Lecture linéaire "Colchiques" Apollinaire - Alcools
Publié le 21/06/2023
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LECTURE LINEAIRE « Les colchiques », Apollinaire
INTRODUCTION
Dans le recueil Alcools, Guillaume Apollinaire incarne « l’esprit nouveau » selon l’expression qu’il
utilisera lui-même lors d’une conférence en 1917.
En effet, la modernité du poète est visible puisqu’il s’inspire
de la ville, du rythme de la musique et de la peinture cubiste, supprimant la ponctuation de tous ses poèmes.
Toutefois, il respecte une certaine tradition poétique dans la mesure où il propose des poèmes en vers, avec de
nombreuses références mythologiques, tout en évoquant ses sentiments personnels.
Dans ce court poème de
15 vers en alexandrins, Guillaume Apollinaire met en lumière un thème floral avec le titre « colchiques », des
fleurs violettes, vénéneuses, qui fleurissent en automne.
La douceur et la joie se mêlent donc à la tristesse et
même au danger de mort.
Dans la mythologie grecque, le colchique vient de Colchide, située sur les bords de la
mer Noire, patrie de la magicienne et empoisonneuse Médée.
Elle aurait créé cette fleur en versant quelques
gouttes de cette liqueur magique.
Au fil de la lecture, nous comprenons que ces fleurs renvoient à Annie
Playden.
En quoi le cadre bucolique permet l’évocation d’une féminité florale vénéneuse ?
MOUVEMENT 1 : Lien entre un beau paysage empoisonné et les yeux de l’être aimé (v.1 à 7)
vers 1 : Le pré est vénéneux mais joli en automne
Le poème installe un cadre bucolique grâce au champ lexical de la nature : « pré », puis ensuite aux vers
suivants : « vaches », « Le colchique », « lilas », « fleurs ».
La saison de l’automne évoquée au vers 1 et
6 (« en automne », « cet automne ») est souvent associée à la mélancolie, notamment dans l’esthétique
romantique.
Il fait le lien entre sa vie amoureuse, son univers personnel et celui de la saison dans une
sorte de paysage état d’âme.
Cependant, on repère une première contradiction au sein de cette nature avec l’antithèse : « vénéneux
/ joli » qui montre que le colchique associe le venin et la beauté.
On comprendra quelques vers plus loin
que cette colchique désigne une femme-fleur au charme enivrant mais mortel.
vers 2 et 3 : Les vaches y paissant
Lentement s’empoisonnent
L’alexandrin est disloqué et devient deux hexasyllabes ( = vers de six syllabes) : le poème d’Apollinaire
s’apparente alors à un sonnet déstructuré car si on réunit les vers 2 et 3 on retrouve les 14 vers d’un
sonnet en alexandrins traditionnel.
Ce découpage ralentit le rythme du poème à l’image de l’adverbe « lentement » et de l’assonance en
[an] : « paissant / lentement » pouvant suggérer la lenteur avec laquelle le poison se diffuse.
De même
que l’allitération en [v] qui se diffuse dans toute la strophe : « vénéneux », « vaches », « violâtres ».
Les premières victimes des colchiques sont « les vaches ».
On peut voir dans le choix de cet animal
bovin une forme de modernité dans la mesure où l’auteur utilise dans son poème un élément prosaïque
( = quelque chose qui manque de noblesse).
vers 4 et 5 : Le colchique couleur de cerne et de lilas
Y fleurit tes yeux sont comme cette fleur-là
La double métaphore : « Le colchique couleur de cerne et de lilas » et la comparaison « Y fleurit tes yeux
sont comme cette fleur-là » permet un rapprochement entre la fleur et les yeux de la femme aimée.
Le
poème ressemble alors à un blason ( = court poème célébrant une partie du corps féminin).
Cette métaphore rend compte de la dualité de la fleur et de la femme : la beauté avec le « lilas » et la
maladie avec le « cerne », désignant la zone bleue autour des yeux souvent signe de fatigue.
Le rejet (= un mot appartenant à la phrase d’un vers et rejeté au vers suivant) : « Y fleurit » met en valeur
cette dualité.
Le verbe « fleurir » a pour sujet « le colchique » du vers 4.
Pourtant, comme il est
immédiatement suivi du groupe nominal « tes yeux », on pourrait croire que « tes yeux » est en fait le
véritable sujet du verbe « fleurir » ce qui va renforcer l’image d’une femme magicienne.
vers 6 : Violâtres comme leur cerne et comme cet automne
On observe deux comparaisons péjoratives : « Violâtres comme leur cerne et comme cet automne ».
Le suffixe dépréciatif « -âtres » donne....
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