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Ce qui dépasse la raison est-il nécessairement irrationnel?

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« Analyse du sujet : Une raison désigne premièrement un motif ou une justification : donner la rais on de quelque chos e (une action, l'exis tence de quelque c hose, etc.), c'est répondre à la question « pourquoi ? ».

La raison n'est donc pas nécessairement une cause efficiente (au sens d'A ristote), c'est-à-dire une cause qui précède son effet, mais peut-être par exemple un but, un objectif, une motivation, etc. La raison, deuxièmement, désigne à la fois une faculté et une qualité de l'homme. En tant que faculté, elle est inhérente à l'homme : il est « doué de raison », c'est un « être raisonnable ».

Elle est la faculté mise en jeu lorsque l'homme pense, parle, connaît, calcule, etc.

Elle s'oppose alors à la sensibilité, qui est faculté de nos sens à être affectés.

Elle s'oppose également à la croyance et à la foi qui ne sont pas des facultés mais qui, comme la raison, permettent de donner du sens sans toutefois le fonder sur un savoir rationnel. En tant que qualité, elle s'oppose de ce qui est déraisonnable, irréfléchi, ce qui manque de bon sens. Est dit rationnel ce qui procède d'un calcul (ratio en latin).

L'irrationnel est alors l'illogique. Raison et rationalité situent d'emblée notre investigation dans le champ de la théorie de la connaissance, et dans celui de la croyance. Problématisation : La question présuppose que quelque chose dépasse la raison : il nous faut nous demander si c 'est le cas puis identifier ce qui dépasse la rais on avant de pouvoir statuer sur son irrationnalité. I - Q u'est ce qui dépasse la raison ? Le deuxième problème tient au fait que nos connaissances sans cesse progressent : n'est ce pas là l'indice que, même s i aujourd'hui d e s c h o s e s n o u s échappent, tout pourra pourtant à terme être rationalisé ? II – Tout ne peut-il pas être rationalisé ? Proposition de plan : I - Qu'est ce qui dépasse la raison ? Kant affirmera dans La critique de la rais on pure qu'aucune connaissance ne peut être construite au-delà de l'expérience, c'est-à-dire, au-delà de ce que la sens ibilité reçoit.

La « raison » distincte c hez Kant de l'entendement qui est faculté de produire des concepts, ne prime plus s ur les autres facultés humaines.

A u contraire, la connaissance ne s'atteint que par une mise en forme par l'entendement du divers fournit par la sensibilité.

A u s s i e s t-il possible de penser au-delà de l'expérience par l'entremise de la raison, mais impossible de connaître : autrement dit, on peut penser mais jamais connaître rationnellement les idées de la raison que sont l'âme, Dieu et le monde. Dans notre perspective, cela ne signifie pas que quelque chose dépasserait la raison : nous pouvons toujours penser Dieu par exemple.

C e qui en revanche est certain, c'est que jamais nous n'aurons de connaissance rationnelle d e D ieu.

La raison est limitée non par c e s objets, mais par le fait qu'une connaissance rationnelle suppose qu'un matériau de l'expérience soit donné. C ela signifie encore que nous n'avons pas besoin de rechercher c e qui excède la rais on pour nous heurter à la limite du rationnel : nous le rencontrons au sein même de la raison, lorsque c elle-ci tourne pour ainsi dire à vide, c 'est-à-dire, sans matière de l'expérience. II – Tout ne peut-il pas être rationalisé ? La perspective kantienne nous permet de renvoyer toutes les idées métaphysiques de la raison dans le domaine de l'irrationnel, ce qui constitue une première délimitation.

Si maintenant nous demeurons au sein même de ce dont on peut faire l'expérience, nous rencontrons une autre limite : tout n'est pas pour l'instant rationnel, loin de là.

En témoigne le progrès continuel des scienc es.

La question est alors de s avoir si une rationalisation totale est envisageable ou non. L e s s c i e n c e s contemporaines peuvent nous mettre sur la voie : en physique quantique, le princ ipe d'incertitude d'Heisenberg énonce qu'il es t impossible de connaître avec autant de précision que voulue à la foie la position et la vitesse d'un corpuscule, par exemple d'un électron.

C onnaître précisément la vitesse interdit de connaître précisément la position et inversement.

C e principe est lui-même une proposition scientifique : cela signifie que les sciences, au sein même de ce dont peut faire l'expérience, s ont intrinsèquement limitées .

A utrement dit, tout n'est pas rationalisable. L'exemple des sciences nous permet toutefois de tirer une autre c onclusion, cette fois positive : que tout ne soit pas rationalisable ne signifie pas que le réel qui nous échappe n'est pas en lui-même rationnel.

A u contraire, le présupposé sur lequel s'appuie les sciences est justement celui selon lequel le réel ne fait pas n'importe quoi : il est en lui-même ordonné, même si nous ne pouvons pas connaître cet ordre.

A utrement dit, il fait distinguer le fait, pour quelque chose, d'être connu rationnellement, et celui d'être en-soi rationnel.

Nous supposons donc en théorie de la connais sance que ce qui échappe à la raison au sens fort, c'est-à-dire, ce qu'on ne peut pas connaître, n'est pourtant pas irrationnel.

C e présupposé peut-il être fondé ? III – Ce qui n'est pas rationalisable peut-il être en-soi rationnel ? Bergson écrit que le désordre est un ordre que nous ne connaissons pas encore.

C ela ne signifie pas que nous devons présuppos er que le désordre pourra être mis en ordre, mais que la notion de désordre est absurde.

Désordre et ordre sont en un sens une seule et même chose.

C e qui varie, c'est le fait que nous le connaissions ou pas. P ar conséquent, se demander si c e q u i n'est pas rationalisable peut tout de même être rationnel en soi est une fausse question, un non-sens.

C e qu'indique l'impossibilité de rationaliser, c'est au contraire une limite de la rationalité elle-même. P eu importe que cette rationalité soit celle de la raison humaine, c elle d'un entendement divin ou encore une rationalité ensoi du réel.

Si le désordre et l'ordre sont une seule et même chose, alors l'impossibilité de l'ordre n'est pas le désordre : ce n'est ni l'ordre, ni le désordre, mais autre chose dont ne pouvons absolument rien dire.

Si justement nous pouvions en dire quelque c hose, alors ce ne serait pas un désordre (ou un ordre non encore connu). N'est-ce pas là le s ens le plus fort de l'irrationnel ? C e dont nous ne pouvons absolument rien dire, c'est justement ce qui est absolument irrationnel, c'est-à-dire ce qui n'est même pas un désordre. Conclusion : La perspective Bergsonienne nous a permis d'envisager un s e n s fort d e l'irrationnel qui nous permet de répondre radicalement à la question : l'irrationnel entendu en son sens fort est justement ce qui ne pourra jamais être rationalisé, ce qui par nature échappe à notre raison.

Nous ne pouvons même pas envis ager ou dire ce que serait cet irrationnel.

Par conséquent, ce qui non seulement dépasse notre raison et qui de plus ne peut pas par essence être « rattrapé » par elle est bien nécessairement irrationnel : c'est l'irrationnel même.. »

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