Aristote
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«
PRESENTATION DE L' "ETHIQUE A NICOMAQUE" DE ARISTOTE
Au regard de la tripartition du savoir classique dans l'Antiquité (logique, physique et éthique), l'Éthique à Nicomaque
constitue l'oeuvre la plus aboutie de la partie éthique.
En délimitant le champ des affaires humaines par exclusion de la
nature et du divin, elle constitue le premier effort pour penser l'action humaine de manière immanente et autonome et
lui reconnaître ainsi une positivité ontologique.
Aristote (384-322 av.
J.-C.) y opère en effet une critique de ses
prédécesseurs, qui ne voient dans l'action humaine qu'un domaine d'application pour des principes extérieurs, que ce
soient les dieux de la pensée tragique, les formes platoniciennes ou plus pragmatiquement, les techniques de la
sophistique.
"De la justice particulière et du juste qui y correspond, une première
espèce est celle qui intervient dans la distribution des honneurs, ou des
richesses, ou des autres avantages qui se répartissent entre les
membres de la communauté politique (car dans ces avantages il est
possible que l'un des membres ait une part ou inégale ou égale à celle
d'un autre), et une seconde espèce est celle qui réalise la rectitude dans
les transactions privées (...).
Cette forme du juste a un caractère
spécifique différent de la précédente.
En effet, le juste distributif des
biens possédés en commun s'exerce toujours selon la proportion dont
nous avons parlé' (puisque si la distribution s'effectue à partir des
richesses communes, elle se fera suivant la même proportion qui a
présidé aux apports respectifs des membres de la communauté ; et
l'injuste opposé à cette forme du juste est ce qui est dehors de la dite
proportion).
Au contraire, le juste dans les transactions privées, tout en
étant une sorte d'égal, et l'injuste une sorte d'inégal, n'est cependant pas
l'égal selon la proportion de tout à l'heure, mais selon la proportion
arithmétique.
Peu importe, en effet, que ce soit un homme de bien qui ait
dépouillé un malhonnête homme, ou un malhonnête homme un homme
de bien, ou encore qu'un adultère ait été commis par un homme de bien
ou par un malhonnête homme : la loi n'a égard qu'au caractère distinctif
du tort causé, et traite les parties à égalité, se demandant seulement si
l'une a commis, et l'autre subi, une injustice, ou si l'une a été l'auteur et l'autre la victime d'un dommage.
Par
conséquent, cet injuste dont nous parlons, qui consiste dans une inégalité, le juge s'efforce de l'égaliser : en
effet, quand l'un a reçu une blessure et que l'autre est l'auteur de la blessure, ou quand l'un a commis un
meurtre et que l'autre a été tué, la passion et l'action ont été divisées en parties inégales ; mais le juge
s'efforce, au moyen du châtiment, d'établir l'égalité, en enlevant le gain obtenu.
" ARISTOTE.
Dans ce célèbre passage, Aristote distingue deux formes de justice ou d'égalité : l'égalité géométrique, qui est une
proportion, et l'égalité arithmétique.
La première renvoie à la justice, considérée comme ordre social, la seconde à la
justice entre individus.
POUR MIEUX COMPRENDRE LE TEXTE
La justice, c'est l'égalité.
Soit, mais l'égalité elle-même peut se comprendre de deux manières.
L'égalité arithmétique
est l'égalité entre deux termes.
L'égalité géométrique est l'égalité entre deux rapports.
L'image du gâteau peut aider à
comprendre cette distinction.
Deux parts de gâteau peuvent être égales, d'une égalité arithmétique.
Mais on peut
aussi considérer que l'égalité est réalisée si les parts distribuées sont proportionnelles au mérite (ou au poids...) de
ceux entre lesquels il doit être partagé.
L'égalité ici sera dite géométrique.
Aristote considère que, dans le cas de la justice distributive, c'est-à-dire de l'égalité géométrique, il est normal de
donner plus à ceux qui contribuent le plus, par leur mérite, par leurs fonctions ou par leurs biens, au bon
fonctionnement de la société.
Mais cela peut être discuté.
Dans le cas de la justice corrective, c'est-à-dire de la justice qui réalise l'égalité arithmétique, on ne tient pas compte
des apports des individus à la société ni de leur mérite.
Ils sont considérés comme des individus abstraits.
Aristote
appelle cette forme de justice « corrective » parce qu'elle rétablit un équilibre, plus qu'elle n'établit un ordre.
Qu'il soit,
par ailleurs, riche ou pauvre, bon père de famille ou dévoyé, celui qui cause un tort à autrui doit le réparer.
Cela aussi
peut être discuté.
Soit qu'on tienne compte du mérite, ou de tout autre facteur, soit qu'on n'en tienne pas compte, dans les deux cas il
semble bien que la justice ne soit jamais tout à fait réalisée.
Le mérite de ce texte d'Aristote est de montrer, en tous cas, que la question de la justice et de l'égalité est une
question complexe qui doit être débattue.
La justice selon Aristote..
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