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Commentez cette affirmation de Guillaume Apollinaire dans « L'Esprit Nouveau et les Poètes » en vous référant aux textes de la poésie contemporaine que vous connaissez : « C'est par la surprise, par la place importante qu'il fait à la surprise, que l'esp

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La lecture de la poésie contemporaine est souvent déconcertante. Habitué à un langage poétique dont les conventions semblaient solidement établies jusqu'à la fin du XIXe siècle, l'esprit du lecteur se trouve soudain plongé dans un univers d'images et de formes surprenantes. C'est précisément à partir de cette impression que Guillaume Apollinaire a tenté de définir ce qu'il appelait « L'esprit nouveau ». « C'est par la surprise, écrivait-il, par la place importante qu'il fait à la surprise, que l'esprit nouveau se distingue de tous les mouvements artistiques qui l'ont précédé ». N'y a-t-il dans cette distinction qu'un parti pris d'originalité ? Nous allons voir comment ce recours à la surprise s'est imposé aux poètes modernes qui ont su découvrir ainsi un nouveau mode d'approche de la réalité.

« INTRODUCTION La lecture de la poésie contemporaine est souvent déconcertante.

Habitué à un langage poétique dont les conventions semblaient solidement établies jusqu'à la fin du XIXe siècle, l'esprit du lecteur se trouve soudain plongé dans un univers d'images et de formes surprenantes.

C'est précisément à partir de cette impression que Guillaume Apollinaire a tenté de définir ce qu'il appelait « L'esprit nouveau ».

« C'est par la surprise, écrivait-il, par la place importante qu'il fait à la surprise, que l'esprit nouveau se distingue de tous les mouvements artistiques qui l'ont précédé ».

N'y a-t-il dans cette distinction qu'un parti pris d'originalité ? Nous allons voir comment ce recours à la surprise s'est imposé aux poètes modernes qui ont su découvrir ainsi un nouveau mode d'approche de la réalité. I.

LE RECOURS A LA SURPRISE RÉSULTE SOUVENT D'UN PARTI PRIS D'ORIGINALITÉ Les jeunes poètes de la génération de 1900, émules pour la plupart de grands maîtres du symbolisme, ont presque tous voulu poursuivre les tentatives de ces derniers pour libérer leur art des contraintes de la métrique traditionnelle.

Les strophes de Verhaeren dans Les campagnes hallucinées sont de longueur inégale et leurs vers « libérés » ont des mesures variables.

Les rimes ne sont plus disposées selon un ordre rigoureux et elles peuvent s'effacer totalement pour un groupe de phrases.

L'expression lyrique prend souvent la forme apparente de la prose dans les Ballades françaises de Paul Fort.

Guillaume Apollinaire a poussé beaucoup plus loin encore cette recherche d'originalité dans la forme : il supprime délibérément toute ponctuation dans ses oeuvres à partir d' Alcools ; il fait appel aux artifices de la typographie, alliant curieusement poésie et dessin, dans ses Calligrammes. Le désir de créer des impressions neuves entraîne souvent le poète à associer dans le même tableau des évocations discordantes, sans ménager entre elles la moindre transition.

Le texte d'Apollinaire intitulé Il y a...

nous montre presque simultanément le front des hostilités en 1914, l'océan Atlantique, des femmes de Mexico et les cactus d'Algérie.

Plus près de nous, Jacques Prévert a exploité systématiquement la surprise dans ses vers, soit en imaginant des visions fantasques comme celle de l'oiseau qui vient s'enfermer dans le tableau du peintre, soit en jouant avec les mots de façon gratuite. Les procédés du langage poétique deviennent aussi souvent en eux-mêmes source de surprise.

La langue des poètes accueille maintenant avec générosité tous les vocabulaires, de l'argot aux langues étrangères, et tous les signes imaginables, depuis l'onomatopée comme ce « broun roun roun » de Blaise Cendrars dans la Prose du Transsibérien, jusqu'aux chiffres romains et aux lettres capitales d'abréviations dont Apollinaire a beaucoup usé. L'originalité atteint également les thèmes de la poésie contemporaine et l'on imagine aisément l'étonnement de lecteurs accoutumés aux sujets nobles du lyrisme traditionnel devant une « quelconquerie » de Guillaume Apollinaire.

Une telle exploration délibérée de tous les visages du monde par le langage poétique trouve son point de départ chez Baudelaire qui insistait notamment sur la nécessité pour l'art d'exprimer la « modernité » du monde et si ces thèmes nouveaux nous surprennent, c'est souvent parce que la réalité elle-même est devenue étonnante. II.

LA SURPRISE EST UN REFLET DU MONDE CONTEMPORAIN La réalité nouvelle Les grandes découvertes qui ont marqué est surprenante l'aube de notre siècle constituent d'abord des objets de surprise, pour les poètes et Valéry Larbaud et Blaise Cendrars ont pour leurs lecteurs. Apollinaire a clamé la magie du mot avion dont: « les cinq lettres habiles Eurent cette vertu d'ouvrir les ciels mobiles ».

(L'Avion) Il évoquait dans Zone les formes les plus neuves d'expression, « les prospectus, les catalogues, les affiches qui chantent tout haut » et le rythme nouveau de la vie contemporaine.

Verhaeren avait chanté déjà l'âpre puissance qui se dégage des Villes tentaculaires. Le regard que nous portons sur le monde ne peut plus être le même que celui des hommes du passé.

Blaise Cendrars nous montre par exemple les transformations qui s'opèrent dans un paysage vu à travers la vitre d'un wagon de chemin de fer lancé à pleine vitesse : « Le monde s'étire, s'allonge et se retire Comme un harmonica qu'une main sadique tourmente.

» Cette optique nouvelle invite ainsi les poètes à cultiver les images les plus insolites de la réalité pour composer le nouveau visage de la Beauté. Les structures anciennes de l'art poétique ne suffisent plus.

S'adaptant tout naturellement au fond nouveau qu'ils expriment, la facture des poèmes devient elle aussi insolite.

Le rythmes modernes exigent des mètres neufs ; des sensations nouvelles imposent une syntaxe poétique originale, faisant fi parfois des règles établies pour un autre temps. III.

LA SURPRISE CONSTITUE UNE NOUVELLE TECHNIQUE D'APPRÉHENSION DE LA RÉALITÉ L'exploitation systématique de la surprise n'a pas seulement abouti à cette peinture fidèle du monde moderne.

La recherche de l'insolite est devenue avec les poètes surréalistes un nouveau mode de connaissance ouvrant aux esprits des horizons jusqu'alors insoupçonnés. De nouvelles méthodes Guidés par les découvertes de la de création psychologie de l'inconscient, des écrivains comme Tristan Tzara et André Breton se sont efforcés d'atteindre les régions les plus obscures de la pensée par la pratique de certaines méthodes de création surprenantes, telles que celles de « l'automatisme psychique » et de l'exploration systématique du rêve et de la folie.

Tout pour eux doit être surprise et les poèmes surréalistes ne font plus aucune place à la logique ni à l'harmonie, comme le proclamait en 1918 le manifeste du mouvement « Dada » : « Liberté, Dada, Dada, Dada, hurlements de couleurs crispées, entrelacements des contraires et de toutes les contradictions, des grotesques, des inconséquences : la vie ! » Quels que soient les écueils auxquels ce mouvement poétique s'est heurté, notamment dans ses espoirs de fonder une éthique nouvelle, il a profondément marqué tous les aspects de l'art actuel, qu'il s'agisse du cinéma, du théâtre ou du roman.

Il nous a appris à pénétrer plus avant au cœur des êtres et des objets, au moyen de la surprise, à savoir guetter toujours l'angle sous lequel tout se « révèle » soudain à nos yeux étonnés. CONCLUSION En marquant la place importante faite par « l'esprit nouveau » à la surprise, Apollinaire soulignait l'un des aspects essentiels de la poésie contemporaine.

Par-delà les tendances et les écoles diverses, elle crée un véritable culte de l'étrange qui nous conduit à mieux pénétrer les complexités de l'âme moderne.. »

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