La Princesse de Clèves, explications linéaires Explication linéaire I : de « Madame de Chartres, qui avait eu tant d’application […] » à « […] quand on était jeune. » (Première partie)
Publié le 13/06/2022
Extrait du document
«
La Princesse de Clèves, explications linéaires
Explication linéaire I : de « Madame de Chartres, qui avait eu tant d’application
[…] » à « […] quand on était jeune.
» (Première partie)
Texte I
Madame de Chartres, qui avait eu tant d'application pour inspirer la
vertu à sa fille, ne discontinua pas de prendre les mêmes soins dans un lieu où
ils étaient si nécessaires, et où il y avait tant d'exemples si dangereux.
L'ambition et la galanterie étaient l'âme de cette cour, et occupaient également
les hommes et les femmes.
Il y avait tant d'intérêts et tant de cabales
différentes, et les dames y avaient tant de part, que l'amour était toujours mêlé
aux affaires, et les affaires à l'amour.
Personne n'était tranquille, ni
indifférent ; on songeait à s'élever, à plaire, à servir ou à nuire ; on ne
connaissait ni l'ennui, ni l'oisiveté, et on était toujours occupé des plaisirs ou
des intrigues.
Les dames avaient des attachements particuliers pour la reine,
pour la reine dauphine, pour la reine de Navarre, pour Madame, sœur du roi,
ou pour la duchesse de Valentinois.
Les inclinations, les raisons de
bienséance, ou le rapport d'humeur faisaient ces différents attachements.
Celles qui avaient passé la première jeunesse et qui faisaient profession d'une
vertu plus austère étaient attachées à la reine.
Celles qui étaient plus jeunes et
qui cherchaient la joie et la galanterie faisaient leur cour à la reine dauphine.
La reine de Navarre avait ses favorites ; elle était jeune et elle avait du pouvoir
sur le roi son mari : il était joint au connétable, et avait par-là beaucoup de
crédit.
Madame, sœur du roi, conservait encore de la beauté, et attirait
plusieurs dames auprès d'elle.
La duchesse de Valentinois avait toutes celles
qu'elle daignait regarder ; mais peu de femmes lui étaient agréables ; et
excepté quelques-unes qui avaient sa familiarité et sa confiance, et dont
l'humeur avait du rapport avec la sienne, elle n'en recevait chez elle que les
jours où elle prenait plaisir à avoir une cour comme celle de la reine.
Toutes
ces différentes cabales avaient de l'émulation et de l'envie les unes contre les
autres : les dames qui les composaient avaient aussi de la jalousie entre elles,
ou pour la faveur, ou pour les amants ; les intérêts de grandeur et d'élévation
se trouvaient souvent joints à ces autres intérêts moins importants, mais qui
n'étaient pas moins sensibles.
Ainsi il y avait une sorte d'agitation sans
désordre dans cette cour, qui la rendait très agréable, mais aussi très
dangereuse pour une jeune personne.
Madame de Chartres voyait ce péril, et
ne songeait qu'aux moyens d'en garantir sa fille.
Elle la pria, non pas comme
sa mère, mais comme son amie, de lui faire confidence de toutes les
galanteries qu'on lui dirait, et elle lui promit de lui aider à se conduire dans
des choses où l'on était souvent embarrassée quand on était jeune.
P1 de l’introduction : cf.
p.1 du présent développement, dont vous ne prendrez que la
fleur et ferez votre miel.
Situation du passage : 1re partie, présentation de la cour (roman historique), arrivée de
Mlle de Chartres (nouvelle galante), scène de 1re rencontre chez le joailler avec Monsieur
de Clèves, où elle rougit du désir qu’elle suscite.
Ce dernier loue sa beauté à la Cour sans
connaître son identité le soir même chez Madame, sœur du roi ; Madame de Dampierre
reconnaît alors Mlle de Chartres et la nomme enfin pour le prince de Clèves.
Le jour
suivant, Madame raconte à Mlle de Chartres l’étonnement de Monsieur de Clèves, et les
fait se rencontrer chez elle.
Mlle de Chartres suscite aussi l’admiration du chevalier de
Guise.
Elle devient ainsi le sujet de toutes les conversations.
La reine dauphine fait de
Mlle de Chartres sa favorite, cette dernière est aimée et admirée de toute la cour (excepté
de Madame de Valentinois par haine du vidame de Chartres favori de la reine).
Le prince de Clèves devient passionnément amoureux de Mlle de Chartres, ainsi que le
chevalier de Guise.
Il pense être favori –il est le premier à l’avoir admirée– mais craint
des réticences du côté de son père, le duc de Nevers, du parti de la duchesse de
Valentinois.
Composition ou mouvement : Le passage se présente comme encadré par le point de
vue de Madame de Chartres encline à protéger sa fille des dangers de la cour et présente,
en son centre, une description ou un portrait de la cour.
On observe en effet d’un côté
les craintes et les résolutions prises par Madame de Chartres au sujet de sa fille, de l’autre
une description générale de l’ambition et de la galanterie qui règnent à la cour.
Projet de lecture : Cet entrecroisement favorise les liens, dans l’écriture, les vues et les
visées de Mme de Lafayette, entre la perspective politique et la représentation de la
passion amoureuse.
Nous montrerons alors comment la passion s’historicise, en
s’inscrivant dans la mise en place d’une société de cour qui relève du pessimisme des
années 1670 : la passion est déchue sur le mode augustinien, et revêt la forme d’une prise
de pouvoir, d’une recherche de faveurs.
Cet élan corrompu par les mœurs pose la
question de la place de l’intime, de l’authenticité et de la transparence de l’être et de
l’amour.
Y a-t-il encore une place pour « l’inclination naturelle » ?
I- Un roman de cour
1- Une description fort sombre de la cour
Madame de Chartres apparaît bien comme le sujet grammatical, thématique et
regardant de la scène et de la Cour.
Relative proprement explicative, mais qui détermine
le regard et légitime le discours et la description qui suivent.
Ecriture et point de vue
féminins d’une éducation des femmes : dimension édifiante de l’œuvre > éducation
morale à la « vertu » pour qui possède naissance et beauté.
Litote (cf.
Gide) « ne
discontinua pas » : affirmation double par la négation, marquant la dimension cruciale de
la protection de sa fille et des lectrices.
Sens intensif de « soins », au sens de souci.
Périphrase particulièrement expressive de la cour ainsi nommée pour la première fois
dans le passage : hyperonyme générique de « lieu », assorti de deux relatives en
parallélisme du même pronom « où ».
Mais derrière le lieu, le cadre et le décor, il s’agit
bien d’un discours sur les acteurs et personnages de la Cour.
Parallélisme entre règle et
exemples, théorie et pratique, qui redouble l’imminence du danger, et est scellé par la
prosodie, les intensifs et la place finale des adjectifs expressifs.
Imparfait : descriptif et itératif, d’une action habituelle dans le passé, ici > règle
commune, usage.
Ambition // galanterie = passion = moyen de parvenir, de se placer ;
introduit la corruption de l’âme (« âme de la cour » = passion qui a envahi l’intériorité.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Explication linéaire La Princesse de Clèves : le portrait de Mlle de Chartres
- explication linéaire : Madame de La Fayette, La Princesse de Clèves, 1678 « Il parut alors une beauté
- Argument lecture linéaire sur la princesse de clèves - scène d'aveu et caractère exceptionnel des personnages
- explication linéaire Wajdi Mouawad, Incendies , Première partie, « Incendie de Nawal », 2009, Léméac
- Analyse linéaire la princesse de Clèves - Analyse linéaire L’apparition à la cour