Calliclès: La liberté est une absence de contraintes
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PRESENTATION DE "GORGIAS" DE PLATON
Platon (vers 427-347 av.
J.-C.) rédige le Gorgias à un tournant de sa vie, lorsqu'il se retire de la vie politique pour se
convertir à la philosophie.
La démocratie athénienne traverse alors une grave crise politique et morale.
Les Sophistes
se sont emparés du pouvoir et ont corrompu la cité.
La mise en examen de la rhétorique permet à l'auteur de régler ses
comptes avec ceux qu'il tient pour responsables de la mort de Socrate.
Mais ce dialogue de la maturité est aussi
l'occasion pour Platon de faire l'apologie de la philosophie : aux Sophistes qui ne se préoccupent que de réussir dans la
vie, il oppose le souci de réussir sa vie, en prenant soin de son âme.
La théorie la plus classique qui définit la liberté comme absence de contraintes et libre jeu des passions est celle de
Calliclès, sophiste du ive siècle av.
J.C., adversaire acharné de Socrate.
Définissant l'impossibilité du bonheur dans
l'état de servitude et d'esclavage à l'égard d'un autre ou des autres, il préconise la culture des passions et des désirs
que l'on doit multiplier et accroître en nombre et en intensité pour les satisfaire lorsqu'ils atteignent leur plus haut
degré.
Si la répression et la maîtrise de ses instincts, volontés, désirs, pulsions de vie engendrent tristesse et douleur,
l'épanouissement et le plein éclat des forces de vie, ainsi que de notre puissance, nous réalisent dans le plaisir et la
volupté.
Cette culture de la force vitale est un art véritable, réservé à peu de gens.
L'opprobre général auquel un tel
mode de vie donne lieu l'atteste largement.
Les disciples d'Epicure n'ont-ils pas été par la suite traités de pourceaux ?
Notre lâcheté et notre faiblesse nous font préférer la tempérance, la mesure et la justice.
Pour quelques caractères
d'exception qui en ont le courage et la force, la liberté consiste à vivre dans le luxe, l'incontinence et les passions
démesurées.
Le discours de Calliclès.
"Certes, ce sont les faibles, la masse des gens, qui établissent les lois, j'en suis sûr.
C'est donc en fonction d'euxmêmes et de leur intérêt personnel que les faibles font les lois, qu'ils attribuent des louanges, qu'ils répartissent des
blâmes.
Ils veulent faire peur aux hommes plus forts qu'eux et qui peuvent leur être supérieurs.
C'est pour empêcher
que ces hommes ne leur soient supérieurs qu'ils disent qu'il est vilain, qu'il est injuste, d'avoir plus que les autres et que
l'injustice consiste justement à vouloir avoir plus.
Car, ce qui plaît aux faibles, c'est d'avoir l'air d'être égaux à de tels
hommes, alors qu'ils leur sont inférieurs.
Et quand on dit qu'il est injuste, qu'il est vilain, de vouloir avoir plus que la plupart des gens, on s'exprime en se
référant à la loi.
Or, au contraire, il est évident, selon moi, que la justice consiste en ce que le meilleur ait plus que le
moins bon et le plus fort plus que le moins fort.
Partout il en est ainsi, c'est ce que la nature enseigne, chez toutes les
espèces animales, chez toutes les races humaines et dans toutes les cités !
Si le plus fort domine le moins fort et s'il est supérieur à lui, c'est là le signe que c'est juste.
De quelle justice Xerxès s'est-il servi lorsque avec son armée il attaqua la Grèce (1), ou son père quand il fit la guerre
aux Scythes ? Et encore, ce sont là deux cas parmi des milliers d'autres à citer ! Eh bien, Xerxès et son père ont agi,
j'en suis sûr, conformément à la nature du droit - c'est-à-dire conformément à la loi, oui, par Zeus, à la loi de la nature
-, mais ils n'ont certainement pas agi en respectant la loi que nous établissons, nous !
Chez nous, les êtres les meilleurs et les plus forts, nous commençons à les façonner, dès leur plus jeune âge, comme
on fait pour dompter les lions ; avec nos formules magiques et nos tours de passe-passe, nous en faisons des
esclaves, en leur répétant qu'il faut être égal aux autres et que l'égalité est ce qui est beau et juste.
Mais, j'en suis
sûr, s'il arrivait qu'un homme eût la nature qu'il faut pour secouer tout ce fatras, le réduire en miettes et s'en délivrer,
si cet homme pouvait fouler aux pieds nos grimoires, nos tours de magie, nos enchantements, et aussi toutes nos lois
qui sont contraires à la nature - si cet homme, qui était un esclave, se redressait et nous apparaissait comme un
maître, alors, à ce moment-là, le droit de la nature brillerait de tout son éclat."
PLATON, Gorgias, 483b-484a, trad.
Canto, Garnier-Flammarion, 1987, pp.
212-213.
(1) allusion à la seconde guerre médique conduite par Xerxès, roi des Perses, qui envahit la Grèce en 480 av.
JC
Le discours de Calliclès (Gorgias 483b - 484a)
Introduction
Calliclès entend pratiquer une critique " généalogique " des lois en débusquant le type de vie qui se dissimule derrière.
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