A quelles conditions peut-on atteindre la vérité ?
Extrait du document
«
Discussion :
Dès l'instant où nous portons un jugement nous reconnaissons savoir ce qu'est la vérité.
Socrate déjà disait :"Comment sais-tu que ce sont
des vérités si tu ne sais pas ce qu'est la vérité ?" Avant de chercher à définir la vérité et d'en rechercher le critère, il convient de se demander
si l'on peut parler d'une seule et unique vérité.
Alors, que penser du relativisme, qui dénie à la vérité tout caractère universel ? Ne faut-il
pas, à sa suite, reconnaître « à chacun sa vérité ».
Le faire reviendrait, sous couvert de tolérance, à dissoudre la vérité dans une pluralité
d'opinions relatives aux points d e vue particuliers de ceux qui les énoncent.
Contre le relativisme, s'affirme l'exigence d'une vérité
universelle, irrécusable.
C'est cette requête qui opposait déjà Platon aux Sophistes de son temps.
C'est cette même requête qui est à
l'origine de la pensée cartésienne, soucieuse de certitude assurée.
Le but de la méthode cartésienne est « d'atteindre la vérité dans les
sciences », et « ne rien admettre pour vrai que je ne le connusse être évidemment tel ».
S'affirme ainsi l'exigence de certitude.
Suggestion de plan :
I.
Première partie : Vérité et absolu
La recherche de la vérité est commandée par le souci de se mettre à l'abri de l'erreur, toujours menaçante : celui qui se trompe peut croire
qu'il détient la vérité, alors qu'il est dans l'illusion.
C'est pour cela que la philosophie classique se fait un devoir d e ne tenir pour vrai que ce qu'elle connaît être comme tel, d e façon
évidente.
Ainsi Descartes a mis au point une méthode « pour bien conduire sa raison et chercher la vérité dans les sciences » (Discours de
la méthode).
Or la règle de conduite intellectuelle que Descartes a érigée en premier précepte de sa méthode, est de n'admettre pour vrai,
que ce qu'il connaît pour tel.
Si, chez Descartes, il s'agit bien de ne se rendre qu'à l'évidence, qui est « le caractère d'une vérité clairement
et distinctement conçue » (J.
Lagneau), l'évidence dont il s'agit n'est pas une évidence « première », celle que l'on éprouverait en
présence de ce qui s'imposerait à première vue.
Elle n'est pas le point de départ, mais le terme d'une longue recherche visant à éliminer
toute possibilité d'erreur.
Son modèle est celui du Cogito, pensée qu'il mène tout au long de la Première Méditation, contre tout risque
d'erreur.
L'évidence à laquelle la pensée accepte uniquement de se rendre est celle de l'indéniable, de l'indubitable.
II.
Deuxième partie : Vérité et évidence
Mais si l'indubitable a de fortes chances de ne pas être faux et nous contraint pour ainsi dire à admettre ce qu'il ne nous permet pas de
rejeter, est-il pour autant nécessairement vrai ? Que penser de la confiance accordée à l'évidence par la philosophie classique ? Peut-on
considérer que l'évidence offre un critère suffisant de la vérité ?
Même si, de fait, on ne saurait guère nier l'évidence, n'est-on pas en droit, logiquement, et peut-être même en devoir, de le faire ? Ne
dit-on pas qu'il y a des évidences trompeuses ? Cette qualité (le fait d'être trompeur) est-elle réservée aux évidences dites premières,
celles que nous n'avons pas encore suspectées ? Ou bien s'applique-t-elle aussi à des évidences dernières, ultimes, fruit de la résistance
de nos idées à l'épreuve du doute auquel nous les avons soumises ? Est évident, ce qui se donne à voir.
L'évidence dépend donc du
champ d e notre conscience et par l à m ê m e de s e s limites.
Qu'est-ce qui nous assure d'effectivement tout voir et de ne rien écarter,
inconsciemment ou par mauvaise foi, de ce qui serait à prendre en compte pour penser valablement ce que nous pensons ? Non
seulement l'erreur, mais aussi l'illusion nous menacent à notre insu.
Cependant, il semble difficile d e rompre radicalement avec s e s
illusions dans la mesure où elles font partie de nous, elles sont constamment entretenues par notre inconscient et nos peurs.
Ainsi, pour
reprendre Socrate, le principal obstacle pour l'âme dans sa recherche de la vérité est le corps.
Car ce dernier est soumis à d'autres lois
(exemple : la perception) externes, qui sont souvent sources d'erreurs et qui détournent très souvent l'âme du vrai.
III.
Troisième partie : Vérité et philosophie
On sait depuis la philosophie que l'immédiat n'est pas la vérité ; que l'apparence n'est pas l'être.
C'est précisément parce qu'il faut faire
cette distinction que la philosophie existe.
La philosophie permet de prendre du recul par rapport aux données immédiates.
De plus, si la philosophie est considérée comme la science qui recherche la vérité c'est que cette dernière n'est pas limpide.
Or la réalité
est tout ce qu'il y a de clair et d'immédiat.
Ainsi si la vérité était la réalité, la philosophie n'aurait donc plus d'objet de recherche.
Péguy : « Une grande philosophie n'est pas celle qui installe une vérité définitive, c'est celle qui introduit une inquiétude ».
La philosophie
est donc la science du scepticisme puisque selon Péguy elle n'a finalement jamais de réponse assurée à donner, elle ne peut que garantir
une vérité pendant un certain temps jusqu'à ce qu'elle soit réfutée.
Même dans la philosophie il n'existe pas qu'une seule vérité.
Nietzsche, dans Par-delà le mal et le bien, soulignait le fait que la philosophie recherche éternellement la vérité et ne pourra pourtant jamais
l'atteindre.
Si ce qui est ne correspond pas à ce qui paraît être toute la question est de savoir à quoi on reconnaît la vérité ? Comment se produit
l'instant où l'on sait que l'on a trouvé la vérité ? Car si d'un côté la réalité est immédiate et ne demande pas d'interprétation, la vérité,
elle n'est pas donnée.
Bachelard, Le nouvel esprit scientifique : « Toute vérité nouvelle naît malgré l'évidence ».
On peut imaginer qu'il
existe presque un rapport de force entre la vérité et la réalité : car Bachelard semble insister sur la valeur du terme « malgré », la vérité
essaye donc de prendre forme alors que la réalité lui fait barrage.
Puisque si la réalité est limpide on est tenté de se laisser influencer par
l'évidence.
Rechercher la vérité c'est donc en premier lieu surmonter l'obstacle de la facilité, c'est-à-dire la réalité.
Conclusion :
La vérité se définit donc par son instabilité et sa quête est nécessairement problématique : pour y atteindre il faut conjuguer les règles
contraignantes de l'approche scientifique à la réflexion basée sur le doute que met en oeuvre la philosophie..
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