Vielle chanson du jeune temps, Victor Hugo
Publié le 19/01/2023
Extrait du document
«
Chef de file du mouvement romantique, Victor Hugo est à la fois poète, dramaturge et
romancier.
Engagé politiquement, il s’oppose à Napoléon III et passe une partie de sa vie en
exil.
Publié en 1856, le recueil Les Contemplations, composé de deux parties, est fortement
marqué par la mort de sa fille Léopoldine.
Si la seconde partie, intitulée "Aujourd'hui",
rassemble les poèmes suivant la mort de sa fille, essentiellement empreints de tristesse et
de mélancolie, la première partie, intitulée « Autrefois », évoque, tout particulièrement dans
les livres I et II, des moments plus heureux, faits d’insouciance et de liberté au contact de la
nature.
Dans le poème "Vieille chanson du jeune temps", appartenant au livre I de la
première partie, et daté par Hugo de 1831, mais en réalité écrit le 18 janvier 1855, le poète
évoque l'un de ses souvenirs d'adolescent.
Le titre annonce une forme poétique à la fois
lyrique, légère et populaire.
Composé d’heptasyllabes, le poème expose avec humour les
difficultés d'un jeune homme de seize ans lors de sa première rencontre avec une jeune fille,
et plus largement, les rapports entre jeunes gens depuis toujours.
Ainsi, comment cette
chanson vieille comme le monde rend-elle compte d’une première expérience amoureuse
ratée ?
Mouvements du texte :
- Les 4 premiers quatrains présentent les deux personnages et le cadre de la rencontre.
- Les 4 quatrains suivants narrent les étapes progressives de cette rencontre dans une
nature qui invite à l’amour.
Alors que les deux protagonistes évoluent dans cet univers
bucolique, le corps de Rose se dévoile à mesure que l’on découvre la maladresse risible du
jeune homme.
- Enfin, dans le dernier quatrain, ce dernier prend conscience, mais trop tard, de la beauté
de la jeune femme.
Le « je » d’autrefois rejoint alors le « je » d’aujourd’hui dans l’expression
de ses regrets.
Strophes 1 à 4 : Présentation des protagonistes et du cadre de la rencontre
Dès la première strophe, on remarque la simplicité de l'expression avec la répétition de
"Rose" (v.
1 et 2) qui rime avec " chose" (v.3), simplicité que l'on peut associer à l’innocence
de la jeunesse.
Le prénom Rose évoque de fait une beauté naturelle qui correspond au cadre bucolique,
développé avec le champ lexical de la nature présent tout au long du poème et dès les deux
premières strophes : "bois, fleurs, arbres".
Rose est une jeune fille entreprenante : c'est elle qui a l'initiative et s'impose, en quelque
sorte, pour la promenade, ce que suggère le chiasme des vers 1 et 2 : "pas Rose...Rose".
La détermination de la jeune fille est de plus marquée par le passage de l'imparfait «
songeais » au passé simple « vint ».
A cet esprit d’initiative s’opposent la naïveté et le détachement du poète.
Celui-ci est en effet
associé à une certaine passivité, mise en valeur non seulement par la forme négative des
verbes : « Je ne songeais pas » (v.1), « je ne sais plus de quoi » (v.4), mais aussi par la
comparaison du v.
5 « froid comme les marbres ».
Les verbes d'action eux-mêmes : "je
marchais", "je parlais" ne correspondent pas, de toute évidence, aux attentes de la jeune
fille exprimées dans l'interrogation « Après ? » (v.8).
La jeune fille désire une déclaration.
Rien à voir avec le sérieux et la banalité des paroles du
garçon, que met en valeur l’anaphore du pronom personnel de la première personne (v.
5, 6
et 7).
Les avances de la jeune fille se font pourtant de plus en plus précises.
D'abord c'est "son
oeil " qui parle (v.8); puis elle "écoute" les "rossignols", symboles de l'amour, (v.12) ; enfin,
ses "yeux "brillaient" (de désir ?), (v.14).
Pourtant, la coquetterie de la jeune fille est plus naïve que perverse.
La nature vient
d’ailleurs innocenter ces tentatives si naturelles.
Personnifiée aux vers 9 et 10, elle offre un
cadre propice et protecteur à la rencontre amoureuse, ce que souligne l'ellipse grammaticale
« La rosée offrait ses perles/ Le taillis ses parasols.
» (v.10)
Le vers 11 suggère enfin une initiative de la part du jeune homme, mais le verbe "j'allais" n'a
pas de complément : ainsi le jeune homme n'a pas de but ; il "suit".
Se joue alors une opposition entre le "je" du jeune poète et Rose, qui n'écoutent pas la
même chose, ce que met une fois encore en valeur une ellipse grammaticale : « j’écoutais
les merles, / Et Rose les rossignols.
» (v.12).
Cette opposition se poursuit à la strophe suivante.
"Elle" et "Moi" sont en effet opposés à
travers des antithèses : « 16 ans/20 ans – morose/brillaient » (v.13-14).
Aux vers 15 et 16, les merles et rossignols sont repris et personnifiés : ils sont du côté de
Rose, du côté de l'amour sensuel.
" En effet, les "rossignols", symbole de l'amour, "chantent
Rose" : le verbe est ici construit de façon étonnante ; on attendrait une formule comme
"célébrait le nom de Rose" ou "répétaient en chantant"; cette rupture du stéréotype souligne
à quel point Rose et les "rossignols
On voit bien, dans ce début de poème, combien le jeune homme est maladroit face aux
premières avances de la jeune fille, et ce alors que la nature offre un cade parfait à cette
première rencontre.
Les tentatives de séduction....
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