Ce qu'on appelle la science se compose-t-il exclusivement de vérités démontrées et définitives ?
Extrait du document
«
La vérité rend-elle heureux ?
Analyse des notions et problématique :
L'adjectif « heureux » renvoie non à la sphère du plaisir, mais à celle du bonheur.
Là où le plaisir est une
inclinaison instable, marquée par le manque et notre finitude, le bonheur, à l'inverse, est conçu comme un
état de satisfaction durable et stable.
Il est dès lors compréhensible qu'on ai pu fortement lier la notion de bonheur à celle de vérité.
En effet, la
vérité définit une adéquation du discours avec ce qui est.
Mais la vérité se définit par sa permanence et
son universalité, et en cela ne doit pas être confondue avec l'inconstance des opinions humaines.
Ce qui
est vrai aujourd'hui le sera toujours.
Non pas que si j'affirme « aujourd'hui il fait beau », il fera toujours
beau, mais l'adéquation de ce que j'énonce avec une certaine situation, définie et datée, elle, sera
toujours vraie.
La vérité semble donc bien être apte à nous procurer une stabilité dans la durée.
Mais si la
vérité peut être source de bonheur, c'est également, dans la mesure où là où ce qui a trait aux passions
est par essence instable et éphémère, ce qui a trait à la rationalité, et, en premier lieu, à la recherche de
la vérité semble être caractérisé par une nécessité et une permanence spécifiques.
Cependant, dire que la vérité et l'activité rationnelle ont une forme de nécessité immuable ne suffit pas à
en faire les auxiliaires du bonheur.
Pour le monter, il faut ajouter que dans la possession de la vérité,
l'homme se réalise comme être rationnel.
(On insistera ici sur le verbe « rendre » indiqué par le sujet).
La
vérité représenterait donc la fin du devenir humain, l'humain étant un animal spécifiquement rationnel.
Si
le bonheur est conçu comme un état stable mais aussi comme une satisfaction, il semble donc que la
vérité puisse rendre l'homme heureux, non seulement par sa nécessité mais surtout dans la mesure où elle
accomplit ce qui définit l'homme entre tous les êtres vivants.
Cependant, cette position est discutable.
Tout d'abord, nous pouvons critiquer une conception qui pense
la vérité comme une possession de l'homme.
La vérité est une propriété du discours humain et, en cela,
elle est avant tout une recherche.
Cette conception de la vérité, qui met l'accent sur l'activité
intellective de l'homme, tend à mettre en question l'idée que la vérité me procurerait une stabilité et une
satisfaction durables.
Bien plus, dans la recherche de la vérité, l'homme se trouve perpétuellement
confronté à l'erreur, à la difficulté de dire, dans un langage déterminé et fini, les choses.
La recherche de
la vérité serait donc plutôt un lieu de mise en question, de critique.
Enfin, il est évident que l'homme qui cherche à dire ce qui est réellement se trouve également confronté à
la dure réalité du monde.
Si la vérité a donc un aspect nécessaire, durable, ce que trouve l'homme en
s'efforçant de l'atteindre est avant tout la lucidité sur sa propre finitude.
Comment concilier dès lors la vision, soutenable, d'un accomplissement de l'homme dans la vie intellective
et cette conception qui veut que la vérité, ou du moins sa recherche, soit une source de lucidité critique,
voire malheureuse ?
Faut-il penser que pour l'homme, accomplir son essence propre est source non de bonheur mais de
malheur ?
Pour sortir de ce paradoxe, il nous faut revenir à une conception de la vérité comme recherche.
Si la
vérité ne rend pas l'homme heureux au sens où elle placerait l'homme dans un état de satisfaction stable,
la recherche de la vérité le pousse non seulement à s'accommoder au monde mais également à être lucide
envers lui-même et à mieux se comprendre.
La vérité est en cela salutaire.
Elle nous permet de nous adapter à un monde que nous concevrions sans
elle comme étranger et hostile et nous permet, par une conscience parfois douloureuse de notre finitude,
de trouver un apaisement.
Si la vérité ne nous rend pas heureux, peut-être sa recherche nous rend-elle
sage, c'est-à-dire conscients de notre juste mesure.
Plan
1)
La vérité, par son caractère nécessaire et en ce qu'elle marque l'accomplissement de la nature
rationnelle de m'homme, semble être la voie d'accès au bonheur..
»
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