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COMMENT ET POURQUOI PENSONS-NOUS L'ABSOLU ?

Extrait du document

« I.

Position de la question.

— Réalité de l'idée de l'absolu.

Or l'expérience ne donne pas toute faite cette idée. D'autre part, l'idée de l'absolu suppose avant elle l'expérience.

La question est donc de savoir comment et par quel travail propre de notre esprit cette idée peut être dégagée de l'expérience.

Il y a ici deux questions à résoudre : 1° Comment, c'est-à-dire par quel procédé concevons-nous l'absolu ? 2° Pourquoi, c'est-à-dire pour quelle raison sommes-nous portés à concevoir l'absolu ? II.

Comment concevons-nous l'absolu ? — Montrer que nous arrivons à cette idée par l'activité de l'esprit élaborant les données de l'expérience.

« La notion de l'absolu, dit Maine de Biran, prouve seulement que nous avons la faculté d'ôter toutes les limites à nos conceptions.

» Ainsi l'idée de l'absolu et du nécessaire s'obtient en niant de l'être, que nous révèle l'expérience, ce qui le rend relatif et dépendant.

Il en est de même des idées d'infini et de parfait. Objection de Descartes, de Bossuet : Vouloir obtenir les idées de parfait, d'infini, d'absolu, par l'élaboration des idées d'imparfait, de fini, de relatif, c'est faire un cercle vicieux, car ces dernières notions ne peuvent être conçues que par opposition aux Premières qu'elles présupposant. Dans la « Troisième Méditation Métaphysique », Descartes donne une deuxième preuve de l'existence de Dieu qui, apparemment, renforce l'argument ontologique et devrait donc permettre à celui-ci d'échapper à la critique de Kant.

Cette preuve est la suivante : l'homme est imparfait, il est mortel, borné, tout ce qui est humain est fini.

Imparfait en lui-même, l'homme ne voit autour de lui que des choses imparfaites et finies.

D'où vient donc en l'homme l'idée de la perfection ? Cette idée du Parfait ne peut provenir que d'une cause qui soit à sa mesure, et cette cause ne peut être que l'Etre parfait lui-même ou Dieu.

Autrement dit, l'idée d'un Etre parfait lui-même, ou Dieu est en l'homme une idée innée dont Dieu seul peut être l'origine.

Ainsi de l'idée d'un myriagone, j'ai de droit de conclure à certaines propriétés, mais pas au fait qu'un myriagone réel existe dans le monde.

En revanche, de l'idée de Dieu, j'ai le droit de conclure à son existence, parce que c'est cette existence elle-même qui rend compte de l'idée de Dieu en moi. En fait, cette preuve fait écho à une tradition venue de Saint Augustin : « Dieu est ce qu'il y a de plus intérieur en moi-même ».

Elle part de l'expérience intime qu'à l'homme d'une exigence de perfection.

Toutefois cette preuve échoue aussi, car elle conclut indûment d'une exigence de la Raison ou du cœur à un être transcendant qui explique cette exigence.

De plus cette preuve rejoint sans raison le Dieu traditionnel de la religion judéo-chrétienne.

En fait, c'est parce que l'homme ne peut pas accéder par intuition à l'Absolu que le monothéisme judéo-chrétien estime la raison capable de prouver l'existence de Dieu.

Il n'en reste pas moins vrai que seule la grâce ou la Révélation peuvent amener le croyant à accepter sans les comprendre les mystères concernant la nature dernière de Dieu (Eucharistie, Sainte Trinité). Telle est l'opinion de Bossuet : « Le parfait, dit-il, est le premier en soi et dans nos idées; l'imparfait n'en est que la dégradation.

» Telle est aussi l'opinion de Descartes : « L'idée d'imparfait suppose elle-même l'idée de parfait, dont elle est la négation.

» REPONSE : a) S'il en était ainsi il faudrait admettre l'innéité de ces notions, hypothèse inutile et insoutenable. b) Il n'y a d'ailleurs pas de cercle vicieux à s'élever par degrés de l'imparfait, du fini, du contingent, au parfait, à l'infini, au nécessaire.

Pour savoir que je suis un être imparfait il n'est pas nécessaire de m'opposer à la perfection absolue'; il suffit que je me compare à l'un de mes semblables mieux doué que moi, ou que je constate qu'il me manque quelque qualité, et ainsi des autres notions. III.

Pourquoi, pour quel motif concevons-nous l'absolu ? C'est là une exigence essentielle de notre raison.

Elle ne peut être pleinement satisfaite qu'autant qu'elle trouve la raison suffisante des choses relatives et contingentes.

Or, seul l'absolu est pour nous cette raison suffisante.

« D'où il suit, remarque très bien Rabier, que, si l'on croit à la raison, c'est-à-dire si l'on tient la raison pour un organe de connaissance, l'idée de l'absolu, oeuvre de la raison, se trouve participer de la valeur objective que l'on attribue à la raison même ; croire à la raison et croire à l'absolu, peut-être est-ce tout un pour qui n'a pas peur de la logique.

». »

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