en quoi la mise en jeu du regard éloigné permet-elle le retour sur soi ? 

« Dissertation sur les Lettres persanes Au XVIIIe siècle se développe dans toute l’Europe, et en particulier en France un nouveau courant philosophique et littéraire : les Lumières.

Il se fonde sur la raison, pour lutter contre l’obscurantisme, et parvenir à la connaissance.

De plus, à la suite de la traduction des Milles et une Nuits par Antoine GALLAND et par la prolifération de témoignages de voyageurs naît un nouveau courant littéraire : l’orientalisme. Mû par un désir d’exotisme et voulant passer au crible la société européenne du XVIIIème siècle, Montesquieu, auteur français précurseur des Lumières imagine les Lettres persanes.

L’œuvre, un roman épistolaire, sera publiée anonymement à Amsterdam en 1721 dans lequel deux persans découvrent l’Europe. En parlant de ce regard éloigné, Paul Valéry affirme : « C’est comme entrer chez les gens pour les déconcerter ». Ainsi, on pourrait se demander en quoi la mise en jeu du regard éloigné permet-elle le retour sur soi ? Dans un premier temps, nous montrerons quelles formes prend le regard éloigné puis nous expliquerons comment ce regard éloigné favorise le retour sur soi. Le regard éloigné est un regard à distance suffisamment détaché pour être « objectif ».

En effet, porter un regard éloigné sur quelqu’un ou quelque chose permet de le mettre à distance pour l’observer avec neutralité, sans affect et sans a priori.

Au travers de différentes œuvres et principalement Les Lettres Persanes, nous verrons que ce regard éloigné peut prendre plusieurs formes. Tout d’abord, il peut s’agir d’un décentrement par exemple culturel. Ainsi, en faisant parler des personnes étrangères issues d’une culture lointaine, l’auteur permet de renouveler le regard qu’il porte sur la société. En effet, l’observation via des mœurs étrangères permet de regarder sa culture avec du recul voire de la critiquer.

Par exemple dans les Lettres Persanes - lettre XXIV - Rica décrit à Ibben l’impolitesse des parisiens du point de vue persan.

Encore, dans Micromégas, Voltaire utilise la perspective de deux géants pour critiquer la Terre et ses habitants.

Ce même procédé est également utilisé dans Cannibale de Didier Daeninckx où Gocéné décrit la France à travers le regard d’un kanak traumatisé par ce que l’on appelle le scandale de l’exposition coloniale. Une autre façon de mettre en œuvre le regard éloigné consiste à multiplier les points de vue.

C’est ce que propose Montesquieu dans Les Lettres Persanes grâce à la forme épistolaire qu’il emploie.

Ainsi, grâce aux échanges de correspondances entre Uzbek et Rica mais aussi avec leurs amis restés en Perse – Ibben à Smyrne Ibben, Nessir et Mirza à Ispahan – ou encore Uzbek avec ses eunuques et ses femmes, on peut. »