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Connaître l'homme, est-ce observer ses comportements ?

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« Le thème de cet énoncé concerne la possibilité et les moyens de la connaissance d e l'homme.

La connaissance d e l'homme est certainement la finalité, avouée ou implicite, de toute entreprise philosophique en tant qu'elle est un exercice intellectuel procédant de l'homme.

Dès ses débuts, l'homme se pose comme projet de l'interrogation philosophique : n'est-ce pas Diogène (le Cynique) qui déjà s'efforçait de le débusquer au grand jour, une lanterne à la main, sur la place publique ? Dans le cadre d e cet énoncé sont mis en question les moyens (l'observation) et l'objet (les comportements) de la connaissance possible de l'homme. La tension qui s'instaure ainsi, et constitue le problème général d e l'énoncé, articule l'Homme à ses comportements.

Il y a en effet tension dès lors que l'on considère que la connaissance d e l'homme doit avoir pour fin d'en saisir l'essence (l'humanité d e ou en l'homme), tandis que les comportements semblent quant eux se réduire au statut de caractères contingents de ladite essence.

Comment alors comprendre le rapport entretenu par l'essence (l'Homme) à ses attributs (les comportements) ? S'agit-il d'une relation englobante, auquel cas l'homme serait réductible à la s o m m e d e ses comportements, ou la totalité des comportements d e l'homme reste-t-elle impuissante à décrire, c'est-à-dire saisir la nature humaine, son essence ? Les enjeux structurant le déploiement de ce problème sont au nombre de deux : premièrement doit être éclairci le statut de l'objet de l'observation (les comportements), afin, dans un second temps du développement, de comprendre les problèmes de méthode soulevés par l'entreprise d'observation appliquée à la connaissance de l'homme. I.

L'objet de l'observation La connaissance de l'homme par le biais d e ses comportements caractérise l'entreprise d e l'anthropologie.

Car qu'il s'agisse tant des discours que des croyances ou encore des actes de langage et des structures de parentés, l'accès à l'autre comme inconnu est toujours médiatisé par son comportement.

Ainsi, le comportement pourrait être défini comme actualisation en contexte de l'essence humaine.

Tout acte comportemental de l'homme est imprégné d'humanité, et trahit alors sont appartenance d'essence, autrement dit le fait d'être H o m m e .

Mais il faut souligner qu'une telle actualisation d e l'essence d e l'homme s e manifeste toujours en contexte.

Tout acte et comportement humains intègrent une sphère contextuelle dans laquelle seule il leur est donné d e signifier, d e faire sens.

En conséquence, toute observation de comportement reste tributaire du contexte dans lequel ce dernier s'insère, et partant, est relatif. Ce relativisme caractéristique de toute observation comportementale de l'homme nécessairement en contexte abolit l'idée de la possibilité d'une connaissance de l'Homme majusculé, et idéalisé.

Seuls sont ainsi à observer les hommes dans la relativité de leurs comportements. Aucune idée (au sens platonicien d'archétype) de l'homme n'a d'existence concrète, tandis que règne uniquement la pluralité (ainsi en est-il du nominalisme qui n'attribue aucun contenu d'existence à tout universel, tel l'Homme, pour affirmer que dans les faits, seule est la particularité).

Observer l'homme dans ses comportements, observer les comportements de l'homme ne peut que conduire au constat de son irréductible pluralité, et à l'abandon du projet d'une connaissance de l'homme. Mais si l'observé, en tant qu'objet de l'observation, est toujours relatif, qu'en est-il du statut d e l'observateur ? Dans le cadre méthodologique d e l'anthropologie mettant en œuvre le principe d'observation participante élaboré par Malinowski, l'observateur a également pour fonction la rationalisation du relatif, c'est-à-dire l'intégration du relatif observé (les comportements humains) à un système universalisé se rapportant à l a connaissance de l'Homme (ce trait est propre au structuralisme de Lévi-Strauss, en lequel les structures, d e parenté par exemple, obéissent à une norme universelle de rationalité, la prohibition d e l'inceste dans le cas d e la parenté).

En conséquence, connaître les comportements de l'homme dans leur plus grande diversité, ou encore, connaître les hommes, apparaît comme la condition de possibilité même de saisir l'universalité des hommes, l'essence de l'homme : bref, de connaître l'homme. II.

La méthode d'observation Ce deuxième mouvement du développement doit mettre en question la méthode de l'observation conçue comme possibilité de médiation assurant l'accès à l'universel par la rationalisation.

Avec l'avancement des théories épistémologiques au siècle dernier s'est très vite manifesté à l'œil du théoricien un abîme fondamental de l'observation (dans quelques disciplines que ce soit).

En effet, l'observateur, dans le processus d'observation, est toujours un principe perturbant l'objectivité (idéale) de l'observation (Duhem).

L'objet de l'observation est toujours déjà modifié par le processus m ê m e d e l'observation, et l'observation est ainsi toujours, partielle parce que partiale (la physique quantique permet de manière cruciale de prendre acte d'une impossibilité de principe définissant l'objectivité).

Donc, l'objet de l'observation (l'observé) est toujours relatif au processus de l'observation.

L'irréductible écart du relativisme est rendu conscient. S'ajoute alors à la contingence des objets de l'observation, dans le cas de la connaissance de l'homme (les comportements), la relativité même de leur interprétation en des termes rationnels et universels.

L'observateur n'est dès lors plus gage d'universalisation, mais reste tributaire de la partialité d e ses observations.

Il n'y a plus d'universel.

L'Homme n'est pas, l'homme n'est plus (de Maistre).

La connaissance d e l'homme comme d'une essence universelle est rendue impossible de manière constitutive par le processus d e l'observation : observer relativement (biais méthodologique de l'observation) le contingent (les comportements toujours contextuels) rend inaccessible l'universel.

L'idée de l'homme est une chimère (Nietzsche).

Et prétendre à sa connaissance, qui plus est par l'observation, est vain. Mais au problème de la circularité et du relativisme de la méthode d'observation peut être opposée l'entreprise philosophique kantienne. Car, si tout objet d'observation est par définition biaisé dans le procès m ê m e d e l'observation, il n'est reste pas moins q u e m e sont accessible, en tant qu'observateur, les conditions de possibilité de ma propre observation, c'est-à-dire du biais.

Ainsi, connaître l'homme comme autre (irréductible) par l'observation d e s e s comportements assure plus la connaissance de soi-même, que celle de l'autre (puisqu'elle reste inaccessible).

Observer l'autre et ses comportements ne permet pas de le connaître, mais de me connaître, et de me connaître comme homme.

Cet acte de réflexivité caractéristique du criticisme kantien conduit au transcendantal : connaître les conditions de possibilité de la connaissance procède de la compréhension des raisons de l'impossibilité de la connaissance par l'observation.

Or le transcendantal est l'universel.

Me connaissant comme limité (limite de la connaissance par observation), je me saisis comme homme, essence de l'homme – raison pour laquelle les trois questions de Kant se résument à l'anthropologie. Conclusion - Observer les comportements de l'homme entame une réflexion sur les conditions de possibilité et les limites de l'observation. Ainsi, en tant qu'observateur c'est-à-dire humain, l'observation (réflexive) permet de saisir la nature de l'homme.

Il me faut savoir les raisons de l'impossibilité de la connaissance objective de l'Homme par l'observation de ses comportements pour me connaître comme Homme, autrement dit me saisir comme essence dans son universalité.. »

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