La création artistique

« « Je suis une force qui va ! Agent aveugle et sourd de mystères funèbres ! Une âme de malheur faite avec des ténèbres ! Où vais-je ? Je ne sais.

Mais je me sens poussé D'un souffle impétueux, d'un destin insensé.

Je descends, je descends et jamais ne m'arrête.

» Ses mots prononcés par Hernani, héros éponyme de la pièce de Victor Hugo.

Hernani est une figure exemplaire du héros romantique : passionné, révolté, ange et démon à la fois, déchiré entre ses aspirations contradictoires.

Par ses propos Hernani reflète le projet de la création artistique.

L’artiste, doté d’une sensibilité particulière lui permettant d’exprimer son « moi » intérieur, en explorant la profondeur de son âme.

À travers les divers moyens d’expression les mots, la poésie, la peinture… les artistes tentent de se découvrir en extériorisant leur vécu, par leur sensibilité exacerbée.

Ainsi l’artiste, est le médiateur entre l’essence transmise par le monde qui l’entoure et l’exaltation créatrice de sa sensibilité.

Dans quelle mesure, la sensibilité créatrice forme un paradoxe ? L’artiste est-il tiraillée par une force dualiste créatrice et destructrice ? D’emblée, la sensibilité artistique caractérisant du génie de l’artiste est singulière au monde.

Cette condition de création artistique, rend l’artiste à un statut sensible et divin.

En effet, l’artiste qui se trouve au cœur du monde, traduit son essence par le biais de sa sensibilité, par sa perception particulière du monde qui s’offre à lui et auquel il s’ouvre.

Possédant le pouvoir de la parole, de l’écriture, des divers formes d’art il peut transcrire et transmettre son ravissement de même que sa souffrance, ce qui montre sa condition de sensibilité.

En surcroît, comme le dit Bergson « l’artiste voie la réalité nue et sans voiles » l’artiste est un visionnaire, capable de percevoir la réalité et la transmettre avec authenticité et véracité.

L’artiste, en particulier le poète est une figure transcendante et divine capable d’accéder à l’essence des choses, comme le dit Rimbaud dans son poème la Bateau ivre «et j’ai vu quelquefois ce que l’homme a cru voir », c’est le poète voyant capable d’accédé à l’inconnu, faisant l’expérience du monde. En effet, comme il le décrit dans le Bateau ivre, la poésie, l’atout du poète, est un privilège, elle le moyen pour le poète d’accéder au sens cachée du monde, à la lumière par le détachement et la rupture avec la société, avec les règles et les normes du monde.

Le poète s’évade et s’exalte par sa poésie.

L’expérience de la voyance poétique est alors une forme de renaissance, de libération pour enfin accéder à l’essence du monde, aux « quintessences ».

C’est la condition poétique selon Rimbaud « le poète se fait voyant par un long et raisonné dérèglement de tous les sens » (Lettre à Paul Demny).

Alors, cette condition fondamentale pour accéder à la voyance poétique, forme une épreuve qui une fois surmontée, élève le poète au titre de « suprême Savant ».

Ainsi, à travers le génie de Rimbaud on avise et perçoit, la grandeur et la force du poète voyant.

De même, Hugo reprend l’idée du poète visionnaire en attribuant au poète le rôle de messager en le comparant à un prophète éclairant l’humanité dans son poème Les rayons et les ombres.

Notamment, les artistes explorateurs et expérimentateurs de notre monde, son dotée de cette unique faculté qui les distingue du reste et faisant d’eux fin connaisseur de notre monde.

A partir de cette voyance artistique, traduit par l’ardeur et la vigueur de leur pouvoir, les artistes sont capables de capter l’essence du monde, et de mettre des mots sur leur sensibilité exhaler. D’ailleurs, avec l’émergence de l’ère romantique et de la sensibilité individuelle, la nature devient le refuge salvateur, le lieu d’une harmonie retrouvée, le paysage se fait état d'âme et miroir des esprits des romantiques.

Ainsi, cette nature devient le cœur de l’imagination artistique, elle est la source déclencheur de leur émotions et sentiment, face à son immensité et sa grandeur les artistes s’ouvrent à cette nature qui s’offre. Elle anime leurs émotions, d’où la rêverie, le centre du mouvement romantique, émerge.

D’ailleurs, Rousseau précurseur du romantisme, raconte dans le cinquième chapitre de son œuvre, Les rêveries du promeneur solitaire, son vécu dans la nature.

À travers la description du paysage d’une nature mouvementée et jouissante de vie, tout en expriment sa sensibilité face à cette nature idyllique « là le bruit des vagues et l’agitation de l’eau fixant mes sens et chassant de mon âme tout autre agitation la plongeaient dans une rêverie délicieuse », il acquiert a un parallélisme entre son état d’âme apaisait et la nature sublime qui le baigne avec sa tendresse « l’uniformité du mouvement qui me berçait ».Par cette immersion dans la beauté et le sublime de la nature, Rousseau arrive à la fin de son texte à une métaphore (leçon) sur la vie et sur l’existence « Tout est dans un flux continuel sur la terre : rien n’qui s’attachent aux choses extérieures passent et changent nécessairement comme elles » l’observation de la nature lui permet alors une réflexion sur le monde .Il transmet alors sa vision aux autres et sert de guide (par ses interprétations fondé sur l’observation de la nature).De même, le peintre allemand Friedrich, traduit par ses tableaux cette empreinte du romantisme et de la sensibilité exacerbée face à l’ampleur de la nature, à travers un personnage central entouré par le vaste étendue de la nature, faisant de lui alors un contemplateur sensible du paysage naturel.

Comme on le retrouve dans ses tableaux Le Rêveur ou les Ruines d’Oybin en Allemagne et Le Voyageur contemplant une mer de nuage.

Dès lors, ses artistes transmettent leur contact et rapport avec la nature, source apaisante de création, à travers leurs œuvres.

Alors nous offrant leur perception du monde par le biais de leur sensibilité face à l’impact de la nature idyllique. En outre, la dimension esthétique de la création artistique, de l’œuvre exerce un impact profond auprès du destinataire.

La sensibilité du créateur qui fonde son œuvre touche et marque, l’observateur de celle-ci, ce qui montre la force de la sensibilité artistique.

Les couleurs, les formes, les images, les sonorités, la musicalité, la versification, le choix des mots… Ses détailles que l’artiste utilise dans sa création formant ainsi une œuvre joue un rôle sensible auprès du public.

C’est la puissance enchanteresse de l’artiste qui captive et fascine les autres, ainsi leur permettant d’exprimer leur sensibilité de même (une sensibilité partagée, comme un cycle).

Ainsi, Orphée, figure mythique et divine, connu pour sa force de subjuguer son entourage par son lyrisme ensorceleur.

Orphée, aède de l’antiquité, par la puissance de son chant enchanteur, sa voix, accompagnée de sa lyre est capable d’émouvoir et d'agir sur la nature, sur les animaux, sur les humains et sur les dieux eux-mêmes.

L’œuvre, résultat de la création artistique devient médiateur. Certes l’artiste est une figure unique qui se distingue des autres, caractérisée par sa sensibilité exacerbée qui fait de lui une figure transcendante.

D’une part, cette marginalité de la société et de l’humanité traduit de son pouvoir et sa force mais d’une autre part elle montre son exclusion de cette société, qui le rejette.

Les artistes sont souvent incompris.... »