Aristote
Extrait du document
«
ARISTOTE : DANGER DE L'AMBIGUÏTÉ DU LANGAGE
Parce que le langage est l'instrument de la pensée, la pensée peut être induite en erreur par les défauts
du langage.
Aristote explique ici la raison de l'ambiguïté du langage, l'une des principales source des
faux raisonnements.
« Puisqu'il n'est pas possible d'apporter dans la discussion les choses elles-mêmes, mais qu'au lieu des
choses nous devons nous servir de leurs noms comme de symboles, nous supposons que ce qui se
passe dans les noms se passe aussi dans les choses, comme dans le cas des cailloux qu'on rapporte au
compte.
Or, entre noms et choses, il n'y a pas ressemblance complète : les noms sont en nombre limité,
ainsi que la pluralité des définitions, tandis que les choses sont infinies en nombre.
Il est, par suite,
inévitable que plusieurs choses soient signifiées et par une même définition et par un seul et même
nom.
Par conséquent, de même que, dans l'exemple ci-dessus, ceux quine sont pas habiles à manipuler
leurs cailloux sont trompés par ceux qui savent s'en servir, ainsi en est-il pour les arguments : ceux qui
n'ont aucune expérience de la vertu significative des noms font de faux raisonnements, à la fois en
discutant eux-mêmes et en écoutant les autres.
» ARISTOTE, Réfutations sophistiques, 165 a
ordre des idées
1) Une remarque générale : Parler présuppose qu'il y a une correspondance (au moins possible) entre le
discours et la réalité.
2) Le problème : Il ne peut y avoir une adéquation parfaite entre les signes linguistiques (les mots) et les choses, car ces signes sont en
nombre limité tandis que les choses sont « infinies en nombre » (alors qu'il faudrait qu'à un signe corresponde une chose et une seule).
Il y
aura nécessairement polysémie, homonymie, etc., et donc ambiguïté.
3) Conséquence : Cette ambiguïté du langage conduit à faire de faux raisonnements, soit involontairement soit volontairement (comme
dans le cas de la sophistique).
Idée centrale du texte
L'ambiguïté (le caractère équivoque) du langage est source d'erreur (de faux raisonnements).
Articulation formelle du texte
1)
2)
3)
4)
Puisqu'il ...
mais qu' ...
nous supposons que ...
Or ...
Il est par suite ...
Par conséquent, de même que ...
ainsi...
Mouvement des idées
1) Par nécessité, nous usons de mots, qui sont des symboles des choses (= des signes).
2) Il ne peut y avoir adéquation parfaite du langage au réel (car ces symboles sont en nombre limités, non les choses).
3) Il y aura donc une polysémie ou une homonymie des mots.
4) Cette polysémie et cette homonymie peuvent conduire à de faux raisonnements (parasyllogismes) volontaires (emploi sophistique du
langage) ou involontaires.
Intérêt philosophique du texte
Il est double :
a) Du point de vue de la connaissance, il s'agit de savoir si le langage est ou n'est pas fondamentalement inconsistant (son équivocité étant
non seulement lexicale, mais aussi syntaxique), et donc s'il convient de créer des langages artificiels rigoureux (cf.
Carnap et le positivisme
logique) ou simplement de définir les règles d'un « bon usage » du langage ordinaire (cf.
la philosophie analytique, école d'Oxford).
b) Du point de vue de l'action, il pose le problème du pouvoir des mots (de tromper), de l'utilisation du langage à des fins de domination
(sa violence étant subreptice).
thèse exposée dans le texte
Les arguments sophistiques sont des parasyllogismes (syllogismes apparents) fondés sur l'ambiguïté des mots.
argumentation
Les mots sont des signes (symboles).
Il ne peut y avoir adéquation parfaite du langage au réel.
Les faux raisonnements reposent sur la polysémie ou l'homonymie des mots.
(En fait selon Aristote, les sophistes usent de l'homonymie,
de l'amphibologie, de la prosodie, de la combinaison, de la division et de la forme même des mots.) Ex.
: Tout ce qui est rare est cher, un
cheval bon marché est rare, donc un cheval bon marché est cher.
Pour d'autres exemples de sophismes, cf.
l'Euthydème de Platon.
enjeu du texte
• Problèmes :
- de la définition des lois permettant le bon usage du langage (cf.
la Logique d'Aristote) ;
- de la création d'une « langue rigoureuse » susceptible d'éliminer les faux raisonnements.
Cf.
sujet n° 41.
(Remarque : Aristote ne s'est-il
pas fait prendre lui-même au piège du langage, en prenant par exemple les catégories propres au grec pour des genres de l'être ? Cf.
sujet
n° 37.)
• Problème de la sophistique comme instrument politique..
»
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