Aristote et la quiddité de la maison
Extrait du document
«
"Puisqu'on doit connaître l'existence de la chose comme quelque chose
de donné, il est évident que ce qu'on cherche, c'est pourquoi la matière
est telle chose.
Par exemple : ces matériaux sont une maison, pourquoi ?
Parce que à ces matériaux appartient la quiddité de la maison.
On dira de
même que cette chose-ci est un homme, ou plutôt ce corps possédant
telle forme est un homme.
De sorte que ce que nous recherchons, c'est la
cause (c'est-à-dire la forme), en raison de laquelle la matière est quelque
chose de défini, et c'est cela qui est la substance de la chose.
[...] Ce qui
est composé de quelque chose, de telle sorte que le tout est un, est
semblable, non pas à une juxtaposition, mais à la syllabe.
Or la syllabe
n'est pas ses lettres composantes : B A n'est pas identique à B et A, ni la
chair, au Feu et à la Terre, car, après la dissolution des éléments, les
touts, c'est-à-dire la chair et la syllabe, n'existent plus, tandis que les
lettres continuent d'exister, ainsi que le Feu et la Terre.
La syllabe est
donc quelque chose qui n'est pas seulement ses lettres, voyelle et
consonne, elle est autre chose encore ; [...] Cependant il semblerait bien
que ce principe d'union est quelque chose et non un élément, et qui est
cause du moins que ceci est de la chair et cela une syllabe.
Or cette
chose, c'est la substance formelle de chaque être, car c'est là la cause
première de son être." ARISTOTE.
Dans ce chapitre conclusif du livre Z, Aristote démontre que seule la forme d'une chose peut être considérée comme
sa substance, et, par conséquent, que la substance ainsi comprise désigne la chose individuelle.
Tout d'abord, il apparaît nécessaire de déterminer l'objet de la recherche.
S'il doit être « donné », la raison en est que
la question de son existence (Pourquoi cette chose existe-t-elle ainsi et pas autrement ?) n'aboutit qu'à la seule
réponse possible : parce que la chose est ce qu'elle est.
Pour prendre l'exemple de la maison, il existe une différence
entre se demander pourquoi cette maison existe et se demander pourquoi « ces matériaux » forment cette maison.
Par conséquent, la recherche de la nature de la substance conduit à se poser la question de la « quiddité ».
Pourquoi ?
Aristote définit la quiddité dans le livre Z, 4 : « C'est ce que chaque être est dit être par soi ».
Ainsi, peut-on expliquer
que tels matériaux permettent de construire telle maison et non telle autre ; inversement, c'est la quiddité de la
maison qui rend raison du choix et de l'usage des matériaux Mais la quiddité, c'est la « cause », c'est-à-dire la « forme
».
En effet si la quiddité d'une chose, c'est ce qui la fait exister indépendamment de tout autre facteur, alors il est
légitime d'en conclure que la quiddité n'est rien d'autre que sa cause formelle, au sens où par « cause formelle »
Aristote entend « la forme et le paradigme, c'est-à-dire la définition de la quiddité » (livre V, 2).
On sait que la forme
désigne pour Aristote l'une des quatre causes possibles d'une chose composée ; ici, sa mention sert à montrer que par
elle seule une chose peut être définie, non par sa matière comme on vient de le voir.
Du coup, Aristote en infère que
c'est la forme qui fait la « substance de la chose » en vertu d'une autre définition de la quiddité : « la quiddité d'un
être est son essence individuelle et déterminée » (livre Z, 4), c'est-à-dire sa substance (cf.
livre V ; 8).
Or, les choses, au sens substantiel du terme, apparaissent comme un composé de forme et de matière.
La question est
donc la suivante : quel est le principe de composition de la chose ? Est-ce la forme ou la matière ? Si c'est la matière,
alors il faut en conclure que le tout n'est que la somme des parties, ce qui est infirmé par l'observation.
Mais, si le tout
est davantage que ses parties, alors il est possible d'affirmer que le principe de composition de la chose est ce qui
permet de la définir en tant que telle, ce que signifie justement la quiddité.
Par conséquent, Aristote peut conclure que
l'unité de la chose, ce qui fait d'elle une substance, un être individuel et déterminé, « c'est la substance formelle ».
c.q.f.d.
Né à Stagire (Macédoine) en 384 av.
J.-C., mort à Chalcis (Eubée) en 322.
Fils du médecin Nicomaque, il vint à Athènes et suivit l'enseignement de Platon, de 367 à 347.
A la mort de son maître,
et mal vu à Athènes en sa qualité de Macédonien, Aristote fonda une école à Axos, en Troade.
La mort tragique de
son ami Hermias, livré aux Perses, l'obligea à se retirer à Lesbos.
En 342, Philippe, roi de Macédoine, lui confia
l'éducation d'Alexandre.
A l'avènement de celui-ci au trône, en 335, Aristote revint à Athènes, et y fonda l'École du
Lycée, que l'on a appelée école péripatéticienne, parce qu'Aristote y devisait avec ses élèves, tout en se promenant.
A la mort d'Alexandre, en 323, Aristote quitta Athènes et se retira dans l'île d'Eubée.
Il redoutait le sort de Socrate et.
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