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Baruch Spinoza: La superstition est -elle déraisonnable ?

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Si les hommes avaient le pouvoir d'organiser les circonstances de leur vie au gré de leurs intentions, ou si le hasard leur était toujours favorable, ils ne seraient pas en proie à la superstition. Mais on les voit souvent accules à une situation si difficile, qu'ils ne savent plus quelle résolution prendre; en outre, comme leur désir immodéré des faveurs capricieuses du sort les ballotte misérablement entre l'espoir et la crainte, ils sont en général très enclins à la crédulité [...). Si, par exemple, pendant que la frayeur les domine, un incident quelconque leur rappelle un bon ou mauvais souvenir, ils y voient le signe d'une issue heureuse ou malheureuse; pour cette raison et bien que l'expérience leur en ait donné cent fois le démenti, ils parlent.. d'un présage soit heureux, soit funeste. Enfin, si un spectacle insolite les frappe d'étonnement, ils croient être témoins d'un prodige manifestant la colère ou des Dieux, ou de la souveraine Déité ; dès lors, à leurs yeux d'hommes superstitieux et irréligieux, ils seraient perdus s'ils ne conjuraient le destin par des sacrifices et des voeux solennels. Ayant forgé ainsi d'innombrables fictions, ils interprètent la nature en termes extravagants, comme si elle délirait avec eux.

« PRESENTATION DU "TRAITE THEOLOGICO-POLITIQUE" DE SPINOZA Dans la deuxième moitié du xviie siècle, le durcissement des sectes religieuses fait planer l'ombre de l'intolérance sur la ville d'Amsterdam, jusqu'alors réputée pour sa libéralité.

La situation réveille les consciences philosophiques : Spinoza (1632-1677) abandonne provisoirement l'Éthique pour défendre la liberté de pensée.

Il montre que foi et raison sont dissociées, « l'une et l'autre ont leur royaume propre » (XV).

Pour examiner les exigences de la foi et les discerner d'une superstition dangereuse, il propose une méthode originale d'interprétation des textes sacrés : fondée sur la critique historique, elle exclut une lecture littérale aussi bien qu'une réduction rationnelle telle que l'a proposée Maïmonide.

Si la culture de l'auteur se concentre sur la Bible, la portée de l'analyse vise tout le champ religieux.

On peut voir dans cette recherche, qui suscita les critiques les plus violentes, l'origine d'une approche philologique des Écritures, doublée d'un plaidoyer en faveur de la liberté de pensée. "Si les hommes avaient le pouvoir d'organiser les circonstances de leur vie au gré de leurs intentions, ou si le hasard leur était toujours favorable, ils ne seraient pas en proie à la superstition.

Mais on les voit souvent accules à une situation si difficile, qu'ils ne savent plus quelle résolution prendre; en outre, comme leur désir immodéré des faveurs capricieuses du sort les ballotte misérablement entre l'espoir et la crainte, ils sont en général très enclins à la crédulité [...).

Si, par exemple, pendant que la frayeur les domine, un incident quelconque leur rappelle un bon ou mauvais souvenir, ils y voient le signe d'une issue heureuse ou malheureuse; pour cette raison et bien que l'expérience leur en ait donné cent fois le démenti, ils parlent..

d'un présage soit heureux, soit funeste. Enfin, si un spectacle insolite les frappe d'étonnement, ils croient être témoins d'un prodige manifestant la colère ou des Dieux, ou de la souveraine Déité ; dès lors, à leurs yeux d'hommes superstitieux et irréligieux, ils seraient perdus s'ils ne conjuraient le destin par des sacrifices et des voeux solennels.

Ayant forgé ainsi d'innombrables fictions, ils interprètent la nature en termes extravagants, comme si elle délirait avec eux." Baruch Spinoza, Traité théologico-politique (1670) VOCABULAIRE SPINOZISTE Sagesse: attitude sereine de l’homme libre, atteinte par la connaissance philosophique.

Elle est caractérisée par le sentiment d’être, et d’être éternel, cette conscience d’être étant permanente et active.

Elle est donc joie. Vérité: ce n’est pas seulement l’accord de l’idée et de son objet extérieur: c’est aussi et surtout l’accord de cette idée avec elle-même, et l’évidence intérieure et immédiate d’une idée adéquate (index sui).

Les concepts «Dieu» et « vérité» sont identiques. Homme: réalité singulière, contingente, constituée par un corps et par l’idée de ce corps (esprit humain). L’existence d’un homme n’est pas logiquement nécessaire mais elle résulte du système des causes naturelles. Dieu: nom donné par Spinoza à la substance infinie (Être) en tant qu’elle est constituée par un nombre infini d’attributs infinis.

Dieu est donc la Nature elle-même.

Ce terme (Dieu) est équivalent au terme vérité. Conatus: l'effort par lequel chaque chose tend à persévérer dans son être.

Il est donc la puissance d’exister (vim existendi) et l’essence même du Désir. Désir: mouvement concret fondé sur le conatus et par lequel l’individu poursuit des biens qui accroîtront sa puissance d’exister, c’est-à-dire sa perfection et son être.

Un tel accroissement produit la Joie (et ses dérivés) ; sa réduction produit au contraire la Tristesse (et ses dérivés).

Le Désir est l’essence de l’homme. DIRECTIONS DE RECHERCHE • Que signifie « fortune e ici ? • A quelle(s) condition(s) selon Spinoza les hommes « ne seraient jamais prisonniers de la superstition » ? Pourquoi « toutes », « toujours » ? • Pourquoi les hommes ont-ils « très naturellement l'âme encline à la plus extême crédulité » ? Que signifie ici « naturellement » ? • En raison de quoi Spinoza affirme-t-il que « cela » « nul ne l'ignore » ? • Que signifie ici « la plupart s'ignorent eux-mêmes » ? • En quoi la « remarque, en outre » ajoute-t-elle à l'argumentation précédente de Spinoza ? • Pourquoi Spinoza note-t-il « bien que cent fois trompés » ? • Que signifie dans le texte « maintenant » ?. »

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