Lecture linéaire : « Le Dormeur du val » : ode à la nature ou dénonciation de la guerre ?
Publié le 24/06/2024
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«
Lecture linéaire : « Le Dormeur du val » : ode à la nature ou
dénonciation de la guerre ?
Contexte : éléments bio Rimbaud + 70, guerre franco-prussienne, errances dans la campagne.
Scène vue ? Lecture du poème + réflexion sur les difficultés de lecture ; rejets ; en alexandrins
bousculés par touts ces rejets, on perd la fluidité et la symétrie rassurantes de l'alexandrin
classique.
Structure métrique : sonnet ABAB CDCD EE FGGF : un sonnet qui rompt avec la
structure du sonnet canonique Poème à chute : surprise et brutalité du v.14 – invitation à la
relecture
Mouvement : Quatrain 1 : peinture d'une nature apparemment paisible et joyeuse Quatrain
2 : portrait d'un jeune soldat, étrangement endormi Tercets : vers la réalité choquante
→ Comment Rimbaud dénonce-t-il la cruauté de la guerre dans un sonnet dont la «
chute » est amenée par des indices tout au long du poème ?
Le dormeur du val
C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort.
Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine,
Tranquille.
Il a deux trous rouges au côté droit.
Quatrain 1 : peinture d'une nature apparemment paisible et joyeuse
C'est un trou de verdure où chante une rivière,
Accrochant follement aux herbes des haillons
D'argent ; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
→ Nature paisible et joyeuse - Représentation d'une nature vivante, personnifiée : la rivière «
chante » ; la montagne est « fière » ; la nature est charmante, pittoresque : « c'est un petit
val », noter la modestie et le charme de la tournure présentative.
- La vivacité est rendue
aussi par les enjambements et rejets, qui semblent imiter la petite rivière dans sa course
depuis la montagne.
Vitalité aussi de la course de la rivière, mouvement rendu par l'adverbe :
« accrochant follement aux herbes des haillons/ D'argent» - Vivacité dans le jeu sur la lumière
et les couleurs : la « verdure », évoquée aussi par les « herbes » et le « val » (plus tard « frais
cresson bleu », « ), la métaphore des « haillons d'argent », des reflets des gouttes sur les
herbes, le « soleil » qui « luit », la métaphore du val qui « mousse de rayons » (plus tard la «
lumière » qui pleut) - La fusion des impressions auditives (chante), sensitives (mousse, frais),
visuelles ((à quoi s'ajoutent les parfums plus tard, au début du second tercet).
Fusion végétalminéral.
Fusion feu (soleil), eau (rivière), air (rayons + plus tard la « nue »), terre (verdure) +
des homophonies « chan » « an » « on » => plénitude et vie dans ce coin de nature.
Tableau
évocateur.
→ Ce qui peut troubler - le mot « trou » est là dès le v.1.
La connotation n'est pas très
favorable, moins favorable que « creux » par exemple.
Parler d'un lieu en disant que c'est un «
trou » est souvent péjoratif.
Ce terme bien sûr reviendra en écho au v.
14.
- Tous les
enjambements et rejets, s'ils rendent bien compte du mouvement de la rivière, sont aussi une
entrave à la facilité de la lecture, quelque chose d'un peu déroutant.
On est comme ébloui par
la lumière avec les rejets « d'argent », « luit » : quelque chose de dérangeant dès le premier
quatrain.
- La métaphore des « haillons » : ce comparant est aussi un peu étonnant - La couleur
omniprésente, le vert est une couleur froide (+ confirmé par « bleu » plus loin)
Quatrain 2 : portrait d'un jeune soldat, étrangement endormi
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
→ Présentation du soldat endormi : - v.5 : « soldat jeune » : Présence humaine qui fait
irruption dans cette nature ; avec déterminant indéfini (universaliser la peinture) puis détails
de son corps en plusieurs appositions de tournure attributives « bouche ouverte, tête nue, / Et
la nuque baignant dans le frais cresson bleu ».
Cela diffère d'autant le verbe qui arrive au
début du vers 5 : « dort ».
cf titre « dormeur du val » + « il est étendu », « son lit vert » L'accent sur l'innocence et l'abandon : « jeune » est mentionné d'emblée + le fait qu'il est
abandonné au sommeil, la bouche ouverte, la tête nue, « la nuque baignant dans le cresson »
tel un enfant capable de s'endormir n'importe où.
- Rythme ternaire du v.5 => douceur
→ Ce qui peut troubler - Posture étrange : « tête nue » = laisser aller pour un soldat, «
bouche ouverte....
»
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