Alain
Extrait du document
«
L'Inconscient est une méprise sur le Moi, c'est une idolâtrie du corps.
On a peur de son
Inconscient ; là se trouve logée la faute capitale.
Un autre Moi me conduite qui me
connaît et que je connais mal.
L'hérédité est un fantôme du même genre.
« Voilà mon
père qui se réveille, voilà celui qui me conduit.
Je suis par lui possédé » [...] On voit
que toute l'erreur consiste à gonfler un terme technique qui n'est qu'un genre de folie.
La vertu de l'enfance est une simplicité qui fuit de telles pensées [...] Encore faut-il
apprendre à ne pas trop croire à cette hérédité, qui est un type d'idée creuse ; c'est
croire qu'une même vie va recommencer.
Au contraire, vertu, c'est se dépouiller de
cette vie prétendue, c'est partir de zéro.
« Rien ne m'engage ».
« Rien ne me force ».
« Je pense, donc je suis ».
Cette démarche est un recommencement.
Je veux ce que
je pense et rien de plus.
• Alain considère l'hypothèse freudienne comme une erreur.
Cette erreur repose sur
une méprise, celle du corps : la pulsion est d'origine biologique, donc les phénomènes
attribués à l'Inconscient ne relèvent en fait que du corps.
Par exemple, le lapsus n'est
alors que la manifestation de la fatigue physique, rien de plus.
Vouloir l'interpréter
différemment, c'est prendre le risque de l'excès, donc de l'erreur.
• Ce texte manifeste également le refus de concevoir le passé comme déterminant dans l'élaboration des conduites
humaines.
Déterminisme : caractère de ce
qui est déterminé, de ce qui
résulte
de
phénomènes
antérieurs.
Exemple
:
le
déterminisme de notre éducation
explique
en
partie
notre
comportement actuel.
Ensemble
des conditions nécessaires à la
production d'un phénomène donné
; lorsque ces conditions sont
réunies, le phénomène s'avère
inéluctable.
Exemple
:
le
déterminisme des lois de la
physique nous permet de prévoir
la trajectoire de la balle.
Conception philosophique d'après
laquelle, certaines conditions
étant réunies, les phénomènes
qui se produiront sont à la fois
inévitables et prévisibles.
Selon
cette doctrine, la nécessité est
la loi qui gouverne l'univers.
Contre Freud qui considérait notamment que « dans les trois ou quatre premières
années de la vie se fixent des impressions et s'établissent des modes de réactions au
monde extérieur, qu'aucun événement ultérieur ne peut plus dépouiller de leur force »,
Alain considère que la volonté est capable de rompre la logique d'un déterminisme
familial et culturel, et d'élaborer une existence nouvelle.
• Je puis ainsi vouloir ce que je pense ; rien ne saurait contredire la coïncidence de la
pensée et de la volonté.
La liberté est sauve au même titre que la responsabilité et la
morale : parce que l'homme peut être tenu pour responsable de ses actes (il ne saurait
invoquer l'Inconscient comme cause légitime de son action), il est moralement louable
ou blâmable.
Fortement inspiré de la métaphysique cartésienne et de la morale kantienne, Alain
souligne le caractère subversif de la notion d’inconscient freudien.
En ce qu’elle
concourt à la démobilisation, à la fuite de nos responsabilités face à la sphère éthique.
En effet, au nom de la liberté humaine, le philosophe humaniste ne saurait accepter
qu’un mécanisme corporel (ressortant de la chose étendue) vienne se substituer en
lieu et place de l’activité rationnelle définie comme lucidité et maîtrise de soi.
Mais, cette prééminence redonnée à la sacro-sainte volonté humaine, doit-elle
impérativement passer par un refus péremptoire de l’inconscient? La psychanalyse
n’est-elle pas dans sa démarche thérapeutique, une forme de renforcement de la
conscience aboutissant à une prise de conscience éclairée, raffermie de ses désirs, de
son agir , ...
, de soi?
Trois paragraphes scandent cet extrait des « Éléments de Philosophie ».
Dans le
premier, Alain définit l’homme par le libre arbitre et revoit l’inconscient à un processus
physiologique.
Ensuite, st souligné le vice moral inclus dans l’hypertrophie accordée
aux instincts du « ça ».
Et, le dernier paragraphe réaffirme la fin de non-recevoir accordée à ce qu’Alain nomme le «
diabolique conseiller ».
En exorde du texte, Alain corrobore la vision freudienne d’une opacité d l’âme, d’un désir romantique de dévoiler
l’irréductible mystère humain.
L’être ne se livre pas d’emblée, il s’agit de le découvrir dans son infinie complexité.
Et,
c’est à cette recherche qu’Alain va nous convier dans ce qui succède.
En effet, le terme d’inconscient défini comme étant un domaine échappant à la conscience, recèle un caractère à la
fois énigmatique et séditieux en ce qu’il véhicule certaines méconduites au sein de la sphère éthique.
Mais, Alain
commence déjà par dégager l’erreur (gnostique) avant la faute (morale).
La plus grave de ces représentations fallacieuses consiste à diviser notre psychisme, à superposer deux sujets, l’un
conscient, l’autre inconscient.
Dès lors, ce dernier se trouve substantifier, transformer en une deuxième puissance,
satanique et maléfique.
Ce second moi ou second sujet pensant est censé nous égarer, induire en nous des préjugés,
des pensées antérieures à toute réflexion: nous serions « pensés » en même temps que « pensée », « agis » plutôt qu’
»agent ».
En somme, l’inconscient ne serait qu’une chimère diabolique en ce que notre volonté et notre destin lui
seraient assujettis.
Ces quelques lignes ne sont pas sans nous faire songer au mythe de Faust pactisant avec le
diable.
Ce Faust des temps modernes serait selon Alain, Freud et sa répartition tripartite du psychisme en ça, moi et
surmoi..
»
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