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alain et l'astronomie

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« J'ai vu la lune dans des lunettes; et ce n'était pas désagréable. Pourtant la vue de ces montagnes éclairées par le soleil ne m'a pas instruit. Car il y a un ordre à suivre et je n'en étais point là, mais plutôt à suivre la vagabonde d'étoile en étoile, et à bien marquer son chemin. Et, malgré tant d'observations, qui me rendaient peu à peu vraiment attentif à ce qui importe, la chose ne m'est pas encore familière. Autant à dire du soleil, des étoiles, des planètes; je les veux loin. La curiosité animale me pousserait à les voir grossies ou rapprochées; mais la curiosité humaine veut s'en tenir encore aux premières apparences, afin que les rapports les plus simples ne soient pas troublés. Le fameux Tycho-Brahé (1) ne voulait point se servir de lunettes; il s'en tenait aux réglettes orientées et aux fils tendus. Si les bergers Chaldéens (2) avaient eu nos puissants télescopes, ils n'auraient rien appris de la science maîtresse. Il n'est pas bon que le pouvoir d'observer se développe plus vite que l'art d'interpréter. » ALAIN (1) Tycho-Brahé est un astronome à la fin du xvi siècle. (2) Ce peuple de l'Antiquité passe pour avoir fondé l'astronomie.

•    Pourquoi Alain écrit-il : «La vue de ces montagnes éclairées par le soleil ne m'a pas instruit »? •    Pourquoi les veut-il « loin »? •    Différence(s) — selon Alain — entre la curiosité animale et la curiosité humaine ?

•    Pourquoi — selon Alain — si les bergers chaldéens avaient eu nos puissants téléscopes ils n'auraient rien appris de la science maîtresse? —    Rapport entre « loin » et « rapports les plus simples »? —    Quel est le nom de cette « science maîtresse »? —    Pourquoi « science maîtresse »? •    Qu'est-ce que Alain veut faire apparaître? —    Qu'en pensez-vous ?

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La question de la procédure dans l’apprentissage, notamment dans la démarche scientifique ou connaissante a toujours été d’une très grande importance. L’homme est un individu qui ne se contente pas de vivre dans le monde, mais il cherche aussi la vérité, la réponse aux questions pourquoi et comment. L’homme a une conscience, ce qui le met à distance du monde. Il n’est plus une chose parmi les choses, mais il se place devant le monde et lui pose des questions. De fait, puisque la vérité se pose comme un but aux hommes, il s’agit de poser les méthodes et les critères pour y arriver. La connaissance est alors une entreprise humaine à laquelle il faut réfléchir mais qu’il faut pouvoir guider. C’est bien ici le propos d’Alain, dit Emile Chartrier, dans ce texte extrait des Propos sur l’éducation. Celui-ci se double d’une réflexion plus moderne sur les relations à l’observation. Avec l’introduction de la méthode « moderne » introduite par Galilée, l’observation prend une grande place dans la découverte mais tous ne sont pas d’accord sur son importance, sa primauté. Les philosophes empiristes ont bien sûr défendu l’observation comme base de toute connaissance. Il s’agirait d’observer le plus grand nombre de faits, de les collecter et d’en déduire des lois générales sur le fonctionnement du monde. Alain, ici, cherche à comprendre comment l’observation peut être utile, les limites à lui assigner. L’utilisation de l’astronomie n’est d’ailleurs pas anodine puisqu’elle est le symbole même des sciences d’observation. Pourquoi Alain ici, rejette l’astronomie ? A quelle idée ou démarche l’observation est-elle ici subordonnée ?

 

 

« « J\'ai vu la lune dans des lunettes; et ce n\'était pas désagréable.

Pourtant la vue de ces montagnes éclairées par le soleil ne m\'a pas instruit.

Car il y a un ordre à suivre et je n\'en étais point là, mais plutôt à suivre la vagabonde d\'étoile en étoile, et à bien marquer son chemin.

Et, malgré tant d\'observations, qui me rendaient peu à peu vraiment attentif à ce qui importe, la chose ne m\'est pas encore familière.

Autant à dire du soleil, des étoiles, des planètes; je les veux loin.

La curiosité animale me pousserait à les voir grossies ou rapprochées; mais la curiosité humaine veut s\'en tenir encore aux premières apparences, afin que les rapports les plus simples ne soient pas troublés.

Le fameux Tycho-Brahé (1) ne voulait point se servir de lunettes; il s\'en tenait aux réglettes orientées et aux fils tendus.

Si les bergers Chaldéens (2) avaient eu nos puissants télescopes, ils n\'auraient rien appris de la science maîtresse.

Il n\'est pas bon que le pouvoir d\'observer se développe plus vite que l\'art d\'interpréter.

» La question de la procédure dans l'apprentissage, notamment dans la démarche scientifique ou connaissante a toujours été d'une très grande importance.

L'homme est un individu qui ne se contente pas de vivre dans le monde, mais il cherche aussi la vérité, la réponse aux questions pourquoi et comment.

L'homme a une conscience, ce qui le met à distance du monde.

Il n'est plus une chose parmi les choses, mais il se place devant le monde et lui pose des questions.

De fait, puisque la vérité se pose comme un but aux hommes, il s'agit de poser les méthodes et les critères pour y arriver.

La connaissance est alors une entreprise humaine à laquelle il faut réfléchir mais qu'il faut pouvoir guider.

C'est bien ici le propos d'Alain, dit Emile Chartrier, dans ce texte extrait des Propos sur l'éducation. Celui-ci se double d'une réflexion plus moderne sur les relations à l'observation.

Avec l'introduction de la méthode « moderne » introduite par Galilée, l'observation prend une grande place dans la découverte mais tous ne sont pas d'accord sur son importance, sa primauté.

Les philosophes empiristes ont bien sûr défendu l'observation comme base de toute connaissance.

Il s'agirait d'observer le plus grand nombre de faits, de les collecter et d'en déduire des lois générales sur le fonctionnement du monde.

Alain, ici, cherche à comprendre comment l'observation peut être utile, les limites à lui assigner.

L'utilisation de l'astronomie n'est d'ailleurs pas anodine puisqu'elle est le symbole même des sciences d'observation.

Pourquoi Alain ici, rejette l'astronomie ? A quelle idée ou démarche l'observation est-elle ici subordonnée ? I L'observation ne nous rend pas les choses familières 1. Différence science d'observation et science expérimentale Claude Bernard, au début de son ouvrage Introduction à la médecine expérimentale, essaie de distinguer l'observation de l'expérimentation.

Il souligne ainsi divers aspects de l'observateur, notamment sa passivité, sa nonintervention sur le cours de la nature.

Son propos vise bien entendu à montrer que la médecine est une science expérimentale par nature et qu'il ne faut en aucun cas s'offusquer d'expériences médicales.

Pour cela, il fait deux catégories : la première, les sciences d'observation, n'ont pas leur objet à leur portée et pour cela ne saurait faire appel à une quelconque intervention ou expérience, la seconde, les sciences qui peuvent manipuler leur objet et jouer sur les paramètres pour en étudier le fonctionnement.

Il va sans dire que l'astronomie est le paradigme même de la première catégorie.

L'astronome ne peut en aucun cas toucher son objet, lui faire faire ce qu'il veut.

Alain dans Eléments de philosophie, dans la partie consacrée à l'observation, distingue l'observation qui consiste « à percevoir avec attention » alors qu'expérimenter, c'est « changer la chose pour voir ce qui résultera du changement.

» En ce sens, seule l'astronomie peut prétendre ) une observation pure et séparée.

D'ailleurs, l'astronomie a souvent été rangé aux côtés des mathématiques et de la géométrie comme si l'expérience empirique n'était pas nécessaire pour elle.

D'où un statut suprême qui lui est conféré.

Alain l'évoque même comme « science maîtresse ».

Il est vrai que l'astronomie est une des sciences où la prévision a été très tôt possible et exacte.

La rotation des astres a toujours été considérée comme l'équilibre harmonieux, divin qu'il s'agirait pour l'homme de suivre.

Toujours est-il que si Alain, ici, utilise l'exemple de la lune et donc l'astronomie, c'est pour introduire le thème de l'observation. 2. L'observation à la lunette n'instruit pas Alain regarde donc au début du texte au travers de lunettes astronomiques et ça remarque sur l'agréable de la chose donne une certaine valeur esthétique à cette observation.

Regarder la lune grossie peut être considérer comme beau, cela plaît en tout cas.

Mais cette concession esthétique n'est là que pour marquer les limites de son observation.

Cette dernière ne lui a rien appris.

Le vocabulaire employée pour décrire la lune, dans une périphrase marque cette non scientificité.

L'auteur utilise l'expression « montagnes éclairées par le soleil » qui est plus proche d'une description poétique de la lune que d'un vocabulaire scientifique.

On retrouve ici une thèse défendue par Alain notamment dans le passage qui précède ce texte.

Un objet nouveau touche d'abord l'imagination et non la raison. L'objet est donc conçu non pas tel qu'il est mais il est sur-valorisé par ce que l'imagination, la poésie y met. Bachelard défend d'ailleurs un point de vue que l'on peut reprocher quand il affirme que la première expérience est contraire à l'attitude scientifique.

Elle « se présente comme un livre d'images : elle est pittoresque, concrète, vivante, facile.

Il n'y a qu'à la décrire et à s'émerveiller », écrit-il dans La formation de l'esprit scientifique. 3.

L'observation à la lunette ne nous rend pas les choses familières. Alain multiplie donc les observations, avec patience pour pouvoir passer au-dessus de cette première impression « poétique » et emplie d'imaginaire.

Ce que nous montre l'expression « après tant d'observations ».

Il ne se contente pas d'une seule observation.

Pourtant, nous dit-il, cela n'a pas plus de succès.

Certes, il arrive maintenant à distinguer les choses importantes, à évacuer les détails, les excès d'imagination.

Son regard s'est aiguisé mais cela ne lui rend pas la chose « familière ».

Qu'est-ce que cela veut dire ? Alain utilise un peu plus tôt, l'exemple du train. Il faut certes être attentif mais il faut voyager souvent pour connaître les embranchements, les secousses, les voies principales de la ligne.

Tout se passe alors comme si, l'observation à travers les lunettes dans l'astronomie ne. »

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