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la grève de 1953

Publié le 06/02/2023

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« LA GRÈVE DE 1953 Introduction : La montée en puissance du phénomène gréviste se poursuit et atteint son point culminant à l’été 1953 qui est un moment de forte poussée gréviste et qui, davantage institutionnalisé, acquiert une plus grande régularité au cours de ces Trente Glorieuses.

Un peu moins connues que les grèves de 1947 et de 1948, celles de 1953 n’en constituent pas moins un des temps forts de l’agitation sociale pendant la Quatrième République et aussi, dans une certaine mesure, un tournant dans l’histoire des grèves en France puisque c’est l’ensemble du monde salarié qui s’empare de la grève.

Ainsi ce sont les fonctionnaires, qui émergent véritablement sur la scène des conflits du travail.

La grève des services publics de l’été 1953 marque la mise en mouvement massive de cette catégorie de salariés. Ainsi, Du 4 au 25 août 1953, la France connaît l’un des plus importants conflits sociaux de son histoire avec, à son apogée, près de 4 millions de grévistes.

Insolite, spectaculaire et confus, le mouvement n’a pourtant guère marqué la mémoire collective, quand bien même il procédait d’une tentative de dépassement par le social des impasses politiques de la période. Résumé : A l’été 1953, lorsque le gouvernement Laniel entend remettre en cause les régimes de retraite du secteur nationalisé, il avive un ancien contentieux, qui porte également sur le pouvoir d’achat des fonctionnaires, ou la titularisation des fonctionnaires.

Si le mouvement part des postiers et s’étend à la fonction publique, il gagne les entreprises publiques à l’empreinte ouvrière plus nette, comme les Charbonnages de France ou la SNCF, pour s’étendre ensuite à la métallurgie, le bâtiment, la chimie, etc., rassemblant peut-être 4 millions de grévistes.

Le gouvernement réplique par la réquisition et peut compter sur le modérantisme des négociateurs FO et CFTC pour conclure un accord hâtif et faire reprendre le travail. Événement : Tout commence avec le plan de rigueur que prépare le gouvernement de centre droit présidé par Joseph Laniel.

Avec une batterie de mesures classiques, le projet d’un recul de l’âge de la retraite des agents des services publics met le feu aux poudres et déclenche une explosion sociale estivale inattendue.

Les allongements prévus de la vie active atteindraient jusqu’à sept années.

Une fuite sur ces changements à venir attise les craintes des personnels visés qui dénoncent une « violation unilatérale » du contrat passé avec l’État. Le 4 août : Conscient de l’impopularité des mesures préparées, Laniel s’empresse d’obtenir des députés, en juillet, l’autorisation de légiférer par décrets.

Ces derniers doivent être présentés, en pure formalité, devant le Conseil supérieur de la fonction publique (CSFP).

Sans trop y croire, la CGT, le Syndicat autonome et la CFTC (la CFDT, qui en est issue, n'existait pas encore) appelèrent à organiser des pétitions, des délégations et un débrayage d'une heure contre les décrets annoncés.

La FO s'était contentée le 3 août d'une mise en «état d'alerte» de ses syndicats.

Le 4 août donc, l'activité cessait dans la quasi-totalité des bureaux, des centres et des services postaux mais, comme il était prévu, le travail reprit au bout d'une heure, sauf à Bordeaux.

La décision des postiers bordelais de se déclarer en grève illimitée crée la surprise.Là, réunis dans la cour de la poste principale, de nombreux facteurs expriment leur désaccord avec la mollesse des dirigeants fédéraux.

Un militant de FO, Jean Viguié, de tendance anarcho-syndicaliste, prend le micro et résume la situation: «Seule une grève générale et illimitée, dit-il, peut aboutir à faire reculer le gouvernement» et conclut en disant: «Pourquoi ne la lancerions-nous pas ?».

Les applaudissements fusent et tiennent lieu de vote. Par téléphone, les postiers grévistes de Bordeaux avertissent eux-mêmes leurs collègues, dans le reste du pays. Le 5 août : La fédération FO des PTT, absente des actions de la veille, puis ses homologues CFTC et Autonomes s’y rallient.

Parti de la base, le mouvement s’emballe, gagnant tout le secteur public dans une improvisation qui bouscule les clivages de la guerre froide.

Les salariés délèguent aux syndicats la conduite de la lutte, mais leur imposent d’agir dans l’unité.

Prises de court, les fédérations s’efforcent de reprendre la main et les confédérations de circonscrire le conflit et de tempérer les ardeurs unitaires des salariés. Le 6 août : L'appel commun à la grève signé par les syndicats CGT, CFTC, FO et CGC d’EDF-GDF demeure exceptionnel. Le 7 août : Une journée d’action proposée par les directions syndicales, devait, à leurs yeux, encadrer et fixer des limites au mouvement.

Elle eut l'effet inverse, elle aboutit à une première généralisation dans tout le pays : 2 millions de grévistes Le 8 août : Lancés pour vingt-quatre heures, quarante-huit heures ou pour une durée « illimitée », les mots d’ordre se télescopent, faisant alterner temps forts et reprises partielles du travail.

Alors que, début août, nombre d’entreprises privées ferment leurs portes pour deux semaines de congés payés, une large partie du secteur public est censée continuer de fonctionner.

Sauf en cas de grève.

Aux gros bataillons précurseurs des PTT, de la SNCF, d’EDF-GDF s’ajoutent bientôt les renforts de la RATP, d’Air France, de la Santé, des Municipaux, etc.

Le secteur public est aux premières lignes causant la pagaille générale : Les retards dans la distribution du courrier, les aléas des communications téléphoniques, l’immobilisation des trains, … Le 9 août : Le Conseil des ministres approuve la forme définitive des décrets litigieux qui paraissent au Journal officiel du lendemain.

Les textes promulgués sont en retrait par rapport à ceux mis en circulation les jours précédents, mais les concessions esquissées ne sont plus de nature à enrayer la grève.

Ainsi, le gouvernement Laniel publie un décret qui vise le régime particulier de retraites des cheminots.

Les cheminots poursuivent alors la grève. Le 12 août : Joseph Laniel, un industriel à l’ancienne, refuse de discuter sous la pression.

Laniel intervient trois fois à la radio nationale, à des heures de grande écoute.

« Non à la grève ! », martèle-t-il. Le 13 août : La grève s’étend à la métallurgie et aux mines, aux banques, aux assurances, à la construction navale Le 14 août : Le bâtiment et l’industrie chimique s’ajoutent à la grève.

Dans le Midi, les viticulteurs dressent des barrages, menacent de s’emparer des préfectures.

Il y a maintenant quatre millions de grévistes.

Les ordures ménagères commencent à s’amonceler sur les trottoirs. Le secteur public donne le ton à une grève dont les modalités épousent au plus près les particularités des branches, administrations et entreprises. Alors qu’elle est problématique au niveau des échelons fédéraux, l’unité se construit dans les services et les ateliers.

Unitaires, mais réalistes, les grévistes se satisfont de comités de grève aux allures de cartels d’organisations qui, reconduits chaque jour, limitent les risques d’initiatives séparées.

L’ambiance de ces retrouvailles, hier impensable, émousse le patriotisme d’organisation et les réflexes sectaires.

Le plaisir de se retrouver ensemble et le sentiment conjoint d’invincibilité métamorphosent la colère initiale en enthousiasme bon enfant.

Par là aussi, 1953 diffère de 1947.

Instruits par de douloureux précédents, les grévistes ne songent pas à occuper leurs lieux de travail et montrent une force tranquille.

Au.... »

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