Aide en Philo

Sujet : “Le roman c’est la fraternité : on se met dans la peau des autres” écrit Romain Gary dans La nuit sera calme. Selon vous, la première fonction d’un récit ou d’un roman est-elle de nous faire comprendre la vie des autres ?

Publié le 25/03/2024

Extrait du document

« Dissertation Sujet : “Le roman c’est la fraternité : on se met dans la peau des autres” écrit Romain Gary dans La nuit sera calme.

Selon vous, la première fonction d’un récit ou d’un roman est-elle de nous faire comprendre la vie des autres ? Vous répondrez à cette question en vous fondant sur votre connaissance de l'œuvre Mémoires d’Hadrien de Marguerite Yourcenar, des textes étudiés pendant l’année ainsi que de vos lectures personnelles et scolaires. L’écrivain Romain Gary avance l’idée que “le roman, c’est la fraternité : on se met dans la peau des autres”.

A l'instar de l’autrice Marguerite Yourcenar qui se projette dans la vie d’un empereur romain afin d’écrire l’œuvre érudite Les Mémoires d’Hadrien, le lecteur, de par le genre du roman, est plongé dans l’altérité.

Il va se détacher de son individualité et faire une rencontre en s’immergeant dans la vie d’un autre, celle du personnage du roman dont il fait la lecture. Un questionnement se pose alors : “la première fonction d’un récit ou d’un roman est-elle de nous faire comprendre la vie des autres ?” Effectivement le roman a-t-il pour objectif premier d’amener le lecteur à se mettre dans la peau des personnages ? Tout d’abord, la fonction d’identification à l’autre qui caractérise le roman sera expliquée.

Cependant celui-ci est aussi un outil de confrontation mettant à distance le lecteur d’un ou des personnages.

En somme, le roman est surtout un moyen d’évasion pour le lecteur qui peut se permettre d’aller au-delà de soi-même et des autres, au-delà de la réalité. Au préalable, l'identification peut être permise grâce au point de vue utilisé par l’auteur.

En effet, si le point de vue à travers lequel le lecteur découvre le roman donne un maximum d’informations sur le personnage, l’identification est davantage facilitée.

L’ouvrage Les Mémoires d’Hadrien utilise le point de vue interne en prêtant à Hadrien des doutes et des certitudes à travers lesquels tout lecteur peut se reconnaître.

La narration à la première personne rend complexe la distinction entre Marguerite Yourcenar et le personnage, celle-ci s’efface derrière son personnage et déroule le récit à travers le regard d’Hadrien.

Ce procédé permet au lecteur de s’immerger pleinement dans les pensées d’Hadrien et d’accéder à la vérité de cette figure historique.

L’empereur plonge le lecteur dans les méandres de sa vie à travers ses réflexions philosophiques.

Derrière ce “je” énoncé par Hadrien, il s'agit donc en réalité d’un “nous” beaucoup plus universel dans lequel le lecteur s’identifie et Marguerite Yourcenar se cache.

De la même façon, Louis-Ferdinand Céline, dans Voyage au bout de la nuit, partage les pensées fatalistes du narrateur-personnage, Bardamu.

Celui-ci nous emmène à travers la première guerre mondiale, le colonialisme en Afrique et l’Amérique de l’entre deux guerres grâce au point de vue interne et à la narration à la première personne. Un roman peut inspirer auprès du lecteur de la compassion à l’égard d’un personnage.

Les mémoires d’Hadrien sont par évidence le récit d’une vie, la vie d’un empereur romain du premier siècle, Hadrien.

Cependant malgré cette noble fonction, le lecteur fait face à un homme faillible composant avec les adversités auxquelles il est confronté.

Ainsi Marguerite Yourcenar s'attache à narrer des épreuves que chaque Homme doit affronter.

La perte d’un être aimé par exemple lorsque Antinoüs, l’éromène d'Hadrien, meurt.

En effet, le deuil est un malheur dont chaque être humain peut faire l'expérience.

Il inspire alors chez le lecteur un élan d’empathie envers ce personnage aux traits familiers, ravagé par l’événement tragique.

Il en va de même pour la maladie d’Hadrien et en définitive, pour sa mort.

Le lecteur est affecté par l'agonie à laquelle il assiste, celui-ci se met donc dans la peau de l’empereur.

Avant de se taire à jamais, le narrateur clôt sa lettre sur ces mots, qui peuvent toucher bien des lecteurs : « Tâchons d'entrer dans la mort les yeux ouverts ».

L’humanité d'Hadrien est de nouveau soulignée puisqu’il est mortel.

Le lecteur fait preuve de compassion, s’identifie et l'altérité disparaît alors.

De même, les épreuves vécues par le personnage principal dans Claude Gueux de Victor Hugo invitent le lecteur au dépassement de soi face à l'adversité et à l'injustice en créant de l’empathie pour le personnage du roman.

Chacun est amené à s’engager intellectuellement pour la cause défendue par l’auteur, ici l’abolition de la peine de mort, grâce à un élan fraternel poussé par l’identification. La première fonction d’un récit permettant de nous faire comprendre la vie des autres peut être effectuée grâce à une écriture réaliste.

En effet, les multiples sources utilisées par Marguerite Yourcenar arriment le roman dans la réalité antique. L’autrice a reconstitué l’époque d’Hadrien grâce à deux ouvrages historiques romains ainsi qu’à de nombreuses autres sources de diverses natures telles que des œuvres d’art, de la monnaie afin d’être historiquement juste.

Ce souci de rigueur historique conduit à l‘identification du lecteur car le monde romain est une référence qui construit également notre monde actuel.

Connaître son sujet est essentiel à tout écrivain qui veut produire un récit réaliste et précis.

Emile Zola décrit avec précision les personnages et le milieu ouvrier dans lequel ils évoluent dans Germinal.

Le réalisme de l’auteur de la fresque des Rougon Macquart entraîne l’adhésion du lecteur à la condition de ses personnages.

Un sentiment de fraternité avec les personnages du roman naît ainsi et permet de par le réalisme des descriptions du roman au lecteur de se mettre dans la peau du personnage et comprendre sa réalité, sa vie.

De plus, les joies du quotidien, comme la contemplation d'un paysage ou le plaisir des souvenirs, auxquelles est tant attaché d’Hadrien rendent le récit accessible.

Les plaisirs de la vie font également partie de la réalité du lecteur, une réalité quotidienne.

C’est donc par le genre littéraire du roman qui utilise des repères communs, autant historiques que universels, que le lecteur développe une sensation de proximité avec l’autre et se met à le comprendre. Le roman est donc qualifié par sa capacité à mettre le lecteur dans la peau d’un ou des personnages, que ce soit de par un ancrage dans la réalité, l'émission de compassion ou le point de vue utilisé.

Cependant le récit ne nous ouvre pas forcément aux autres.

Ce n'est pas toujours dans la proximité ou l'identification que le lecteur fait face à l'altérité.

Une certaine distance peut s’installer. Le personnage antipathique peut susciter le rejet du lecteur par bien des moyens au sein d’un récit.

Les principaux sont assurément la description morale et physique que le romancier lui a assigné et les actions qu’il entreprend durant toute la durée de l’histoire. Hadrien ne se met alors pas nécessairement en valeur dans ces mémoires.

Certes, il sait se montrer capable de patience, de douceur et de clairvoyance.

Mais l'empereur peut aussi devenir dur et violent, comme lorsqu'il s'agit de punir des traîtres ou des peuples qui se soulèvent contre Rome.

Il lui arrive ainsi de céder à des humeurs néfastes.

C'est notamment le cas lorsqu'il s'en prend à son secrétaire : agacé, il lui donne un coup et oublie qu'il tient un poinçon permettant d'écrire.

Il lui crève alors un œil, et regrette aussitôt ce geste qu'il ne pourra jamais réparer.

Il s’agit de la même dureté dans sa relation avec son éromène, Antinoüs, qu’il maltraite aussi bien physiquement que psychologiquement tant leur relation est passionnément destructrice.

Il devient alors, par ces agissements, un personnage antipathique dont le lecteur a tendance à s’écarter.

Georges Duroy dans Bel Ami de Maupassant est un être négatif, amoral qui de par son comportement pousse le lecteur à le mépriser et à s’en distancier.

En effet, celui-ci a soif de réussite et est prêt à tout pour réussir.

Pour cela il va se montrer opportuniste et manipulateur en se servant de femme influente afin de monter les strates sociales sans scupule. Le style d’écriture d’un roman peut éloigner le lecteur d’un ou des personnages.

Assurément si la narration est une exposition de faits sans états d’âmes le lecteur risque d’avoir du mal à s’identifier car il n’y aura le phénomène d’empathie énoncé plus haut.

La forme épistolaire des Mémoires d’Hadrien va en ce sens en imposant un mode de communication bien particulier.

Le personnage luimême désigne son écrit comme une « lettre » à visée informative.

Il livre des faits publics, offre des détails parfois triviaux, qui peuvent aussi bien concerner la cuisine que les vêtements.

De plus, il théorise son rapport au monde extérieur en en faisant une philosophie politique et de vie.

Penseur, Hadrien s’essaie à plusieurs doctrines, partagé entre le plaisir des sens et le stoïcisme.

Sa parole mêle réflexions politiques, philosophiques et artistiques, toutes influencées par Athènes et l’idéal grec.

Cette intellectualisation de la société conduit à une mise à distance.

Le lecteur est alors dans certains passages en position d’observateur et n’est pas stimulé par de l’action ou des sentiments.

De la même manière Meursault dans L’Etranger d’Albert Camus est un observateur.

Celui-ci observe sa vie avec tellement.... »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles