A quelles conditions puis-je etre libre ?
Extrait du document
«
Que faut-il entendre par conditions de la liberté ? Il y a des conditions nécessaires et suffisantes de la liberté, c'est-à-dire
des conditions sans lesquelles aucune liberté n'est possible, conditions politiques, conditions psychologiques et morales,
conditions matérielles, mentales.
Ou faut-il penser au contraire, que l'homme peut être libre au-delà de toute ces
conditions, et posséder une liberté au-delà de toutes les contingences de la vie, et se cacher derrière les circonstances
serait de ce point de vue une preuve de fuite devant la liberté, car de ce point de vue, on peut attendre toute sa vie que
les conditions requises adviennent sans user de sa liberté.
La liberté est en vérité en acte, elle se prend mais ne se donne
pas.
1)Des conditions politiques pour la liberté ?
Pour La Boétie, auteur du Discours sur la Servitude volontaire en 1574, l'idée que les relations sociales ne doivent, en
aucune façon, entraver l'indépendance des individus, qui en sont les protagonistes.
S'il annonce le célèbre propos de
Rousseau, « L'homme est né libre et partout il est dans les fers », il outrepasse le constat désabusé auquel s'arrêtera le
philosophe des Lumières.
S'interrogeant sur cette aberration qui conduit un être, né pour pousser plus avant la liberté
dont les animaux jouissent naturellement, à se soumettre au joug du pouvoir, au point de mener une existence de bête de
somme, il découvre la raison de l'infortune qui accable l'humanité depuis des siècles : « C'est le peuple qui s'asservit, qui
se coupe la gorge.
» Supporter la férule ne sollicite rien que résignation et passivité, créer des conditions propices aux
libertés implique conscience, détermination, effort.
Là où les bêtes capturées regimbent, préférant parfois la mort à
l'esclavage, les citoyens ont abdiqué leurs droits de nature.
Leurs sociétés ont enchaîné à la « dénaturation des
gouvernants » la « dénaturation des gouvernés ».
Une corruption générale du sens humain a soudé dans un
accouplement mortifère maîtres et esclaves, exploiteurs et exploités.
Aussi, un homme ne peut être véritablement libre, s'il
est esclave, s'il est dans l'hétéronomie comme le pensera plus tard Kant.
2) La liberté, c'est de ne dépendre que de soi.
Les premières lignes du Manuel d'Epictète posent la distinction fondamentale : « Parmi les choses qui existent, les unes
dépendent de nous, les autres ne dépendent pas de nous.
Dépendent de nous : jugement de valeur, impulsion à agir, désir,
aversion, en un mot, tout ce qui a affaire à nous.
Ne dépendent pas de nous, le corps, nos possessions, les opinions que les
autres ont de nous, les magistratures, en un mot, tout ce qui n'est pas notre affaire à nous.
» Ainsi se trouvent délimitées les
trois « disciplines » fondamentales pour le stoïcien : maîtriser son « aversion » et son « désir » ; exercer son jugement en
dehors de tout préjugé, de toute impulsion ; déterminer son action, c'est-à-dire sa capacité réelle au bonheur, en fonction
de sa liberté.
« Les choses qui dépendent de nous sont par nature libres, sans empêchement, sans entraves.
Les choses qui ne
dépendent pas de nous sont dans un état d'impuissance, de servitude, d'empêchement, et nous sont étrangères.
Souviens-toi
donc que, si tu crois que les choses qui sont par nature dans un état de servitude sont libres et que les choses qui te sont
étrangères sont à toi, tu te heurteras à des obstacles dans ton action, tu seras dans la tristesse et l'inquiétude, et tu feras des
reproches aux dieux et aux hommes.
Si au contraire tu penses que seul ce qui est à toi est à toi, que ce qui t'est étranger comme c'est le cas - t'est étranger, personne ne pourra plus exercer une contrainte sur toi, personne ne pourra te forcer, tu ne
feras plus une seule chose contre ta volonté, personne ne pourra te nuire, tu n'auras plus d'ennemi, car tu ne subiras plus de
dommage qui pourrait te nuire.
» Ainsi, je serais libre à conditions de faire le partage entre ce qui est en mon pouvoir et ce
qui ne l'est pas, c'est aussi neutraliser les conditions extérieures qui me blessent et m'empêche d'être réellement libre et
autonomie, être esclave c'est dépendre entièrement des conditions extérieures et non de soi-même, les véritables
conditions de la liberté sont en vérité toutes intérieures, il n'appartient qu'à moi de faire ce travail pour atteindre la liberté.
2 ) Je suis libre quelque soit les conditions.
Pour Sartre, il y a la liberté humaine au commencement de tout.
On connaît le célèbre paradoxe : « Nous sommes
condamnés à être libres.
» C'est que cette liberté est vécue le plus souvent comme source d'angoisse, dans la mesure où
elle nous contraint à faire en permanence des choix qui nous engagent.
Nous sommes nos actes, et de ces actes nous
sommes entièrement responsables (« Seuls les actes décident de ce qu'on a voulu.
[...] Tu n'es rien d'autre que ta vie »,
déclare Inès dans Huis Clos).
L'homme est condamné à la liberté, constat aussi angoissant qu'exaltant, d'où ses efforts
pour y échapper, notamment par la mauvaise foi.
Mais cette liberté n'est pas une abstraction.
Elle a à s'exercer
concrètement, pratiquement, dans le monde.
Là, l'homme est « en situation », pris dans un réseau de contingences corps, histoire, classe, famille, etc.
-, autant de déterminismes dont il s'agit, précisément, de s'arracher par des choix.
Or
un nouveau problème surgit : l'exercice de ma liberté n'est pas seulement rendu difficile par l'effroi qu'elle suscite en moi,
ou par les résistances extérieures et surtout intérieures qu'il me faut combattre.
Aussi, l'homme peut se réfugier dans « la
mauvaise foi » et se cacher derrière les circonstances pour ne pas user de sa liberté.
Aussi, je suis libre quelque soit les
conditions extérieures, la liberté est un choix intérieur et non simplement des données extérieures, politique, social, j'ai
toujours la possibilité de m'extraire de mon milieu, de dire non.
Conclusion.
Les conditions de la liberté n'ont que peu de valeur si on se place du côté de la pure intériorité, si on prend la liberté
comme un choix, le pouvoir de délibérer par soi-même, le pouvoir de changer ses désirs plutôt que l'ordre du monde.
Notre
impuissance à changer le monde ne signifie pas pour autant que notre liberté est nulle, au contraire, la liberté est bien un
sentiment qu'un régime politique ne peut supprimer, puisque l'homme est né libre, son esclavage n'est pas naturel, son
absence ne signifie pas non plus la présence de la liberté, car ce qui compte avant tout, c'est la liberté en acte que seul
nous pouvons réaliser car personne ne le fera à notre place..
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