analyse lineaire a une passante baudelaire
Publié le 06/10/2022
Extrait du document
«
Objet d'étude : La poésie du XIX au XXIe siècle
« À une passante », Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal, « Tableaux parisiens », XCIII 1861.
À une passante
1
La rue assourdissante autour de moi hurlait.
Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,
Une femme passa, d'une main fastueuse
Soulevant, balançant le feston et l'ourlet ;
5
Agile et noble, avec sa jambe de statue.
Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,
Dans son œil, ciel livide où germe l'ouragan,
La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.
10
Un éclair...
puis la nuit ! - Fugitive beauté
Dont le regard m'a fait soudainement renaître,
Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?
Ailleurs, bien loin d'ici ! Trop tard ! Jamais peut-être !
Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,
Ô toi que j'eusse aimée, ô toi qui le savais !
Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal, « Tableaux parisiens »,
XCIII 1861.
Introduction du commentaire composé.
En 1857 Baudelaire publie pour la première fois, Les Fleurs du Mal.
A cette époque, Paris
connait de profonds changements initiés par le Baron Haussman.
La ville se transforme sous le
regard du poète et c’est dans ce contexte qu’une nouvelle édition des Fleurs du Mal, remaniée
après le procès, est publiée en 1861.
Baudelaire ajoute à son recueil une section, « Tableaux
Parisiens », et y évoque dans un Paris en pleine mutation, des êtres marginaux évoluant dans un
espace urbain bouillonnant.
Dans ce sonnet Baudelaire se remémore sa rencontre avec une belle
jeune femme dans les rues de la capitale.
Nous nous demanderons dès lors comment ce rendezvous manqué incarne à la fois la recherche de l’idéal baudelairien et la victoire du spleen.
Nous
verrons dans un premier temps que cette passante révèle l’idéal, puis dans un second temps, nous
montrerons que cette rencontre conduit le poète vers un spleen inévitable.
ANALYSE LINÉAIRE.
Piste de lecture : Comment Baudelaire renouvelle-t-il le topos de la rencontre amoureuse ?
Comment cette rencontre traduit-elle l’idéal baudelairien ?
Mouvements :
1e strophe : L’apparition de la passante
2e strophe : La fascination/Les émotions du poète
3e et 4e strophes : La chute : l’expression du désespoir ou Un amour impossible.
Correction de l’analyse linéaire (réalisée à partir de la page internet suivante) :
Objet d'étude : La poésie du XIX au XXIe siècle
https://jpeuxpasjaibacdefrancais.wordpress.com/2020/11/05/explication-lineaire-n4-a-unepassante-charles-baudelaire/
MOUVEMENT 1 : L’apparition de la passante (v 1 à 5)
• Nous pouvons constater que le premier vers n’est pas consacré à la description de la
passante mais à Paris.
Cet alexandrin se caractérise par une allitération en r et en s :
« « La rue assourdissante autour de moi hurlait » qui rend audible le bruit de la ville.
• La personnification permise par le verbe de parole « hurlait » peint une rue bruyante,
hostile.
Ces sonorités peuvent également annoncer l’arrivée fracassante de la femme
et le futur coup de foudre.
Baudelaire fait le choix de l’originalité en la faisant
apparaître au milieu du brouhaha et de l’effervescence parisienne.
• Pourtant, elle semble arrêter le temps comme le suggère l’énumération du vers 2 :
« Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse, »
• Les adjectifs qualificatifs qui la désignent mettent en évidence sa grâce : « longue,
mince ».
• L’oxymore : « douleur majestueuse » révèle que Baudelaire est attiré par cette femme
par, ce que ce qui émane d’elle, ce mélange de beauté et de souffrance, fait écho aux
deux sentiments qui l’animent : le spleen et l’idéal.
• Le vers 2 retarde l’arrivée de la passante puisque le verbe de mouvement : « passa » et
le sujet : « Une femme » ne figurent que dans le vers qui suit.
Il y a, ainsi, un effet
d’attente.
Le lecteur, comme le poète, aperçoit, d’abord, une silhouette qui se précise
petit à petit.
Effectivement, la description de la passante épouse le regard du poète qui
l’observe de loin et va, par la suite, la contempler de près.
• L’hyperbole : « d’une main fastueuse » (v 3) appartient au champ lexical de la noblesse
qu’il est possible de noter dans le sonnet : « majestueuse » (v 2), « fastueuse » (v 3),
« noble (v 5).
Son élégance est notable dans le vers 4 : « Soulevant, balançant le feston
et l’ourlet ».
La toilette de la passante paraît danser, impression renforcée par le
rythme du vers puisqu’il est construit sur quatre temps de trois syllabes : « Soulevant
(3) / Balançant (3) / le feston (3) et l’ourlet («3) ».
• L’allitération en s : « soulevant /balançant / feston » accentue plus encore cette
dimension musicale en mimant le froissement du tissu.
La phrase qui décrit la passante
occupe quatre vers et se termine dans le vers 5 où la métaphore : « avec sa jambe de
statue » suggère que sa beauté est si parfaite qu’elle est l’œuvre....
»
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