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naissance de Gargantua

Publié le 03/04/2024

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« Texte 2 : la naissance de Gargantua, Chapitre VI.  Présentation du passage et projet de lecture Ce passage se situe au chapitre 6, intitulé «Comment Gargantua naquit de bien étrange façon ».

En effet, c'est de manière très *carnavalesque que naît notre géant éponyme, au beau milieu d'un festin de tripes.

Alors que Gargamelle vient de se faire administrer un astringent si puissant que ses sphincters se sont bouchés, le nourrisson doit se frayer un autre chemin pour voir le jour.

L'auteur mêle dans ces lignes une tonalité *épique et un humour *scatologique qui cachent en réalité une réelle érudition médicale et littéraire, que les lecteurs les plus avisés sauront reconnaître.

Les nombreux commentaires que Rabelais adresse à ce lecteur sont d'ailleurs autant une marque de leur complicité que des critiques implicites que l'humaniste formule ici contre la religion. → En quoi cette naissance en apparence burlesque est-elle l'occasion pour l'auteur de formuler une réflexion sur la foi ?  Lecture  Analyse linéaire 1er mouvement du texte : une naissance par « l'oreille senestre » « Par cet inconvénient furent au dessus relachés les cotylédons de la matrice, par où l'enfant jaillit, entra dans la veine cave et, grimpant par le diaphragme jusqu'au-dessus des épaules, où ladite veine se sépare en deux, prit son chemin de gauche et sortit par l'oreille gauche ».    Le récit de la naissance s'appuie sur un champ lexical anatomique précis du corps, signe de l'érudition médicale de Rabelais qui met ici sa connaissance au service de l'humour. Le contraste entre le réalisme des termes et l'invraisemblance de la naissance est en effet comique et la précision médicale accentue le caractère absurde et burlesque de la naissance de ce héros. Mais le choix de cette naissance ne vise pas simple ment à divertir le lecteur ; on y relève en effet des références plus sérieuses qu'il n'y paraît d'abord.

Si l'on observe les verbes employés, on remarque ainsi qu'ils traduisent la volonté du jeune géant qui se fraie un chemin dans ce labyrinthe corporel.

L'enfant, lors qu'il arrive à la bifurcation de la « veine cave » de sa mère, peut choisir entre la voie de droite et celle de gauche.

L'expression « prit son chemin » implique qu'il s'agit d'un choix délibéré : l'enfant déjà doué d'une capacité de raison extraordinaire opte intentionnellement pour le chemin qui le mène à la vie, c'est à-dire à sa propre naissance. Cet accouchement extraordinaire rappelle bien entendu également d'autres naissances merveilleuses, comme celle de Bacchus-Dionysos, d’Adonis, de Castor et Pollux que Rabelais cite plus loin, ou celle de Minerve-Athéna qui naquit par la tête de Jupiter-Zeus. Une manière pour l'auteur d'inscrire dès sa naissance Gargantua dans la lignée des personnages mythologiques, mi-hommes mi-dieux. 2ème mouvement : la naissance d’un *héros, d’un être extraordinaire, « plein de pantagruelisme » « Dès qu'il fut né, il ne cria pas comme les autres enfants : « Mies! mies ! mies!», mais il clamait à pleine voix : « A boire ! à boire ! à boire ! », comme s'il invitait tout le monde à boire.

»  Le caractère extraordinaire, hors du commun, et quasi divin de l'enfant, se confirme d'ailleurs lorsqu'il arrive au monde, puisqu'il est capable de parole dès sa naissance.

Il se différencie ainsi du commun des mortels, comme le prouve d'ailleurs la comparaison à la forme négative (en sa faveur) avec les autres enfants.

Cette injonction exclamative du bébé qui demande trois fois à boire dès sa naissance peut là encore être comprise selon plusieurs niveaux de lecture.

D'une part, on comprend bien entendu que l'enfant, comme tout nourrisson qui vient au monde, demande à téter (la seule différence étant la manière dont il le demande).

On peut également y entendre, et c'est ce que précise la suite du texte, une invitation à partager un moment de beuverie commune et festive, ce qui arrivera souvent dans le récit.  Mais de manière plus symbolique encore, cet appel à boire peut évoquer, au-delà du simple plaisir, une manière d'appréhender le monde que Rabelais nous fait partager avec ses géants.

On peut penser déjà à la « soif de connaissances » qui caractérisera le géant autant que les penseurs humanistes. 3ème mouvement : une apologie ironique de la crédulité ou une critique de la foi   « Je suppose que vous ne croyez pas vraiment en cette étrange naissance.

Si vous n'y croyez pas, je ne m'en soucie guère ; mais un homme de bien, un homme de bon sens, croit toujours ce qu'on lui dit et ce qu'il trouve écrit.

[Salomon ne dit-il pas, au chapitre 14 des Proverbes : « L'Innocent croit toute parole », etc.

; et saint Paul, dans la Première aux Corinthiens, 13 : « La Charité croit tout » ? Pourquoi ne le croiriez-vous pas ? Parce que (dites-vous) ça ne se voit jamais.

Et moi je vous dis que, justement pour cela, vous devez y ajouter totalement foi.

Car les Sorbonnistes disent que la foi permet de croire les choses qu'on n'a jamais vues.] Est-ce contre notre loi, notre foi, contre la raison, contre la Sainte Écriture ? Pour ma part, je ne trouve rien dans la Sainte Bible qui s'y oppose.

Et si la volonté de Dieu était telle, diriez-vous qu'il n'aurait pu le faire ? Ha, de grâce, ne vous emberlificotez pas l'esprit de ces vaines pensées.

Car je vous dis.... »

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