Séquence 3 : comédie et spectacle, Le Malade imaginaire de Molière Explication linéaire n°1 : Acte I, scène 5, extrait de « votre fille. Elle vous dira qu’elle n’a que faire de M Diafoirus » à la fin de la scène pp 36 à 40
Publié le 18/04/2024
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Séquence 3 : comédie et spectacle, Le Malade imaginaire
de Molière
Explication linéaire n°1 : Acte I, scène 5, extrait de
« votre fille.
Elle vous dira qu’elle n’a que faire de M
Diafoirus » à la fin de la scène pp 36 à 40
Le Malade imaginaire est la dernière comédie-ballet de Molière, genre très
prisé par la cour de louis XIV et par le roi lui-même, grand amateur de danse,
qui aime offrir des divertissements grandioses à sa cour par lesquels il offre le
spectacle de son pouvoir.
Quand Molière écrit le Malade imaginaire en 1673, il
se sait gravement malade et à la quatrième représentation, il crache du sang et
meurt quelques heures plus tard – du poumon, justement.
On ne peut donc
s’empêcher de voir derrière le personnage d’Argan, le malade imaginaire joué sur
scène par Molière, l’auteur mourant, qui est réellement malade mais joue avec la
souffrance et la mort.
Cette pièce est également une comédie de caractère qui
dénonce l'égoïsme et la folie d'un hypocondriaque, Argan, et une comédie de
mœurs par la critique des médecins du 17ème qui profitent de la crédulité de
leurs patients et par la critique du mariage forcé et de la tyrannie des pères.
La
satire des médecins s'inscrit dans la tradition théâtrale, de la commedia dell'arte
avec son personnage du dottore, et Molière emprunte aussi beaucoup à la farce
dans toute la pièce comme dans la scène que nous étudions maintenant.
Dans cette scène, Argan, le personnage principal, refuse à sa fille Angélique
d'épouser Cléante, un homme de bonne famille qu'elle aime, car en père
tyrannique, il veut l'obliger à épouser un médecin benêt pour avoir quelqu'un à
domicile pour le soigner.
Or, Toinette, sa servante a le courage de l'affronter
dans cette scène où elle a deux objectifs : ramener son maître à la raison et
aider Angélique à épouser celui qu'elle aime.
On assiste dans cette scène à un
renversement des rapports de force entre maître et valet.
PROJET DE LECTURE :
Nous étudierons comment Toinette prend le pouvoir dans cette scène
carnavalesque de joute verbale avec Argan qui vire à la farce.
Dans le premier mouvement de « Votre fille.
Elle vous dira qu’elle n’a que
faire de… jusqu’à « elle n’est point faite pour être Mme Diafoirus », Toinette est
la porte-parole d’Angélique contre les arguments d’Argan pour justifier le
mariage d’Angélique avec Thomas Diafoirus
Dans le deuxième mouvement fait d’échanges très rapides dans le style de la
Commedia dell’arte, Toinette tente de déstabiliser l’autorité d’Argan.
(de « et je
veux moi que cela soit » jusqu’à « je la mettrai dans un couvent »)
Dans le troisième mouvement, nous analyserons les stratégies de Toinette
pour désarmer Argan, elle le prend par les sentiments (de « TOINETTE.- Vous ? »
jusqu’à « doucement, Monsieur : vous ne songez pas que vous êtes malade »)
Dans le quatrième mouvement qui vire à la farce ( « de « je lui commande
absolument de se préparer à prendre le mari que je dis » jusqu’à la fin), nous
étudierons comment Toinette usurpe le langage et le pouvoir du maître
Mouvement 1 : Toinette, courageuse, se fait la porte-parole
d’Angélique contre les arguments d’Argan
Toinette exprime le point de vue d’Angélique :
- elle utilise en effet le discours indirect : « elle vous dira que »
- triple négation avec amplification et hyperbole finale « Elle vous dira qu'elle
n'a que faire de M.
Diafoirus, ni de son fils Thomas Diafoirus, ni de tous les
Diafoirus du monde » (hyperbole finale)
-> effet comique de la gradation
mais gravité de la situation : Toinette prend la position d'Angélique QUI EST
PRESENTE SUR SCENE : elle dit non, exprime la révolte que tait la jeune femme,
muette sur scène car elle est terrifiée par l'autorité de son père
- Emploi du futur : « elle vous dira » Le futur exprime la certitude, anticipe sur
les futures prises de parole d'Angélique.
Toinette est l’adjuvante de la jeune fille
mais aussi une figure maternelle, à l'écoute de la jeune fille, sa confidente
* Les arguments d’Argan pour justifier le mariage
- on note le parallélisme dans l’expression.
Il reprend les mêmes constructions et
procédés que Toinette pour la contrer.
Lui aussi utilise une triple négation : « M.
Diafoirus n’a que ce fils-là », « qui n’a ni femme, ni enfants », et l’amplification,
le superlatif, l’hyperbole « plus avantageux », « tout son bien », « pour tout
héritier »
- Argumentation rationnelle d’Argan qui s’appuie sur des connecteurs logiques :
« outre que le parti est plus avantageux qu’on ne pense, « et de plus » « et M
purgon », « sans compter le bien du père »
-argumentation appuyée sur des chiffres concrets « huit mille livre de rente »
-> Argan de manière traditionnelle fait de ce mariage une affaire financière (et
personnelle puisqu’il veut avoir un médecin à la maison pour le soigner à tout
moment), argument du « parti » avantageux, du bon parti, qui ne tient aucun
compte des sentiments de la jeune fille.
-> cynisme et pragmatisme d’Argan qui se réjouit de la misère affective de m
Purgon « qui n’a ni femme, ni enfants »
* Toinette, en réponse, va dénigrer la figure de ce prétendant
« modèle » par une satire dirigée contre la médecine
-ironie de Toinette « il faut qu’il ait tué bien des gens, pour s’être fait si riche »
-> Médecins accusés de meurtres, dénonciation de la médecine comme
commerce : > médecine de l’époque fondée sur la théorie des humeurs, qui
affaiblissait les malades par des purgations et saignées effectuées dans des
conditions sanitaires déplorables, ce qui précipitait souvent la mort
- « Elle n'est point faite pour être Mme Diafoirus » > sous-entend aussi que les
médecins souhaitent accéder à une condition meilleure par le mariage mais qu’ils
sont des êtres bas et vils indignes d'épouser Angélique.
Dans le deuxième mouvement fait d’échanges très
rapides dans le style de la Commedia dell’arte, Toinette
tente de déstabiliser Argan.
Nous assistons à un
véritable combat de mots comme dans un ring (de « et je
veux moi que cela soit » jusqu’à « je la mettrai dans un
couvent »)
* Argan affirme une autorité tyrannique :
-omniprésence du « je » + forme renforcée « moi »
- verbes de volonté « je veux » deux fois ligne 117 et 123
- violence dans les verbes utilisés : « je l’y forcerai », « je la mettrai »
* Toinette déstabilise Argan par des affirmations péremptoires tout aussi
autoritaires :
- utilisation de l’impératif injonctif : « ne me dites pas cela » : elle lui donne des
ordres ! quelle insolence et quel courage !
- forme renforcée de la négation « non » qui affirme un point de vue tranché,
son opposition aux desseins d’Argan : « Eh non ! », « non je suis sûre… »
-utilisation du futur qui montre ses certitudes : «je suis sûre qu’elle ne le fera
pas »
Repris en anaphore : elle le ne le fera pas, vous dis-je »
Insolence de Toinette qui fait d’elle aussi un pôle comique de la
pièce
Surprise d’Argan face à cette attitude :
question qui montre son incompréhension face à tant d’insolence :
« comment, que je ne dise pas cela ? » -> sous-entendu : comment
pouvez-vous m’ordonner de ne pas le dire : quelle impudence de votre
part !
il la défie : « Et pourquoi ne le dirai-je pas ? »
Vivacité du dialogue dans le style de la Commedia dell arte
- Des phrases brèves
- Des reprises anaphoriques : chacun des protagonistes construit le
dialogue en refusant l’action de l’autre : « on dira que »/ « on dira ce
qu »’on voudra », « elle ne le fera pas »/je l’y forcerai/ elle ne le fera
pas/ elle le fera » : c’est un véritable ping-pong verbal dont l’enjeu est
la prise de pouvoir, la victoire.
Angélique est un objet, une balle, que deux joueurs se lancent
avec dextérité
Elle est réduite à des pronoms « elle », « la », silencieuse, impuissante,
condamnée à une identité féminine anonyme.
Elle doit seulement
« exécuter une parole », selon son père.
Ce jeu verbal divertit le spectateur, cependant, le danger subsiste.
Argan a le dernier mot en menaçant Angélique du couvent.
Toinette va alors changer de stratégie, opter pour un affrontement
plus subtil, moins direct.
Troisième mouvement : les stratégies de Toinette pour
désarmer Argan (de « TOINETTE.- Vous ? » jusqu’à
« doucement, Monsieur : vous ne songez pas que vous
êtes malade »)
Elle refuse de le prendre au sérieux
- Elle feint la surprise par l’interrogation : « vous ? »
« oui, oui » sarcastique de Toinette quand son maître affirme sa
certitude de ne pas changer de projet,....
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