Explication linéaire Texte 6 : Les Fausses Confidences, Marivaux, acte 2 scène 13
Publié le 21/01/2023
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Explication linéaire Texte 6 : Les Fausses Confidences, Marivaux, acte 2
scène 13
I – Araminte demande à Dorante d9écrire au comte qu9elle l9épouse
(De « Araminte, d’un air délibéré : Il n’y en aura aucune », à « procès
douteux »)
Dans la scène précédente, Araminte confie à Dubois à propos de Dorante : « j9ai
envie de lui tendre un piège.
» C’est justement ce piège qui prend forme sous les
yeux du spectateur à la scène 13 de l’acte 2 : Araminte feint de vouloir épouser le
comte pour éprouver les sentiments de Dorante.
● La didascalie témoigne de l’« air délibéré » d’Araminte, qui affecte à l’égard
de Dorante une détermination indifférente.
Ce n’est bien évidemment qu’un «
air » qu’elle se donne, soit un masque qu’elle porte pour tenter de faire surgir
la vérité des sentiments de Dorante.
Il s’agit bien d’une nouvelle scène de fausse confidence : Araminte ment en
confiant son projet de mariage, afin de démêler les sentiments qu’éprouve Dorante
pour elle.
● Les ordres à l9impératif qu’elle adresse à son intendant témoignent d’une
relation professionnelle hiérarchisée, où Dorante est à son service : « Ne
vous embarrassez pas, et écrivez le billet que je vais vous dicter ».
Marivaux s’amuse à renverser les attentes du spectateur et les codes de la comédie,
puisque la conversation entre les amants est aux antipodes de la galanterie
amoureuse.
Ce décalage suscite un effet comique.
Dorante est troublé comme l’indique l9interrogation (« Et pour qui, madame ? » ),
mais il est contraint de se soumettre aux codes que sa situation professionnelle
exige, d’où son interrogation accompagnée d’une adresse polie (« madame« )
Araminte explique à Dorante que la lettre annonçant le mariage est « Pour le comte
» et a pour but de « le surprendre bien agréablement » car il est parti «
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extrêmement inquiet« .
L’antithèse « agréablement » / « inquiet », qui évoque les
sentiments du Comte, crée un effet comique car elle reflète aussi la succession
d9émotions qu’éprouve Dorante à cette nouvelle.
Araminte lui inflige volontairement une tâche blessante : il doit écrire à son rival,
pour lui annoncer qu’il épouse celle qu’il aime « en [s]on nom ».
● L’expression « le petit mot » est une litote cruelle car cette lettre ravage
intérieurement Dorante.
La comédie légère repose donc sur des procédés
sadiques.
La fausse confidence suscite de vraies blessures.
● L’adjectif de la didascalie (« Dorante reste rêveur ») pouvait avoir au XVIIIe
le sens fort d’« ému ».
Dorante est sous le choc.
Araminte l’interpelle, lui imposant son rythme, et l’interroge : « À quoi rêvez-vous ? »
À cette question ouverte, Dorante, «toujours distrait.
», répond « Oui, Madame »
comme si on lui avait posé une question fermée.
Sa perte de maîtrise langagière
constitue une perte de pouvoir.
La didascalie suivante montre qu’Araminte parle « à part », de même que Dorante.
Cette scène entre deux personnages se déploie donc sur trois plans : le dialogue
entre les amants, et le dialogue de chacun avec lui-même, et donc avec le
spectateur.
Si les personnages se mentent, ils se disent toutefois la vérité lorsqu’ils
se parlent à eux- mêmes.
Cette double énonciation omniprésente (les répliques
des personnages s’adressent aussi au spectateur) fait le charme et la complexité
de cette scène galante.
Araminte jouit avec cruauté de ce stratagème amoureux, et commente : « Il ne sait
ce qu9il fait ».
Dorante, lui, se croit trompé par Dubois et se lamente : « Ah ! Dubois m9a trompé« .
Le comique repose sur ces vertigineux entrelacements de mensonges qui se
répondent.
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L’incapacité de Dorante à trouver du papier (« Madame, je ne trouve point de
papier.« ) illustre sa confusion et a un effet comique : elle réduit l’intendant
rigoureux au rang d’incapable valet.
Par un nouvel impératif, Araminte bouscule son intendant pétrifié : « Écrivez.
»
La lettre dictée par Araminte est savoureuse pour le spectateur car elle a un double
sens : « Hâtez-vous de venir [...] votre mariage est sûr...
».
En effet, la promesse de
mariage s’adresse apparemment au Comte, mais le spectateur comprend
qu’Araminte adresse ces mots de façon détournée à Dorante.
L’impératif « Hâtez-vous » vise à inciter Dorante à se révéler.
La surdité de Dorante semble confirmer à Araminte....
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