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Ai-je le devoir de faire le bonheur des autres ?

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« Introduction et problématique: Lorsque nous aimons quelqu'un, nous sommes prêts à tout pour "faire son bonheur".

Le bonheur d'autrui est-il le but de ce que l'on nomme l'altruisme.

Avons-nous le devoir de faire le bonheur d'autrui ? Le bonheur d'autrui est-il le but même de mon action ou est-il concerné par les effets secondaires de mes actes ? Selon les réponses que l'on donne à cette question, on peut considérer que mon devoir est de veiller à mon propre bonheur sans faire le malheur d'autrui, ou de me consacrer directement au bonheur d'autrui, soit en contribuant à créer les conditions de son épanouissement, soit en lui octroyant ce qui le rend(rait) heureux. Nous examinerons dans un premier temps les différents stades de la bienveillance envers autrui, dont nous montrerons ensuite qu'elle est limitée par le respect pour la liberté d'autrui.

Enfin, nous verrons que le souci pour le bonheur des autres se réalise véritablement dans la réciprocité de la relation amicale. Égoïsme et altruisme L'exigence minimale de la morale consiste dans le renoncement à l'égoïsme pur et simple : je n'ai pas le devoir de renoncer à mon bonheur, mais de relativiser ce dernier par rapport aux autres.

On peut envisager plusieurs façons de prendre en compte le bonheur d'autrui dans la perception de son devoir. • Tenir compte d'autrui Une des formulations de l'impératif catégorique chez Kant est la suivante : « Agis de façon à traiter autrui toujours en même temps comme fin et jamais seulement comme moyen.

» Lorsque j'agis pour mon compte personnel, j'ai le devoir de me limiter aux actions qui n'entraînent pas le malheur d'autrui.

On peut parler d'une exigence déontologique : elle fixe les limites des actions moralement justifiées en imposant la condition du respect d'autrui. • Penser aux autres Puis-je me contenter de ne pas rendre les autres malheureux? Une telle attitude aboutit à une indifférence réciproque dont on peut penser qu'elle appauvrit les rapports entre les hommes.

La bienveillance est en revanche l'attitude qui consiste à souhaiter le bonheur d'autrui. a.

S'il s'agit d'une pure sympathie, elle ne peut être un devoir : je ne peux pas décider d'éprouver de la sympathie pour quelqu'un. b.

En tant qu'être raisonnable, j'ai en revanche conscience des désirs et des besoins de ceux qui m'entourent.

Mon « prochain » est la personne qu'il m'est donné de pouvoir aider.

Dans cette mesure, j'ai le devoir de contribuer au bonheur d'autrui. • Vivre pour autrui? Ai-je pour autant le devoir de me consacrer exclusivement au bonheur d'autrui? Cela reviendrait à renoncer totalement à ma propre aspiration au bonheur.

Kant nous rappelle qu'une telle ambition serait démesurée car si nous sommes des êtres rationnels nous demeurons également des êtres sensibles.

Il est illusoire et vain de prétendre nier cette sensibilité, qui d'ailleurs donne aux autres l'occasion de se montrer bienveillants envers moi. Deuxième partie: l'inaliénable liberté d'autrui. La bienveillance me fait désirer le bonheur d'autrui.

Mais cet altruisme se heurte à la liberté même de cet autre moi qui n'est pas moi. Kant a bien montré que le bonheur n'est pas un concept dont on pourrait fournir une définition générale, mais une représentation flottante au gré de l'imagination, différente pour chacun et si versatile que chacun est bien en peine de savoir ce qui le rendrait vraiment heureux.

Dès lors, il me sera d'autant plus difficile de savoir ce qui ferait le bonheur d'autrui.

Souvent nous avons une idée précise de la façon dont autrui devrait vouloir être heureux, mais se faisant nous risquons fort d'y investir, d'y projeter nos propres désirs, nos propres fantasmes...

et de ne pas respecter sa liberté. « Le problème qui consiste à déterminer d'une façon sûre et générale quelle action peut favoriser le bonheur d'un être raisonnable est un problème tout à fait insoluble.

» Kant, Fondements de la métaphysique des moeurs (1785).. »

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