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« Bossuet instruit les vivants par l'exemple des morts », avait dit le Cardinal de Polignac dans son discours de réception à l'Académie française, où il faisait l'éloge de son prédécesseur (3 août 1704). Commentez ces paroles à l'aide des oraisons funèbr

Extrait du document

  • Début. — Bossuet a profondément transformé l'Oraison funèbre, genre qui n'avait rien fourni de remarquable avant lui, et il a réalisé des chefs-d'œuvre d'éloquence sous l'inspiration de son génie oratoire et de son âme sacerdotale.
  • 1. Comment il conçoit l'oraison funèbre. Avant lui elle n'était qu'un discours d'apparat, un panégyrique. Il en fera un récit fidèle de la vie du défunt et un portrait véridique, destiné à l'édification de son auditoire. L'idée commune à tous les discours sera celle-ci : c'est la mort qui juge la vie et ramène l'homme à la pensée de sa destinée surnaturelle.
  • 2. Bossuet recherche la vérité.

 a) Vérité historique. II replace ses héros qui appartiennent à l'histoire dans le cadre des grands événements généraux de leur temps.  b) Vérité psychologique et morale. Il s'informe avec soin des circonstances de la vie privée et étudie les caractères et les âmes.

  • 3. Bossuet cherche à instruire son auditoire des vérités chrétiennes. Il dégage le sens religieux de chaque vie qu'il retrace.
  • Conclusion. — Bossuet imprime à l'oraison funèbre son vrai caractère. Il ne perd jamais de vue son auditoire qu'il cherche, de toute son éloquence, à émouvoir et convertir.

« « Bossuet instruit les vivants par l'exemple des morts », avait dit le Cardinal de Polignac dans son discours de réception à l'Académie française, où il faisait l'éloge de son prédécesseur (3 août 1704).

Commentez ces paroles à l'aide des oraisons funèbres que vous avez étudiées. PLAN Début.

— Bossuet a profondément transformé l'Oraison funèbre, genre qui n'avait rien fourni de remarquable avant lui, et il a réalisé des chefs-d'œuvre d'éloquence sous l'inspiration de son génie oratoire et de son âme sacerdotale. 1.

Comment il conçoit l'oraison funèbre.

Avant lui elle n'était qu'un discours d'apparat, un panégyrique.

Il en fera un récit fidèle de la vie du défunt et un portrait véridique, destiné à l'édification de son auditoire.

L'idée commune à tous les discours sera celle-ci : c'est la mort qui juge la vie et ramène l'homme à la pensée de sa destinée surnaturelle. 2.

Bossuet recherche la vérité. a) Vérité historique.

II replace ses héros qui appartiennent à l'histoire dans le cadre des grands événements généraux de leur temps. b) Vérité psychologique et morale.

Il s'informe avec soin des circonstances de la vie privée et étudie les caractères et les âmes. 3.

Bossuet cherche à instruire son auditoire des vérités chrétiennes.

Il dégage le sens religieux de chaque vie qu'il retrace. Conclusion.

— Bossuet imprime à l'oraison funèbre son vrai caractère.

Il ne perd jamais de vue son auditoire qu'il cherche, de toute son éloquence, à émouvoir et convertir. DÉVELOPPEMENT Le n o m d e Bossuet s'attachera toujours à ce genre d'éloquence comme celui du plus grand orateur qui l'ait illustré.

Il l'a surtout profondément transformé; il y a imprimé la griffe de son génie, en même temps que la marque de son âme sacerdotale. Qu'était l'oraison funèbre avant Bossuet ? un discours d'apparat, pour lequel on demandait un orateur en renom, comme on suspendait des tentures autour du cercueil et dressait des catafalques.

C'était au XVIe et au début du xviie siècle un débordement d'éloquence pédante ou frivole, p o m p e u s e ou précieuse, pour louer princes, ducs, maréchaux, cardinaux d e France, reines et grandes dames.

La religion tenait là fort peu de place, comme, souvent, elle en avait tenu peu dans la vie des défunts. Bossuet hésita, nous dit-on, à aborder un genre si profane.

11 déclare dans une de ses premières oraisons funèbres : « Quand l'Eglise ouvre la bouche des prédicateurs dans les funérailles d e s e s enfants, ce n'est pas pour accroître la p o m p e du deuil par des plaintes étudiées, ni pour satisfaire l'ambition des vivants par de vains éloges des morts.

Elle se propose un objet plus noble dans la solennité des discours funèbres : elle ordonne que ses ministres, dans les derniers devoirs que l'on rend aux morts, leur donnent un saint dégoût de la vie présente et que la vie humaine rougisse en regardant le terme fatal que la Providence divine a donné à ses espérances trompeuses.

» Le discours sera donc pour lui un sermon qui aura pour idée centrale la mort, mais la mort envisagée du point de vue chrétien.

« La mort est la m e s u r e q u e Bossuet applique aux joies, aux maux, aux désirs et aux agitations de l'homme.

» C'est aux lumières supérieures qu'elle jette sur la vie que Bossuet éclairera ces grandes destinées dont il doit retracer l'histoire.

L'oraison funèbre sera un sermon appuyé sur u n e x e m p l e .

«Ainsi Bossuet sauva la dignité d'un genre menacé par l'esprit courtisan » (J.

Calvet), et assura la continuité de son action apostolique. Retracer u n e grande existence, faire une biographie qui soit en m ê m e temps un portrait était donc le premier d e s e s devoirs.

Ici se rencontrait une difficulté : comment dire la vérité sur une tombe qui vient à peine de se refermer sur un mort illustre, en présence de sa famille, de ses amis, alors que cette vérité ne fut pas toujours glorieuse, qu'elle fut même parfois scandaleuse ? L'éloge traditionnel était souvent menteur, mais Bossuet ne se prêtera pas à la flatterie : « Nous ne donnons point de fausses louanges devant les autels.

» Ce serait offenser le Dieu de vérité.

Il ne fait qu'un minimum de concessions aux convenances les plus élémentaires. « Bossuet savait quelles paroles conventionnelles on attendait de lui pour être insérées dans le rite d'une cérémonie officielle, ces paroles il les a prononcées comme cela s'est fait et se fera toujours, mais il les a prononcées avec tact, avec adresse et avec dignité » (J.

Calvet). « Quand nous l'entendrons indiquer en termes mesurés, avec une remarquable légèreté de touche, les querelles domestiques de Charles Ier et de la reine Henriette, le triste m é n a g e d e M a d a m e et les soupçons jaloux de Monsieur, les vivacités et l'inégalité du prince de Condé, toutes ces petites ombres si discrètement mises, nous apprendrons à estimer la franchise de l'orateur.

Pour être respectueux il est resté libre, et les convenances ont réglé, non gêné l'expression de ses sentiments » (Lanson). Bossuet, pour faire revivre ses personnages, se fera historien véridique, biographe bien informé, psychologue pénétrant.

Son information est ample et solide.

Ses héros ont presque tous tenu un premier rôle ou occupé un haut rang, ils appartiennent à l'histoire.

Bossuet les replacera dans le cadre des événements généraux et de la société de leur temps.

Pour Henriette de France, femme de Charles Ier, c'est un tableau magistral de la Révolution d'Angleterre.

Pour peindre la femme, il demande à Mme de Motteville qui l'avait bien connue un mémoire sur la vie et le caractère de cette reine.

Pour faire connaître la Princesse Palatine, il étudie les écrits, les lettres qu'elle a laissés, il cite en chaire les documents sur lesquels son éloge est fondé.

De même, mieux on connaît le temps de la Fronde, plus on admire la vérité de l'oraison funèbre de Le Tellier.

Pour Condé, qu'il connaissait bien personnellement, il s'est informé avec soin de l'histoire de ses campagnes en compulsant les archives du Prince et il reproduit les détails notés par ses officiers généraux, annotés par Condé lui-même. On sait aussi comment il a rappelé intrépidement sa défection et sa rébellion.

« Il ne se sentit pas le droit de taire un épisode si principal de la vie du Prince, et, en en parlant, de l'excuser ou de ne la condamner qu'à demi...

Il condamne le prince par la bouche même du prince : s'il compensa la grandeur par la profondeur du repentir, est-ce une flatterie ou une idée chrétienne? » (Lanson.) Mais le but de Bossuet c'est avant tout l'instruction des fidèles et leur édification.

Il veut instruire ceux qui l'écoutent des vérités du salut, donner une leçon chrétienne.

C e s leçons ne sont p a s factices.

Il est bien évident que, si l'esprit humain s e prend instinctivement à réfléchir sur la Puissance mystérieuse qui m è n e les h o m m e s et conduit le m o n d e , c'est surtout dans les grands bouleversements politiques et sociaux qu'on appelle les révolutions : or la mort de Charles 1er et la révolution d'Angleterre, qui renversa la fortune de la reine Henriette, étaient des événements encore tout proches.

Ils devaient frapper fortement l'imagination d e son auditoire.

La mort, scandale de la raison, l'est plus encore, quand elle enlève un être jeune et beau, qui semble promis au bonheur.

L'exemple d'Henriette d'Angleterre devait émouvoir tous les cœurs. Anne de Gonzague, princesse palatine, avait donné beaucoup de scandale : Bossuet proclame sa pénitence, non sans avoir rappelé ses fautes.

Combien, parmi ceux qui l'écoutaient, trouvèrent dans cet e x e m p l e médité le courage d e réformer leur vie, comme M m e d e Montespan, dont la faveur est passée et qui va s'ensevelir dans la piété et les aumônes ? Chez Condé, la piété mise en balance avec la gloire militaire chez le plus grand homme de guerre de son temps sera rehaussée par cette image du héros superbe qui se soumet à Dieu et discipline à la fin de sa vie sa nature violente.

Cette piété robuste, toute virile, prouve que la religion n'est pas, comme le croient les courtisans, seulement l'affaire des femmes et l'occupation des cloîtres. C'est ainsi que Bossuet imprime à l'oraison funèbre son vrai caractère.

Esprit réaliste, il se plaît dans le concret.

La hauteur de ses vues théologiques et philosophiques ne l'empêche pas de voir les hommes tels qu'ils sont.

(Quels portraits de maître que ceux d'Henriette et de Condé!) Il ne perd jamais de vue cette foule mondaine, ce peuple de courtisans qui forme son auditoire, surtout dans les cérémonies d'apparat.

Il connaît leurs vices, leurs passions, et le prêtre cherche leurs âmes, suit les chemins d e leur esprit pour les troubler, les émouvoir, les convertir.

Cœur ardent de charité, il donne à ces accents tantôt une vigueur effrayante et tantôt une douceur consolante, et s'il devient orateur enflammé et grand poète, c'est parce qu'il est apôtre.. »

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