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Aristote

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Il y a identité du juste et de l'équitable, et tous deux sont bons, bien que l'équitable soit le meilleur des deux. Ce qui fait la difficulté, c'est que l'équitable, tout en étant juste, n'est pas le juste selon la loi, mais un correctif de la justice légale. La raison en est que la loi est toujours quelque chose de général, et qu'il y a des cas d'espèces pour lesquels il n'est pas possible de poser un énoncé général qui s'y applique avec rectitude. Dans les matières, donc, où on doit nécessairement se borner à des généralités et où il est impossible de le faire correctement, la loi ne prend en considération que les cas les plus fréquents, sans ignorer d'ailleurs les erreurs que cela peut entraîner. La loi n'en est pas moins sans reproche, car la faute n'est pas à la loi, ni au législateur, mais tient à la nature des choses, puisque par leur essence même la matière des choses de l'ordre pratique revêt ce caractère d'irrégularité. Quand, par suite, la loi pose une règle générale, et que là-dessus survient un cas en dehors de la règle générale, on est alors en droit, là où le législateur a omis de prévoir le cas et a péché par excès de simplification, de corriger l'omission et de se faire l'interprète de ce qu'eût dit le législateur lui-même s'il avait été présent à ce moment, et de ce qu'il aurait porté dans sa loi s'il avait connu le cas en question. De là vient que l'équitable est juste, et qu'il est supérieur à une certaine espèce de juste, non pas supérieur au juste absolu, mais seulement au juste où peut se rencontrer l'erreur due au caractère absolu de la règle. Telle est la nature de l'équitable : c'est d'être un correctif de la loi, là où la loi a manqué de statuer à cause de sa généralité. Aristote

« PRESENTATION DE L' "ETHIQUE A NICOMAQUE" DE ARISTOTE Au regard de la tripartition du savoir classique dans l'Antiquité (logique, physique et éthique), l'Éthique à Nicomaque constitue l'oeuvre la plus aboutie de la partie éthique.

En délimitant le champ des affaires humaines par exclusion de la nature et du divin, elle constitue le premier effort pour penser l'action humaine de manière immanente et autonome et lui reconnaître ainsi une positivité ontologique.

Aristote (384-322 av.

J.-C.) y opère en effet une critique de ses prédécesseurs, qui ne voient dans l'action humaine qu'un domaine d'application pour des principes extérieurs, que ce soient les dieux de la pensée tragique, les formes platoniciennes ou plus pragmatiquement, les techniques de la sophistique. ARISTOTE : DISTINGUER LE JUSTE ET L'ÉQUITABLE La justice est l'application de la loi.

Mais l'application stricte et pour ainsi dire mécanique de la loi peut, paradoxalement, produire des injustices : un jugement peut être juste selon la loi, mais non équitable.

Cependant, observe Aristote, il n'y a pas pour autant d'opposition entre l'équitable et le légal, car l'équitable n'est en fait que le correctif de la loi, sa forme la plus achevée. « Il y a identité du juste et de l'équitable, et tous deux sont bons, bien que l'équitable soit le meilleur des deux.

Ce qui fait la difficulté, c'est que l'équitable, tout en étant juste, n'est pas le juste selon la loi, mais un correctif de la justice légale.

La raison en est que la loi est toujours quelque chose de général, et qu'il y a des cas d'espèces pour lesquels il n'est pas possible de poser un énoncé général qui s'y applique avec rectitude.

Dans les matières, donc, où on doit nécessairement se borner à des généralités et où il est impossible de le faire correctement, la loi ne prend en considération que les cas les plus fréquents, sans ignorer d'ailleurs les erreurs que cela peut entraîner.

La loi n'en est pas moins sans reproche, car la faute n'est pas à la loi, ni au législateur, mais tient à la nature des choses, puisque par leur essence même la matière des choses de l'ordre pratique revêt ce caractère d'irrégularité.

Quand, par suite, la loi pose une règle générale, et que là-dessus survient un cas en dehors de la règle générale, on est alors en droit, là où le législateur a omis de prévoir le cas et a péché par excès de simplification, de corriger l'omission et de se faire l'interprète de ce qu'eût dit le législateur luimême s'il avait été présent à ce moment, et de ce qu'il aurait porté dans sa loi s'il avait connu le cas en question.

De là vient que l'équitable est juste, et qu'il est supérieur à une certaine espèce de juste, non pas supérieur au juste absolu, mais seulement au juste où peut se rencontrer l'erreur due au caractère absolu de la règle.

Telle est la nature de l'équitable : c'est d'être un correctif de la loi, là où la loi a manqué de statuer à cause de sa généralité.

» ARISTOTE, Éthique à Nicomaque, V, 10. Ordre des idées 1) Un problème : n'y a-t-il pas contradiction à distinguer entre "le juste" (c'est-à-dire ce qui est simplement conforme à la loi, ce qui est légal) et "l'équitable" (ce qui est juste sans être rigoureusement conforme à la loi) ? 2) Solution : l'équité ne s'oppose pas à la justice légale, mais la parachève car elle en est le correctif. 3) Explication : la loi étant par définition générale, elle ne peut prévoir tous les cas particuliers ; il est donc nécessaire que la loi soit précisée ou corrigée en fonction des cas particuliers : l'équité est une application de la justice légale qui tient compte de la particularité de chacun. Dans ce texte, Aristote montre comment la loi, parce qu'elle est générale, ne considère pas les cas particuliers, ce que doit faire le juge, par contre, s'il veut être équitable. La loi est générale, parce que le législateur a en vue un principe d'organisation général de la société.

Le pouvoir législatif ne saurait prononcer sur des cas particuliers.

Mais il en va autrement du pouvoir judiciaire.

Le juge doit en effet apprécier chaque cas pour appliquer la loi.

C'est cet aspect de la justice qu'Aristote analyse ici.

Il ne remet pas en question la loi, ni le législateur, mais montre qu'il peut y avoir contradiction entre la nature générale de la loi et la nature individuelle du cas.

Les circonstances d'un cas peuvent être telles que l'application de la loi à la lettre en contredirait l'esprit.

Pour rendre justice, le juge doit alors interpréter la loi.

Si cette interprétation est conforme à l'esprit de la loi, elle est équité.

L'équité est alors une forme de justice supérieure à celle qui se contenterait d'appliquer la loi.

La justice relève non seulement du juste, comme norme, c'est-à-dire comme loi, mais du jugement.

C'est pourquoi le légalisme est ici insuffisant. Quelle est l'idée directrice de ce texte ? Mettez en évidence les principales étapes de son argumentation. »

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