état intellectuel grâce auquel je
suis présent à moi-même.
Elle désigne aussi un état moral (ce qui se
remarque au fait que le nom « conscience » a donné deux adjectifs :
« conscient » et «consciencieux»).
C'est ainsi que Rousseau dit de la
conscience qu'elle est un « instinct divin », c'est-à-dire un moyen
immédiat et infaillible de reconnaître le bien du mal.
La conscience
est ici une « voix intérieure » qui est « un principe inné de justice et
de vertu » : les principes qui réglementent la moralité, écrit
Rousseau, « je les trouve au fond de mon cœur, écrits en caractères
ineffaçables ».
Il y a d'ailleurs un lien entre ces deux significations de
la notion de conscience : c'est parce que nous sommes
intellectuellement conscients de ce que nous faisons que nous
pouvons en être tenus pour moralement responsables.
La conscience
implique la responsabilité, c'est-à-dire la capacité de pouvoir
répondre de nos actes et de nos pensées.
Notre langage quotidien met constamment en cause la notion de conscience.
Telle personne est jugée consciente
ou inconsciente : mais pour cela, il a fallu que le juge lui-même prenne conscience ou fasse acte de conscience.
On
invoque tantôt une bonne, tantôt une mauvaise conscience pour expliquer quelque attitude surprenante ou
inadéquate.
Les conseillers ne manquent pas de suggérer qu'on doit prêter l'oreille à la voix de la conscience...
Bref,
nombre de locutions nous poussent à nous interroger sur ce que la présence du mot conscience confère aux
expressions dans lesquelles il se trouve.
Or, la première constatation en la matière, c'est que le mot conscience n'a
pas strictement la même signification dans tous les cas.
Si la conscience comme vision est simplement lucide, la
conscience comme voix intérieure est, elle, extralucide; si la première éclaire sur la convenance de nos actes, la
seconde, semble-t-il, ordonne parce qu'elle détermine la valeur.
Aussi les termes conscience psychologique et
conscience morale accusent-ils cette dualité de sens, au point qu'on en arrive à se demander si le mot conscience
ne relèverait pas dans les deux cas d'une réalité mentale de nature différente.
La question est donc de savoir si
conscience psychologique et conscience morale peuvent, ou non, être rapportées à des activités distinctes, voire à
des structures originales relativement indépendantes les unes des autres.
A) Conscience c'est connaissance, ou plutôt attention éveillée dans la connaissance.
Par la conscience il y a
nécessairement connaissance à travers une présence : celle du moi dans son rapport avec l'objet.
Aussi l'intuition,
en tant qu'elle comprend action et résultat, apparaît-elle comme la première forme de la conscience ou saisie
directe de l'objet, en une spontanéité où s'unissent sujet et objet dans une même présence à soi : l'objet est
présent à moi-même dans le même temps que je me sens présent à moi-même.
Aussi les voies sensibles et
psychologiques de l'intuition sont-elles les formes habituelles de la conscience en tant que celle-ci anime le
sentiment de l'être, et, plus précisément, de l'être au monde.
Cependant il ne s'agit pas seulement d'une
constatation : l'intuition amorce un mouvement selon lequel la conscience n'est pas seulement perception, mais
encore réflexion.
Elle est ce qui porte le jugement de réalité et le jugement de valeur : la distinction entre
conscience psychologique et conscience morale ne fait que traduire cette double attitude selon laquelle on se
prononce sur l'existence et sur le sens des objets de pensée.
Dès lors, en isolant la fonction, la conscience psychologique devient l'aptitude à porter des jugements de réalité ou
de perception, la conscience morale l'aptitude à porter des jugements de valeur.
Ces aptitudes, cependant, ne
s'exercent pas de façon continue et ne se manifestent pas régulièrement avec la même intensité : nous ne vivons
pas toujours au même niveau de conscience; les actes de notre vie ne se déroulent pas sous l'éclairage d'une même
attention.
Autrement dit, notre activité mentale peut être dirigée par une
volonté plus ou moins lucide, par des automatismes plus ou moins aveugles.
C'est dans le rapport entre la répétition
et l'invention que la conscience se définit, éveillée par l'obstacle, endormie par la facilité.
Mais, de toute façon, elle
apparaît avec la nécessité du choix.
Être conscient, c'est donc se prendre en charge dans une certaine situation et,
par conséquent, concevoir l'obligation où l'on se trouve d'affirmer la solution, de résoudre le problème.
Or, cette
responsabilité, ce sens de l'obligation donnent, à ce niveau, une signification morale à la conscience.
B) Certes, nombre d'auteurs — surtout à la suite de Rousseau — ont présenté la conscience morale comme
indépendante, dans son principe, de toute autre fonction mentale.
Il s'agirait d'un " instinct divin ", que le genevois
oppose même à la raison.
Selon une telle conception, la conscience morale est spontanéité; elle s'affaiblit par la
pensée discursive, voire par la réflexion, laquelle représente presque toujours une dialectique de mauvaise foi pour
combattre ou refouler les impératifs de la céleste voix »..
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