Autrui et humanité ?
Extrait du document
«
Si je parviens à aimer autrui en n'obéissant plus passivement à ce que me suggère ma spontanéité, j'accomplis
mon devoir, qui se présente en même temps comme devoir universel : l'amour réciproque d'autrui ne peut en effet
déterminer aucune contradiction, et les conduites de l'humanité s'harmonisent alors sans problème, puisqu'à
l'hostilité ou la haine vient se substituer un amour positif.
De la sorte, considérer que l'amour d'autrui est un devoir,
c'est participer, en ce qui me concerne authentiquement, à l'élaboration de l'humanité conçue comme totalité.
On peut évidemment juger ce projet irréaliste, et le condamner par simple référence aux événements historiques qui
le contredisent sans fin.
Mais la constitution de l'attitude morale suppose que, malgré les démentis du réel, je
maintiens le pari de l'humanité comme au moins possible, indépendamment des retards ou obstacles que sa
constitution peut connaître.
À la source de ces obstacles, c'est d'ailleurs beaucoup plus l'ensemble de ce qu'exige
chaque société que la morale individuelle qui tient un rôle déterminant ; et l'exigence morale, si on lui donne son
poids maximal, exige que je vise, non les intérêts de la société à laquelle j'appartiens, mais bien ceux de l'humanité
dans son ensemble.
C'est pourquoi, indépendamment de toute considération sociale, ce peut être dans ce que Lévinas nomme le «faceà-face » que l'amour d'autrui se manifeste, plus radicalement encore, sous l'aspect du devoir.
S'il est vrai qu'autrui
m'est toujours étranger, au sens où il est précisément ce que moi, je ne suis pas, mon frère m'est aussi étranger
qu'un aborigène d'Australie : ils manifestent l'un comme l'autre une présence qui n'est pas la mienne.
C'est alors que
peuvent naître des réactions de méfiance ou d'hostilité.
Sauf, affirme Lévinas, si je perçois la signification
immédiatement éthique du visage de l'autre : regarder le visage de l'autre, c'est y lire, ou y deviner la loi : « Tu ne
tueras pas ».
En adhérant à de telles analyses, on constate que le visage d'autrui me renvoie l'image de l'humanité
comme addition de différences : je ne suis homme qu'avec l'autre et grâce à lui..
»
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