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Aristote disait des mathématiques que leur noblesse est de ne servir à rien ! Qu'en pensez-vous ?

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• Est-ce que les mathématiques ne servent à rien? — Est-ce qu'on ne les utilisent pas pour certaines pratiques (scientifiques ou techniques)? — Est-ce que leur utilisation est indispensable? « L'univers ne peut se comprendre si Ton n'a préalablement appris la langue, et à en connaître les caractères employés pour l'écrire. Ce livre est écrit dans la langue mathématique : ses caractères sont des triangles, des cercles et d'autres figures géométriques, sans l'intermédiaire desquels il est impossible d'en comprendre humainement un seul mot. » Saggiatore, Galilée. — Les Mathématiques sont instruments de recherche et de découverte : grâce à la substitution d'un faisceau de relations intelligibles aux objets ou phénomènes naturels, sont rendus possibles des rapprochements originaux, des déductions fécondes. Par le calcul, on peut anticiper des lois et même découvrir des faits nouveaux exigés par l'analyse mathématique avant que l'expérience ait pu les révéler. Cf. Bachelard : « Par exemple l'outil tensoriel est un merveilleux opérateur de généralité; à le manier, l'esprit acquiert des capacités nouvelles de généralisation... Dans la nouvelle science relativiste, un unique symbole mathématique dont la signification est prolixe désigne les mille traits d'une Réalité cachée : la pensée est un programme d'expériences à réaliser... Le calcul tensoriel... est un instrument mathématique qui crée la science physique contemporaine comme le microscope crée la microbiologie. » Le Nouvel Esprit scientifique, pages 58 et 59 (PUF). - Remarquer que pour Bachelard (et pour Galilée?) les mathématiques ne sont pas une langue en ce sens qu'elles ne sont pas un simple moyen d'expression, une langue artificielle que l'on utiliserait « après coup ». « On a répété sans fin que les mathématiques étaient un langage, un simple moyen d'expression. On s'est habilité à les considérer comme des outils il la disposition d'une raison consciente d'elle-même, maîtresse d'idées pures douées d'une clarté anté-mathématique... en réalité... c'est l'effort mathématique qui forme l'axe de la découverte, c'est l'expression mathématique qui seule, permet de penser le phénomène. » Le Nouvel Esprit scientifique, pages 57-58. PUF). • Est-ce que leur utilisation est légitime? Si oui par rapport à quoi? Si non par rapport à quoi? — Il est important de savoir que le « réel » ne s'adapte pas toujours très bien aux structures mathématiques (du moins existantes). Ce qu'affirmait par exemple Einstein : « Pour autant que les propositions de la Mathématique se rapportent à la réalité, elles ne sont pas certaines et pour autant qu'elles sont certaines, elles ne se rapportent pas à la réalité ». - Combien d'essais de généralisations, de mathématisations, dont l'histoire de la science du XXe siècle est remplie, qui n'ont pas réussi à rejoindre le réel? Il est sans doute utile de souligner ici l'existence d'une réalité physique qui « résiste » à notre connaissance. — Galilée a donné la forme de la nouvelle science (la physique « mathématisée ») en écrivant qu'elle devait s'occuper de « mesurer tout ce qui peut se mesurer, et faire en sorte qu'on puisse mesurer ce qui ne peut pas l'être directement ». — Or on ne peut mesurer que des variations — et encore comme le savait parfaitement Galilée, seulement les unes par rapport aux autres. (Par exemple la « force » en physique n'est pas une notion magique; c'est très exactement un « principe de variations ».) La question qui se pose est alors de savoir — comme il est postulé par Galilée — si l'univers n'est que variations, n'est que relations.

— Soulignons ici qu'il semble que ce soit là une position « idéaliste » au sens philosophique du terme, ce qui indique l'enjeu philosophique de la réflexion induite par le sujet. — Prendre garde au fait que depuis plus d'un demi-siècle maintenant les théories physiques se sont peu à peu converties en un système de lois statistiques. Ce sont des lois de probabilité qui apparaissent comme les plus « proches des faits » (dans l' « infiniment grand » et l' « infiniment petit »). D'où question : la physique contemporaine nous parle-t-elle de l' « Être réel » ou de l' « Être probable »? — D'autre part une réflexion sur ce qui se passe en microphysique peut nous amener à nous demander si lorsque l'expérimentateur « observe » un fait, il ne le « fabriquerait » pas (du moins dans une certaine mesure). (Cf. ce qui a conduit au « principe d'indétermination ».) Or qu'y a-t-il de plus éloigné de « connaître la Réalité» que « faire » la Réalité? Dans le même ordre d'idées, Bachelard indique que la science moderne travaille sur des phénomènes factices. Par exemple : « Sans l'homme sur la terre pas d'autres causalités électriques que celle qui va de la foudre au tonnerre : un éclair et un bruit. Seule la société peut lancer de l'électricité dans un fil; seule elle peut donner aux phénomènes électriques la causalité linéaire du fil... » L'Activité rationaliste de la physique contemporaine (PUF), page 221. • Nietzsche pense l'utilisation des mathématiques dans la science comme effet d'une ontologie et d'un pragmatisme caractéristiques de l'esprit plébéien (non noble). « La « science », telle qu'on la pratique de nos jours, est un essai de créer pour tous les phénomènes un langage chiffré commun, qui permette de calculer, donc de dominer plus aisément la nature. Mais ce langage chiffré qui résume toutes les « lois » observées n'explique rien — c'est une sorte de description des faits aussi brève (aussi abrégée) que possible. » Extrait de : Volonté de Puissance, tome I, livre II, § 349. « Les « savants » croient que le monde doit avoir sa mesure dans nos petites échelles, et son équivalence dans notre petite pensée... Eh quoi? Voudrions-nous vraiment laisser dégrader ainsi l'existence? La rabaisser au rang de composition de calcul, en faire un petit pensum pour mathématiciens? Il faut d'abord refuser à tout prix de la dépouiller de son caractère protéique; c'est le bon goût qui l'exige, messieurs, le respect de tout ce qui dépasse votre horizon! » Extrait de : Le Gai Savoir, livre V, § 373. — Consulter Le Problème de la vérité dans la philosophie de Nietzsche de Granier (Seuil), notamment le chapitre I : Métaphysique et Vérité et tout spécialement le sous-chapitre II : Le Rationalisme scientifique conséquence de la Métaphysique.

« THÈMES DE RÉFLEXION • Est-ce que les mathématiques ne servent à rien? — Est-ce qu'on ne les utilisent pas pour certaines pratiques (scientifiques ou techniques)? — Est-ce que leur utilisation est indispensable? « L'univers ne peut se comprendre si Ton n'a préalablement appris la langue, et à en connaître les caractères employés pour l'écrire.

Ce livre est écrit dans la langue mathématique : ses caractères sont des triangles, des cercles et d'autres figures géométriques, sans l'intermédiaire desquels il est impossible d'en comprendre humainement un seul mot.

» Saggiatore, Galilée. — Les Mathématiques sont instruments de recherche et de découverte : grâce à la substitution d'un faisceau de relations intelligibles aux objets ou phénomènes naturels, sont rendus possibles des rapprochements originaux, des déductions fécondes.

Par le calcul, on peut anticiper des lois et même découvrir des faits nouveaux exigés par l'analyse mathématique avant que l'expérience ait pu les révéler. Cf.

Bachelard : « Par exemple l'outil tensoriel est un merveilleux opérateur de généralité; à le manier, l'esprit acquiert des capacités nouvelles de généralisation...

Dans la nouvelle science relativiste, un unique symbole mathématique dont la signification est prolixe désigne les mille traits d'une Réalité cachée : la pensée est un programme d'expériences à réaliser...

Le calcul tensoriel...

est un instrument mathématique qui crée la science physique contemporaine comme le microscope crée la microbiologie.

» Le Nouvel Esprit scientifique, pages 58 et 59 (PUF). - Remarquer que pour Bachelard (et pour Galilée?) les mathématiques ne sont pas une langue en ce sens qu'elles ne sont pas un simple moyen d'expression, une langue artificielle que l'on utiliserait « après coup ». « On a répété sans fin que les mathématiques étaient un langage, un simple moyen d'expression.

On s'est habilité à les considérer comme des outils il la disposition d'une raison consciente d'elle-même, maîtresse d'idées pures douées d'une clarté anté-mathématique...

en réalité...

c'est l'effort mathématique qui forme l'axe de la découverte, c'est l'expression mathématique qui seule, permet de penser le phénomène.

» Le Nouvel Esprit scientifique, pages 57-58.

PUF). • Est-ce que leur utilisation est légitime? Si oui par rapport à quoi? Si non par rapport à quoi? — Il est important de savoir que le « réel » ne s'adapte pas toujours très bien aux structures mathématiques (du moins existantes). Ce qu'affirmait par exemple Einstein : « Pour autant que les propositions de la Mathématique se rapportent à la réalité, elles ne sont pas certaines et pour autant qu'elles sont certaines, elles ne se rapportent pas à la réalité ». - Combien d'essais de généralisations, de mathématisations, dont l'histoire de la science du XXe siècle est remplie, qui n'ont pas réussi à rejoindre le réel ? Il est sans doute utile de souligner ici l'existence d'une réalité physique qui « résiste » à notre connaissance. — Galilée a donné la forme de la nouvelle science (la physique « mathématisée ») en écrivant qu'elle devait s'occuper de « mesurer tout ce qui peut se mesurer, et faire en sorte qu'on puisse mesurer ce qui ne peut pas l'être directement ». — Or on ne peut mesurer que des variations — et encore comme le savait parfaitement Galilée, seulement les unes par rapport aux autres.

(Par exemple la « force » en physique n'est pas une notion magique; c'est très exactement un « principe de variations ».) La question qui se pose est alors de savoir — comme il est postulé par Galilée — si l'univers n'est que variations, n'est que relations. — Soulignons ici qu'il semble que ce soit là une position « idéaliste » au sens philosophique du terme, ce qui indique l'enjeu philosophique de la réflexion induite par le sujet. — Prendre garde au fait que depuis plus d'un demi-siècle maintenant les théories physiques se sont peu à peu converties en un système de lois statistiques.

Ce sont des lois de probabilité qui apparaissent comme les plus « proches des faits » (dans l' « infiniment grand » et l' « infiniment petit »).

D'où question : la physique contemporaine nous parle-t-elle de l' « Être réel » ou de l' « Être probable »? — D'autre part une réflexion sur ce qui se passe en microphysique peut nous amener à nous demander si lorsque l'expérimentateur « observe » un fait, il ne le « fabriquerait » pas (du moins dans une certaine mesure). (Cf.

ce qui a conduit au « principe d'indétermination ».) Or qu'y a-t-il de plus éloigné de « connaître la Réalité» que « faire » la Réalité? Dans le même ordre d'idées, Bachelard indique que la science moderne travaille sur des phénomènes factices. Par exemple : « Sans l'homme sur la terre pas d'autres causalités électriques que celle qui va de la foudre au tonnerre : un éclair et un bruit.

Seule la société peut lancer de l'électricité dans un fil; seule elle peut donner aux phénomènes électriques la causalité linéaire du fil...

» L'Activité rationaliste de la physique contemporaine (PUF), page 221. • Nietzsche pense l'utilisation des mathématiques dans la science comme effet d'une ontologie et d'un pragmatisme caractéristiques de l'esprit plébéien (non noble). « La « science », telle qu'on la pratique de nos jours, est un essai de créer pour tous les phénomènes un langage chiffré commun, qui permette de calculer, donc de dominer plus aisément la nature.

Mais ce langage chiffré qui résume toutes les « lois » observées n'explique rien — c'est une sorte de description des faits aussi brève (aussi abrégée) que possible.

» Extrait de : Volonté de Puissance, tome I, livre II, § 349. « Les « savants » croient que le monde doit avoir sa mesure dans nos petites échelles, et son équivalence dans notre petite pensée...

Eh quoi? Voudrions-nous vraiment laisser dégrader ainsi l'existence? La rabaisser au rang de composition de calcul, en faire un petit pensum pour mathématiciens? Il faut d'abord refuser à tout prix de la dépouiller de son caractère protéique; c'est le bon goût qui l'exige, messieurs, le respect de tout ce qui dépasse votre horizon! » Extrait de : Le Gai Savoir, livre V, § 373. — Consulter Le Problème de la vérité dans la philosophie de Nietzsche de Granier (Seuil), notamment le chapitre I : Métaphysique et Vérité et tout spécialement le sous-chapitre II : Le Rationalisme scientifique conséquence de la Métaphysique.. »

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