A quel désir l'art tente-t-il de répondre ?
Extrait du document
«
L'art n'aurait pas pour but premier de répondre à un désir, depuis la célèbre distinction kantienne entre le beau et
l'agréable, on ne peut demander à l'art de satisfaire des plaisirs.
En effet, il ne peut contenter des plaisirs corporels.
On vient à se demander à quel désir peut répondre l'art, dans quelle mesure ce mixte de sensible et d'intelligible peut
contenter l'homme et répondre à de véritables besoins.
Mais y arrive-t-il totalement, remplit-il son rôle
adéquatement ? L'homme n'est-il pas fondamentalement un être perpétuellement en manque, toujours en attente
d'un désir insatisfait ?
1) La satisfaction sublimée des désirs sexuels.
L'art serait une manière détournée d'accomplir des désirs refoulés par le biais de la « sublimation ».
La psychanalyse
des œuvres d'art repose sur ce présupposé.
L'art est un médium de dépasser le principe de plaisir par une
élaboration spirituelle tout en ayant pour fin une certaine satisfaction.
L'interprétation des œuvres de Léonard de
Vinci par Freud dans Souvenir d'enfance de Léonard de Vinci interprète grâce aux écrits du peintre et à ses toiles,
les problèmes de la sexualité du peintre, son homosexualité refoulée.
Il faut ainsi comprendre ses créations comme
une sorte d'exutoire et de sublimation de ses penchants.
La beauté serait alors le visage sous lequel se manifestent
les phantasmes les plus archaïques, qui eux-mêmes expriment la frustration de l'inavouable désir : expérience
fondamentale d'un être voué à l'absence.
Aussi, la recherche du plaisir - qui « nargue la mort » - est le signe d'un
être désireux de nier sa finitude.
Elle est éminemment créatrice de valeurs, mais ambiguë.
Si elle se transforme en
un culte idolâtrique, ne devient-elle pas la forme d'une « obsession » dont l'homme est à la fois l'artisan et la
victime ? Aussi, l'art peut se faire érotique, un érotisme qui prend sens dans une vie chaque fois confronté à la
précarité de la vie.
L'art érotique ne satisfait pas que des désirs sexuels, ce plaisir sexuel n'est pas un but en soi.
Le sexe serait l'occasion d'interroger une partie de la condition humaine.
2) L'art répond à un désir spirituel.
Hegel, dans son Esthétique pense que notre relation habituelle aux choses est de l'ordre du désir.
Quand on désire
une chose, on ne laisse pas l'objet dans sa liberté.
Désirer une chose, c'est supprimer son indépendance, en faire
usage et donc la détruire.
Mais l'art n'est pas de l'ordre du désir.
L'objet existe pour lui-même.
La contemplation
esthétique ne satisfait que des intérêts spirituels.
On comprend aisément la remarque de Hegel dans la mesure où la
vue par exemple d'un tableau d'une coupe de fruit peinte par Cézanne ou par Chardin n'induit pas l'envie d'acheter
des pêches ou des abricots au premier marchand de fruit venu.
De même la différence entre la peinture de nu et la
pornographie, se situe que dans le second, le but est d'engendrer des désirs sexuels contrairement au premier.
C'est
la différence qu'à déjà opérer Kant dans la Critique de la faculté de juger entre l'agréable et le beau.
L'agréable vise
à la satisfaction du plaisir des sens, il est intéressé.
Le plaisir esthétique doit être désintéressé, il ne s'intéresse
justement pas au contenu de la chose représentée.
La portée universelle de l'art ne supporte pas les petites
différences de goût individuelles, car ce qui est agréable à l'un ne peut ne pas l'être à l'autre.
L'art n'est pas là pour
rassasier les désirs, il est un plaisir intellectuel qui donne à penser, à interpréter qui induit une certaine vision de la
culture.
C'est une vision limitée de l'art que de le réduire à une satisfaction des désirs.
3) L'art répond à un désir de purification.
Paradoxalement, l'art viserait à socialiser le désir, à le rendre plus acceptable vis-à-vis de la société.
Il ferait
figure de catharsis, selon les théories d'Aristote.
Dans sa Poétique, Aristote justifie la tragédie en lui attribuant
un pouvoir de purification des passions du spectateur.
Assistant à un tel spectacle, l'être humain se libérerait des
tensions psychiques, qui s'extériorisent sur le mode de l'émotion et de la sympathie avec l'action représentée
(induisant pitié, colère, etc.).
Schopenhauer dans un autre registre, donne à l'art le but de nous écarter du pur
déroulement des phénomènes.
L'homme ordinaire, toujours affairé, est le plus souvent incapable d'échapper aux
phénomènes ordinaire, incapable de s'arrêter à la contemplation de la chose même.
C'est au génie qu'il
appartient, par un développement exceptionnel de l'intellect, d'accéder à l'idée et de devenir pur sujet de
connaissance d'un pur objet.
L'œuvre d'art, qui communique à un large public cette connaissance, vaut donc non
pas en tant que création mais comme la possibilité d'une expérience métaphysique qui nous délivrerait pour un
temps de la nécessité.
Ici l'art permettrait d'écarter l'homme des affres du désir qui finalement n'est jamais
satisfait.
L'homme oscille toujours entre l'ennui et le désir, un désir une fois satisfait laisse place à l'ennui, l'art
permet d'échapper à ce mouvement perpétuel, il coupe court au processus du désir.
L'art serait le seul capable
de faire échapper l'homme de la roue d'Ixion, infiniment recommencement de la souffrance.
Conclusion.
L'art serait un moyen sublimé de répondre à des désirs sexuels mais pas seulement, il tente aussi de répondre à des
besoins spirituels et d'éveil de l'intelligence.
L'art aurait aussi des vertus cathartiques qui permettrait à l'homme à la
souffrance de l'existence et à la difficulté même d'exister.
L'art satisfait des désirs particuliers qui ne sont pas
entièrement sensibles, ou plutôt, l'art répond d'une manière intelligible à des purs désirs sensibles et par là, les
transfigure et les sublime pour leur donner une plus grande signification.
Ce travail de l'art est d'une grande utilité
social et psychologique pour l'homme..
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