Exposé de Coups de Pilon de David Diop
Publié le 21/06/2023
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Exposé de Coups de Pilon de David Diop
INTRODUCTION
La Négritude s’est d’abord imposée comme un mouvement littéraire et socio-politique qui vise la
réhabilitation de l’homme noir dans toute son authenticité raciale c'est-à-dire un combat pour la libération de
l’Afrique.
En effet, cette lutte ayant pour objectif la décolonisation de tout le continent noir et le rêve d’une
Afrique libre fut d’abord celui des intellectuels qui ont, par la plume, défendu les valeurs ancestrales et les
droits de leurs peuples.
A l’instar de ces écrivains, David Diop viendra dans Coups de pilon, chanter sa race,
célébrer son continent, refuser la soumission, éveiller la conscience du peuple, condamner l’aliénation,
militer pour l’indépendance de toute l’Afrique.
I.
BIOGRAPHIE ET BIBLIOGRAPHIE DE L’AUTEUR
a) Biographie
De son nom complet David Léon Mandessi Diop, il est né le 9 juillet 1927 à Bordeaux, d'un père sénégalais,
G.
Mamadou Diop Yandé et d'une mère camerounaise, Maria Mandessi Bell.
En 1935, à l'âge de huit ans,
son père décède et David est élevé aux côtés de ses cinq frères et sœurs par sa mère.
À cause de sa santé fragile, David vit une partie de son enfance dans les hôpitaux en France - notamment
pendant la période de l'occupation et de la guerre.
Il se découvre alors une passion pour la littérature et ne
tarde pas à écrire pour exprimer ses sentiments.
Il entre d'abord en Faculté de Médecine, puis se tourne vers les lettres modernes.
Au cours de ses études,
David a Léopold Sédar Senghor comme professeur.
Après avoir obtenu sa licence, il part pour le Sénégal où
il enseigne au lycée Maurice Delafosse.
En 1952, il épouse une Sénégalaise, Virginie Kamara, dont il divorcera quelques années plus tard.
Ses premiers poèmes sont publiés dans la revue Présence Africaine, et aussitôt reproduits par Léopold Sédar
Senghor dans son Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache de langue française en 1948.
En 1958, comme beaucoup d'autres, David Diop répond à l'appel de Sékou Touré et part enseigner à Kindia
(Guinée), où il accepte en tant que membre du Parti africain de l'indépendance (PAI) d'assurer les fonctions
de directeur de l'École normale
Alors qu'il était en vacances administratives, il meurt au large des côtes du Sénégal dans un accident d'avion
le 29 août 1960.
Il avait pris place à bord du vol 343 Air France, un Lockheed L-1649, avec 54 autres
passagers et 8 membres d'équipage.
Il n'y eut pas de survivants, et la commission d'enquête n'a jamais
déterminé les causes de ce drame.
b) Bibliographie
En 1949, il publie dans Présence Africaine un article intitulé Rythmes et chants d’Afrique qui sonne
comme une autocritique quotidienne et rigoureuse des insuffisances rythmiques et méthodiques des jeunes
artistes africains.
En 1951, David se convainc d’abandonner les études de médecine pour entreprendre celles de lettres.
Il
s’inscrit à Montpellier la même année et rencontre celle qui deviendra la mère de ses trois enfants, Rama
Kam (Virginie Kamara).
En 1953, il publie dans les numéros 3 et 4 de Présence Africaine le poème « A un enfant noir » et un article
sur les poètes africains.
En 1956, il publie son unique recueil de poèmes, Coups de pilon.
De retour au Sénégal, il enseigne au lycée Maurice Delafosse en 1957/58 où il rencontre sa femme Yvette,
disparue avec lui dans la catastrophe aérienne du 29 Août 1960.
En somme à la lumière de cette approche biographique, nous retiendrons que David Diop, malgré sa
jeunesse tumultueuse a eu le mérite de surmonter sa souffrance, d’avoir affronté les études difficiles pour
s’élever.
Au cœur de ses épreuves, au long de ses longues nuits d’hôpital il s’est identifié à son peuple
faisant de ses souffrances, de ses angoisses et de son espoir son credo.
II.
ANALYSE DE L’ŒUVRE
a.
Le titre
Le pilon est cet instrument domestique que les femmes utilisent pour moudre la céréale dans le mortier.
Il
est donc un instrument de transformation qui permet à David de rapprocher son utilité à celle de la poésie
africaine qui doit se proposer de transformer les consciences africaines.
Au-delà, le titre est aussi une
métaphore qui prolonge l’encrage du poète et son attachement à son Afrique.
Le titre renvoie à une signification pédagogique qui incite au travail mais au travail libérateur.
C’est une
invite des africains au travail qui les attend en même temps qui les plonge dans une sorte de retour au passé,
au bon passé, le passé noble, le passé des pilons, seule vérité de l’homme noir.
C’est dans cette perspective
qu’il faut placer les coups de pilon qui résonnent au contact du mortier, chant ample, scandé, tendre et
violent.
Ils sont une invite au travail, à l’aube naissante d’un monde nouveau.
L’aube, c’est l’heure africaine
par excellence, l’heure où l’homme des pays chauds peut oser défier le travail.
C’est d’ailleurs à l’aube que
retentissent les coups de pilon symbole de la survie humaine.
b.
Structure et thèmes du recueil
Le recueil, Coups de pilons, de l’édition originale est structuré en trois parties qui contiennent,
respectivement 17 poèmes ; Cinq poèmes et enfin Poèmes retrouvés renfermant 21 pièces.
Le recueil s’organise autour de trois thèmes majeurs : la dénonciation du colonialisme, la réhabilitation du
continent noir et l’appel des opprimés à la lutte libératrice qui correspondent à l’axe chronologique du temps
(Passé- Présent -Futur).
-
La dénonciation du colonialisme
Ce thème permet à David Diop d’évoquer la situation qui prévaut à l’heure des colonies.
C’est une situation
très difficile pour les africains exposés aux assassinats, aux vols, aux tortures… Le blanc renverse
complètement l’ordre naturel des choses.
Adieu la tranquillité, adieu le bonheur, adieu la vie.
C’est tout le
sens du poème « Celui qui a tout perdu », poème dont la structure (2 strophes) traduit bien la rupture entre
les deux époques : la première partie est consacrée à l’heureuse Afrique tandis que la deuxième partie
introduite par l’adverbe « Puis » décrit l’enfer créé par la situation coloniale.
Aux éclats de joie succède le
silence lourd.
Le soleil s’éclipse, l’uniforme de guerre couvre la beauté nue des enfants, le grincement des
chaînes remplace le son du tam-tam.
On détruit, on asservit pour mieux piller.
Hommes sans cœur, les
colons se vautrent dans les valeurs matérielles, le ravage spirituel, le carnage et les barbaries de toutes sortes.
On a affaire à des monstres, des vautours, des hyènes qui disent posséder la science et la technique mais qui
sont dépourvus de sentiments : cf.
le poème « Les vautours » : « Hommes étranges qui n’étiez pas des
hommes / vous saviez tous les livres vous ne saviez pas l’amour ».
Mais il y a plus grave encore : ces savants qui transforment l’Afrique en un gigantesque abattoir tiennent
entre leurs mains un livre qui prêche l’amour.
En fait, s’agissait-il de l’amour de faire des martyrs ? Cela en
a tout l’air comme l’atteste le poème « Le temps des martyrs » : « Le blanc a tué mon père car mon père était
fier, le blanc a tué ma mère car ma mère était belle ».
En somme par des mots concrets, une syntaxe simple,
un langage économique et un style clair, l’auteur de Coups de pilon dénonce la colonisation en accentuant la
brutalité des colons.
-
La réhabilitation du continent noir
Ce thème fait référence dans l’œuvre à l’évocation de l’Afrique d’antan qui contrairement à l’avis de ceux
qui l’ont transformée en enfer n’en était point un.
Voilà pourquoi le poète regrette cette époque.
Alors sans
verser dans le sentimentalisme excessif, David Diop affirme les valeurs originales du continent noir.
L’Afrique est la source de l’identité du noir où qu’il se trouve « Auprès de toi, j’ai retrouvé mon nom/ mon
nom toujours caché.
O mère mienne et qui est celle de tous ».
On voit donc que l’Afrique est la mère patrie
de tous les nègres, mère radieuse, symbole d’affection et d’altruisme.
Cet Afrique mère protectrice est
comme un arbre qui protège de son ombre les valeurs ancestrales.
Ainsi soutiendra-t-il à la page 33 du
recueil « Cet arbre –là, splendidement seul au milieu des fleurs blanches et fanées c’est l’Afrique, ton
Afrique qui repousse, qui repousse patiemment, obstinément et dont les fruits ont peu à peu l’amère saveur
de la liberté.
»
Robuste et fort, on le voit, l’arbre résiste aux forces de destruction, déploie ses forces génératrices et
inlassablement fait naître de nouvelles pousses.
L’arbre est également la source distributrice de l’énergie
nécessaire à l’émergence du peuple noir bafoué, peuple dont David révèle l’âme dans « A ma mère » « A
une danseuse » « Rama Kam »
Pourquoi alors tant de féminité dans l’évocation des fastes culturelles qui réhabilitent l’Afrique ? Le sourire
paisible et réconfortant ainsi que la patience de la mère est symbole d’amour, de dignité et de confiance en
soi.
La beauté sensuelle de la femme noire n’a rien à envier à celle d’une quelconque race supposée
supérieure.
La jeune fille qui danse, cette danse, pur mouvement est l’expression passionnée de....
»
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