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Bachelard: Pédagogie, sciences et obstacle épistémologique

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Dans l'éducation, la notion d'obstacle pédagogique est également méconnue. J'ai souvent été frappé du fait que les professeurs de sciences, plus encore que les autres si c'est possible, ne comprennent pas qu'on ne comprenne pas. Peu nombreux sont ceux qui ont creusé la psychologie de l'erreur, de l'ignorance et de l'irréflexion. [...] Les professeurs de sciences imaginent que l'esprit commence comme une leçon, [...] qu'on peut faire comprendre une démonstration en la répétant point pour point. Ils n'ont pas réfléchi au fait que l'adolescent arrive dans la classe de physique avec des connaissances empiriques déjà constituées : il s'agit alors, non pas d'acquérir une culture expérimentale, mais bien de changer de culture expérimentale, de renverser les obstacles déjà amoncelés par la vie quotidienne. Un seul exemple : l'équilibre des corps flottants fait l'objet d'une intuition familière qui est un tissu d'erreurs. D'une manière plus ou moins nette, on attribue une activité au corps qui flotte, mieux au corps qui nage. Si l'on essaie avec la main d'enfoncer un morceau de bois dans l'eau, il résiste. On n'attribue pas facilement la résistance à l'eau. Il est dès lors assez difficile de faire comprendre le principe d'Archimède dans son étonnante simplicité mathématique si l'on n'a pas d'abord critiqué et désorganisé le complexe impur des intuitions premières. En particulier sans cette psychanalyse des erreurs initiales, on ne fera jamais comprendre que le corps qui émerge et le corps complètement immergé obéissent à la même loi. Bachelard.1e partie du texte -> Bachelard attire l'attention des professeurs sur la notion d'obstacle pédagogique («Dans l'éducation... méconnue.»), avant de leur reprocher de ne s'intéresser qu'à l'acquisition des connaissances et de dédaigner l'analyse des erreurs («J'ai souvent... et de l'irréflexion.»). 2e partie du texte -> il explique ce fait par l'image erronée qu'ils se font de l'esprit humain, empêchant leur pédagogie d'évoluer («Les professeurs... la vie quotidienne.»). 3e partie du texte -> il illustre son propos par un exemple («Un seul exemple... intuitions premières.») et conclut en rappelant sa thèse («En particulier... à la même loi.»).

« Dans l'éducation, la notion d'obstacle pédagogique est également méconnue.

J'ai souvent été frappé du fait que les professeurs de sciences, plus encore que les autres si c'est possible, ne comprennent pas qu'on ne comprenne pas.

Peu nombreux sont ceux qui ont creusé la psychologie de l'erreur, de l'ignorance et de l'irréflexion.

[...] Les professeurs de sciences imaginent que l'esprit commence comme une leçon, [...] qu'on peut faire comprendre une démonstration en la répétant point pour point.

Ils n'ont pas réfléchi au fait que l'adolescent arrive dans la classe de physique avec des connaissances empiriques déjà constituées : il s'agit alors, non pas d'acquérir une culture expérimentale, mais bien de changer de culture expérimentale, de renverser les obstacles déjà amoncelés par la vie quotidienne.

Un seul exemple : l'équilibre des corps flottants fait l'objet d'une intuition familière qui est un tissu d'erreurs.

D'une manière plus ou moins nette, on attribue une activité au corps qui flotte, mieux au corps qui nage.

Si l'on essaie avec la main d'enfoncer un morceau de bois dans l'eau, il résiste.

On n'attribue pas facilement la résistance à l'eau.

Il est dès lors assez difficile de faire comprendre le principe d'Archimède dans son étonnante simplicité mathématique si l'on n'a pas d'abord critiqué et désorganisé le complexe impur des intuitions premières.

En particulier sans cette psychanalyse des erreurs initiales, on ne fera jamais comprendre que le corps qui émerge et le corps complètement immergé obéissent à la même loi.

Bachelard. I.

L'analyse du texte a) Les articulations logiques 1e partie du texte -> Bachelard attire l'attention des professeurs sur la notion d'obstacle pédagogique («Dans l'éducation...

méconnue.»), avant de leur reprocher de ne s'intéresser qu'à l'acquisition des connaissances et de dédaigner l'analyse des erreurs («J'ai souvent...

et de l'irréflexion.»). 2e partie du texte -> il explique ce fait par l'image erronée qu'ils se font de l'esprit humain, empêchant leur pédagogie d'évoluer («Les professeurs...

la vie quotidienne.»). 3e partie du texte -> il illustre son propos par un exemple («Un seul exemple...

intuitions premières.») et conclut en rappelant sa thèse («En particulier...

à la même loi.»). b) Les notions clés Empirique -> issu de l'expérience. Démonstration -> raisonnement établissant la vérité d'une proposition à partir de prémisses établies comme vraies. Principe d'Archimède -> tout corps plongé dans un fluide subit une poussée verticale, dirigée de bas en haut, égale au poids du fluide déplacé. Critique -> appréciation fondée sur un jugement de valeur. Psychanalyse -> étude du fonctionnement inconscient de la vie psychique. Pédagogie -> science de l'éducation. c) Le problème et la thèse • Comment enseigner les sciences ? De façon déductive, en dérivant des théorèmes de principes, ou inductive, en remontant des faits aux lois? Comment se représenter l'esprit : comme une table rase ou une piste encombrée d'obstacles? • Selon Bachelard, la psychanalyse de l'erreur doit précéder l'acquisition des connaissances.

L'enseignement n'est fructueux que s'il vient après une réforme de la pensée issue de l'analyse des erreurs.

Cette science de l'ignorance est la condition de la connaissance. 2.

Le plan détaillé I.

Savoir n'est pas acquérir une culture, mais changer de culture. a) Bachelard reproche aux enseignants de se représenter l'esprit de leurs élèves comme des boîtes vides qu'il faudrait remplir de connaissances, par la raison ou l'expérience. b) Les professeurs font alors en pédagogie la même erreur que les élèves en physique : ils oublient que c'est le milieu, l'esprit ou le fluide qui opposent une résistance à l'objet. c) Avoir l'esprit scientifique suppose de cesser de raisonner comme on le fait dans la vie quotidienne.

Ce fonctionnement inconscient de la pensée fait obstacle au développement des sciences. II.

Quel est donc le principal obstacle à la connaissance du vrai ? a) Pour Platon (Ménon), il faut savoir que l'on ne sait pas pour chercher la vérité. b) Bachelard fait de la psychanalyse de l'erreur un préalable à la connaissance du vrai.

Conclusion L'éducation est une conversion de l'esprit. 3.

Le texte dans le débat philosophique Bachelard critique aussi bien la conception rationaliste des sciences, qui privilégie la raison et la démonstration (Descartes), que l'approche empiriste, présentant l'esprit comme une table rase tirant ses leçons de l'expérience (Locke).

Il introduit les outils de la psychanalyse (Freud) dans la philosophie des sciences. 4.

Ce qu'il ne faut pas faire Parler de son vécu en oubliant de définir les notions.. »

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