Aide en Philo

Avez-vous conscience que la lecture d'oeuvres littéraires a contribué à vous donner une meilleure connaissance de vous-même ?

Extrait du document

« Avez-vous conscience que la lecture d'oeuvres littéraires a contribué à vous donner une meilleure connaissance de vous-même ? Chacun peut remarquer aujourd'hui le goût que l'on a pour la lecture.

Le livre se vulgarise nettement depuis plusieurs années.

Les raisons en sont diverses : il s'agit d'abord d'un progrès accompli sur le plan économique, avec la création du livre de poche.

Cette formule présente un intérêt certain : elle permet à toutes les familles de s'offrir une oeuvre littéraire à un prix convenable.

Cette ruée vers les livres correspond aussi à un désir latent qui a enfin la possibilité d'éclater au grand jour : celui de s'évader, de se dépayser, de trouver des sujets de préoccupations autres que ceux de la vie quotidienne. Mais cet essor est aussi certainement dû au fait que le lecteur est un homme -ou une femme- qui se cherche ou qui désire approfondir, puis ajuster sa propre connaissance.

Chaque lecteur est sûrement conscient de cette meilleure connaissance de lui-même, car c'est au travers de ses nombreuses lectures qu'il peut retrouver certains éléments essentiels de son caractère ; il ne les soupçonnait peut-être pas auparavant.

Comme tout lecteur, j'ai moi aussi fait cette expérience.

J'en parlerai donc sur un plan purement personnel. J'ai souvent remarqué que lorsqu'on nous demande notre avis sur un livre, nous répondons automatiquement par « Ça m'a beaucoup plu » ou «Je n'ai pas tellement aimé ».

Personne ne commence par faire un résumé ou une synthèse du livre.

Cela montre que le lecteur juge la qualité d'un livre en fonction du degré d'émotion qu'il en a retiré.

Justement, le livre nous permet de voir à quel point nous pouvons être émus, touchés, bouleversés même, par une chose ou un être.

Dans la vie, nous n'avons guère l'habitude d'étaler nos' sentiments, nos états d'âme, nos petites misères.

Nous préférons au contraire les garder pour nous et faire comme si de rien n'était.

Cela ne regarde pas les autres ! Mais lorsque nous sommes enfin seuls et tranquilles, à quoi bon nous cacher ? Nous pouvons pleurer, par exemple, tout notre saoul.

Et lorsque nous lisons, nous sommes généralement seuls, à l'abri des regards et des écoutes. Rien ne nous empêche alors de laisser échapper un sanglot lorsqu'un passage du livre nous ébranle vraiment.

Nous sommes enfin sans fard, ni masque, ni vernis.

Nous réagissons selon notre propre nature.

Bref, nous sommes purs et donc capables de nous évaluer d'une façon sinon parfaite, du moins convenable. Peu à peu, lorsqu'on a déjà quelques livres «derrière soi», on connaît les sujets et le genre de personnages qui peuvent nous émouvoir.

Certains livres, comme Le Petit Chose ou les romans de Pagnol, font vivre des personnages si pittoresques, si vivants, si pathétiques qu'ils ont plu à tous les enfants et qu'ils connaissent toujours un immense succès auprès d'eux.

Nous arrivons à connaître, de mieux en mieux, les personnages que nous allons aimer.

Ainsi, Julien Sorel, le héros de Le Rouge et le Noir, de Stendhal, me semble beaucoup plus admirable lorsqu'il est dans sa prison, à l'« état naturel », que chez les Rénal ou à Paris.

Cela traduit un certain mépris de l'hypocrisie, bien qu'elle soit souvent un bon moyen pour assouvir son ambition, et au contraire un appétit des situations claires et sans ambiguïté.

Le livre, comme on l'a dit plus haut, permet de jauger sa capacité d'émotion.

J'étais ainsi très étoiles née et très heureuse de faire cette découverte, le jour où je sentis qu'une chose pouvait aussi me toucher. Jusque-là, je n'en avais fait l'expérience qu'avec des êtres comme ceux que je viens de citer. Mais cette fois, c'était une ville : celle de New York que décrit Didier Decoin dans John l'enfer.

Je suivais son évolution, ou plutôt sa désagrégation, avec le plus vif intérêt.

Je sentais sa mort, mais la redoutais, comme si c'était un être humain.

Ce livre m'a révélé que j'étais capable d'éprouver des sentiments comparables pour des êtres sans vie et pour les êtres vivants.

Cet exemple en particulier montre que les oeuvres littéraires contribuent à nous donner une meilleure connaissance de nous-mêmes.

La lecture permet aussi de nous intéresser à des sujets autres que ceux que nous connaissons déjà.

On s'en aperçoit par exemple lorsqu'on se surprend à relire un même passage que l'on a pourtant bien lu et bien compris.

Nous profitons simplement une fois de plus de ces quelques lignes.

Elles nous touchent parfois pour l'émotion qu'elles suscitent chez nous, comme on l'a vu plus haut, mais aussi pour un sujet qu'elles traitent. Le livre permet donc d'entrevoir des centres d'intérêt dont nous n'étions pas toujours conscients auparavant.

Ainsi, Vent d'Est, vent d'Ouest m'a donné l'envie de me procurer un livre sur la Chine. Cette fois, il ne s'agit pas d'un seul passage, qui a éveillé chez moi cette curiosité et le désir d'en savoir davantage sur l'ancien Empire du Milieu, mais du livre tout entier.

Néanmoins, le résultat est là : je ne soupçonnais pas encore l'intérêt que je portais à la Chine ; la lecture du livre de Pearl Buck m'a réveillée et ouvert les yeux.

Je suis certaine que je retrouverai dans les livres de nouveaux thèmes que je voudrais mieux connaître. En effet, j'ai fait une autre expérience, grâce à ces lectures : des poèmes surréalistes qui, avouons-le, sortent des sentiers battus; L'écume des Jours et L'arrache-coeur de Boris Vian m'ont procuré un certain plaisir.

Je me croyais jusque-là plutôt classique et sobre. En réalité, ce n'était là qu'une image à laquelle je pensais ressembler.

L'amour des oeuvres surréalistes révèle en fait un certain « nonconformisme », que j'ai retrouvé dans les musiques «Punk», que je n'exècre pas. Enfin je crois que la façon même dont on lit un livre est très révélatrice de notre caractère.

Personnellement, je parcours, mais sans grande joie, les descriptions.

Je me souviens toujours d'Eugénie Grandet, le roman de Balzac, que j'ai lu sans engouement.

Au contraire, j'ai une certaine propension à préférer des livres où l'on trouve un peu d'action, des changements dans l'esprit des personnages ou dans la situation.

Ces ressorts sont d'ailleurs extrêmement utilisés au théâtre, pour retenir l'attention du spectateur. Pourtant, certaines personnes aiment une lecture que je qualifierais presque de «léthargique» pour moi.

Je pense que le goût que l'on a pour tel ou tel type d'ouvrage dépend du caractère que chacun porte en soi.

C'est encore avec lui que varient les aspirations du lecteur.

Mais la lecture ne peut que confirmer celles qu'il a déjà; pour reprendre le même ouvrage de Balzac, la liberté de ses personnages n'y existe pas : tous leurs faits et gestes sont dictés par un schéma que s'est donné le créateur.

Ils évoluent, si je puis dire, dans un décor immuable, planté avant eux.

Ils doivent alors se plier à maintes contraintes.

L'homme du vingtième siècle aspire généralement à un idéal de liberté.

Il préfère donc des personnages maîtres d'eux-mêmes et de leur destin.

Ainsi le héros du livre d'Henri Troyat intitulé La Tête sur les épaules peut décider du cours de sa vie ou plutôt de sa mort.

Nos contemporains désirent être libres.

Leur lecture ne peut qu'épanouir ce voeu, renforcer cette idée, mais aussi l'affiner. Pour conclure, la lecture d'oeuvres littéraires ne peut qu'épanouir notre personnalité, nous ouvrir l'esprit.

De plus, les livres constituent un excellent moyen de mesure pour connaître l'évolution de notre caractère : il m'est arrivé de lire à deux reprises Le Rouge et Le Noir.

Deux années s'étaient écoulées entre-temps.

Je n'ai pas du tout ressenti les personnages de la même façon. Pendant des centaines de jours, je me voyais pratiquement telle que la veille et le lendemain.

Je ne sentais pas l'évolution qui se produisait en moi.

Mais après avoir relu le roman de Stendhal, j'ai pris conscience de la transformation qui s'était pourtant opérée. C'est la lecture qui m'a donné la possibilité de me re-situer, de me re-connaître.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles