Comment définir le vivant ?
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«
Analyse du sujet : Le vivant semble être quelque chose d'évident et sa distinction d'avec l'inerte l'est encore plus (il faut d'emblée se placer à un niveau de
grande généralité et non pas se cantonner à l'homme).
Seulement, il s'agit de définir précisément ce « quelque chose ».
Quelles sont ses particularités ?
Car après tout un vivant comporte la vie, mais comment cerner ce principe de vie ? Aristote faisait la distinction entre une chose et un vivant en montrant
que le second porte en lui son propre mouvement, principe qu'il désignait par l'âme : une espèce de principe vital, comme un don de la nature.
Mais depuis
bientôt deux cents ans, la science mécaniste tend à réduire considérablement la distance entre vivant et inerte.
Même s'il existe des spécificités du vivant
qu'il faut développer, elles peuvent se ramener à des caractéristiques matérielles.
A lors quel statut reconnaître au vivant et en quoi il peut ne pas se
ramener simplement à de l'inerte ?
Proposition de plan :
1) On peut répertorier six caractéristiques qui pourront, on le verra, se ramener à trois.
La première est que le vivant est comme une totalité distincte du
monde extérieur.
Il a une autonomie.
Le corps vivant maintient son corps à une température constante.
C'est ce qui s'appelle l'homéostasie.
C e principe se
retrouve à tous les degrés du vivant car la cellule élémentaire elle-même forme un tout ; puis au-dessus le tissu en fait de même et ainsi de suite.
Ainsi, le
vivant est constitué de petits mondes autonomes, de totalités emboîtées.
Il n'est donc pas possible de décrire le vivant comme un paquet de matière
chimique désordonné mais comme un ordre structuré qui donne lieu à une individuation.
C 'est là le premier caractère propre du vivant.
Le second est que le vivant est en relation avec son milieu ; il a besoin de ce qu'il trouve pour se nourrir et respirer.
Le besoin et la faculté d'assimilation
semble être également le propre du vivant : un caillou n'a pas de besoin...
De la bactérie à l'homme en passant par la plante, le vivant assimile et rejette des
substances.
Il y a donc un échange entre le vivant et son milieu.
D'où un troisième critère, le vivant respire.
Il transforme par des réactions de combustion l'énergie des aliments en énergie utiles pour ses cellules.
D'ailleurs, la mort se signale habituellement par l'arrêt de la respiration.
Autre principe fondamental, le vivant est en lutte contre l'entropie qui elle est la seconde loi de la thermodynamique du monde physique.
Le vivant a une
naissance, un développement et une mort.
Ces processus n'ont lieu que chez le vivant auxquels s'ajoute celui de la reproduction.
Seul le vivant est capable
de reproduction en tant que continuité biologique de l'individu et de l'espèce.
L'inerte ne connaît que l'entropie et ignore la reproduction.
Les organismes vivants peuvent également évoluer ; même si la théorie générale de l'évolution des espèces pose problème, on ne peut nier qu'à l'intérieur
de l'espèce même, les individus évoluent au travers de mécanismes tels que l'adaptation ou la mutation.
Dernière fonction propre, le vivant est capable de produire son propre mouvement.
L'inerte est simplement déplacé.
Une bactérie possède déjà des cils
vibratiles qui lui permettent de se déplacer.
Et tous ces caractères peuvent se résumer en trois : l'auto-conservation : le vivant peut se maintenir en vie en se nourrissant, en respirant ; l'autoreproduction et l'auto-régulation : le vivant se gère lui-même et maintient tout seul un équilibre interne (en s'adaptant par exemple).
Le vivant a donc pour
caractère essentiel l'auto-référence qui fait de la biologie une discipline distincte de la physique.
Transition : Pourtant ne pourrait-on pas expliquer ces propriétés de manière mécanique ? Les processus du vivant semblent pouvoir se réduire à de simples
échanges chimiques et à des structures moléculaires.
2) Telle est la position du réductionnisme biologique.
Invoquer un principe vital, une âme comme le faisait Aristote, pour rendre compte d'un phénomène
vivant serait contraire à l'esprit scientifique et avouer une ignorance des processus réels.
Ainsi Claude Bernard écrit dans Introduction à l'étude de la
médecine expérimentale : « La vie n'est qu'un mot dû à l'ignorance et quand nous qualifions un phénomène de « vital », cela équivaut à dire que c'est un
phénomène dont nous ignorons la cause prochaine ou la condition ».
La vie peut donc se réduire à des processus physico-chimiques.
Le réductionnisme
s'appuie sur le fait que la matière vivante ne contient pas d'autres éléments chimiques que ceux que contient la matière.
Le vivant est composé de briques
chimiques ressemblant à des éléments matériels.
Le vivant n'est qu'un arrangement particulier de la matière et n'est pas de nature différente.
On réussi
d'ailleurs à produire artificiellement des cellules vivantes et les greffes d'organes montrent que le vivant est une machine, complexe certes, mais une
machine.
Ainsi, l'auto-conservation s'explique sur le modèle de la mécanique.
Pour lutter contre le désordre qui règne dans le monde de l'inerte, le vivant absorbe
constamment de l'énergie nouvelle (les aliments) pour maintenir sa structure.
Et cette énergie provient d'un circuit cohérent, résultat d'un échange
chimique établi entre les plantes, le soleil et les animaux : le soleil émet de l'énergie qui est captée par les plantes (la photosynthèse), qui sont ellesmêmes consommées par les animaux supérieurs.
L'auto-reproduction aussi se réduit à des mécanismes chimiques.
La cellule n'est rien d'autre qu'une usine moléculaire car elle recopie les briques du
vivant.
La génétique a montré que ces briques sont des protéines de structure.
Et tout se passe comme si le plan du vivant était inscrit dans ces protéines
(ADN), comme une espèce de code de tout l'organisme.
Grâce à la cybernétique on peut également comprendre de manière mécanique l'auto-régulation.
Le pouvoir de s'auto réguler est en fait un phénomène
chimique au même titre que le chauffage se met en route tout seul dans la maison grâce au thermostat.
Les gènes de l'A DN transmettent (via l'A RN) les
instructions nécessaires à la fabrication d'enzymes afin de fabriquer les molécules essentielles à la survie de la cellule.
Tout se passe comme si il
s'agissait d'une usine de montage à la chaîne !
Transition : Cependant, si l'on peut expliquer les processus du vivant par analogie à des processus mécaniques, cela ne veut pas dire que le vivant est mécanique.
Si l'auto-référence peut s'expliquer par le biais de la mécanique, cela ne signifie pas que la vie est mécanique.
Ne faut-il pas se référer à une intelligence créatrice qui
utiliserait des mécanismes qu'elle transcenderait ?
3) En effet, ce n'est pas parce que nous nous servons de paradigmes mécanistes que le vivant peut lui-même être réduit à un mécanisme.
Ne confondons
pas la représentation explicative et le réel.
Le réductionnisme n'explique pas comment la cellule se comporte comme une usine à fabriques de molécules.
D'ailleurs, l'explication mécaniste semble montrer au contraire que le vivant poursuit une finalité en employant des moyens, des processus qui relève de la
physique.
Le vivant, pour bien le définir semble se différencier par une intentionnalité consciente de son action.
Et c'est ce qui heurte la science car elle ne
peut pas faire l'impasse d'une intelligence intentionnelle qui pourtant échappe à l'explication rationnelle et mécaniste.
Reprenons C laude Bernard qui
suppose une telle intentionnalité tout en la refusant : «Quand nous voyons, dans les phénomènes naturels, l'enchaînement qui existe de telle façon que les
choses semblent faites dans les buts de prévision, comme l'oeil, l'estomac, qui se forment en vue d'aliments, de lumières futures, etc.
Nous ne pouvons nous
empêcher de supposer que ces choses sont faites intentionnellement, dans un but déterminé.
Parce qu'en effet, quand nous faisons nous-mêmes les choses,
nous disons que nous les faisons avec intention et nous ne pourrions admettre que c'est le hasard qui a tout fait ».
Ainsi donc, une chose est de dégager les spécificités du vivant, une autre est de l'expliquer par la seule référence à l'inerte.
Le réductionnisme semble être
une idéologie qui se borne à rejeter des explications d'ordre métaphysique (parce qu'elles sont métaphysiques) mais cependant légitimes car rendant
compte d'une certaine intelligibilité..
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