L'Horloge de Baudelaire - étude linéaire
Publié le 09/05/2023
Extrait du document
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Objet d’étude : La poésie du XIXe siècle au XXIe siècle.
Parcours associé : Modernité poétique ?
Charles Baudelaire, Les Fleurs du Mal, « Spleen et Idéal », « L’Horloge », 1857.
Lorsque Baudelaire publie son recueil Les Fleurs Du Mal en 1857, il se situe encore au carrefour de
trois influences majeures pour la poésie au dix-neuvième siècle :
le romantisme qui privilégie l'expression personnelle des sentiments,
le symbolisme qui s'efforce de révéler le sens caché des choses au moyen des symboles ;
l'expression des sentiments devient alors indirecte;
et le Parnasse qui accorde une attention particulière à la forme et refuse l'engagement de l'Art.
Mais Charles Baudelaire est surtout le précurseur du symbolisme, ce mouvement littéraire qui prône
la suggestion et l’allusion.
Ce mouvement est littéraire et pictural, et il permet de faire appel à l’indicible (qui ne peut être
exprimé), au mystère et aux questions humaines insolubles, telles que celles de la fuite du temps,
qui pèse inéluctablement sur l’Homme.
Comment ce poème symboliste permet-il de transmettre un message tragique?
Nous pouvons relever deux mouvements :
Du vers 1 au vers 12 : la menace effrayante de l’horloge,
Du vers 13 au vers 24 : un conseil philosophique.
Le titre : L’Horloge.
Dès le titre, le temps est représenté par un symbole évident, (repris au vers 1) : « L'horloge ».
L’horloge est donc la représentation allégorique du temps.
Une réflexion sur le temps qui passe.
I- La menace effrayante de l’horloge.
Vers 1 : Horloge ! dieu sinistre, effrayant, impassible,
Reprise du nom commun comme si c’était un nom propre : Apostrophe, le poète interpelle l’horloge,
ce qui est accentué par un point d’exclamation.
Il semble donner une définition de ce qu’est
l’horloge : un dieu : parce qu’il est invincible.
Référence à Chronos qui est le dieu mythologique du
temps.
Énumération d’adjectifs négatifs.
L’adjectif « sinistre » a pour étymologie « qui apporte la mort, qui
donne la mort » ce qui est bien le cas du temps puisque l’issue est la mort.
Les adjectifs « effrayant,
impassible » montrent la puissance de la mort, son inéluctabilité et la peur qu’elle inspire.
Il s’agit d’un dieu indifférent, impitoyable.
V.
2 : Dont le doigt nous menace et nous dit : « Souviens-toi !
La métaphore du doigt menaçant est en fait l’aiguille de l’horloge qui indique l’heure.
Elle reprend
l’idée que l’horloge fait peur, elle menace l’Homme en lui disant, au discours direct : « souvienstoi ».
C’est une référence à une formule philosophique latine qui est « memento mori » qui veut dire
« rappelle-toi que tu vas mourir ».
Cette formule sonne comme un glas (sonnerie d’une cloche, annonçant la mort d’une personne).
A partir du vers 2 et jusqu’à la fin le poète donne la parole au temps, c’est la prosopopée (donner la
parole à un mort ou à un objet).
L’horloge dont l’étymologie est Horâ= heure, « logein » = il dit, en
grec.
V.
3 et 4 :
Les vibrantes Douleurs dans ton cœur plein d’effroi
Se planteront bientôt comme dans une cible ;
Le cœur est métaphoriquement désigné comme étant une cible.
L’être humain va forcément souffrir
à cause du temps qui passe puisqu’il va aboutir à la mort.
Ce côté inéluctable est renforcé par
l’enjambement du vers 3 dans le 4 ce qui transforme des alexandrins en une longue affirmation
péremptoire.
La violence de la blessure est traduite par le verbe « planter » qui montre bien l'idée d'une plaie à
vif , un peu comme si les aiguilles de l'Horloge devenaient des couteaux et transperçaient le cœur de
l'homme.
V.
5 et 6 :
Le Plaisir vaporeux fuira vers l’horizon
Ainsi qu’une sylphide au fond de la coulisse ;
«Plaisir» (comme «Douleur») Allégories.
Mais, alors que la Douleur se plante, càd, prend racine, est durable, le Plaisir est « vaporeux » c’està-dire qu’il est éphémère, il est comparé à une danseuse, une sylphide qui symbolise la légèreté et la
finesse, mais aussi, la fragilité.
V.
7 et 8 :
Chaque instant te dévore un morceau du délice
A chaque homme accordé pour toute sa saison.
Ces vers comme les deux précédents forment un enjambement, imitant l’écoulement inexorable du
temps et créant un effet d’accélération.
Cette strophe comporte les termes qui forment le champ lexical du temps : « Instant » ; « saison »
puis dans les strophes suivantes : « heure » ; « seconde » ; « maintenant » ; « autrefois » ; « le
temps » ; « le jour » ; « la nuit » ; » la clepsydre » ; « tantôt » ;« heure » ; « et le dernier mot du
poème est « trop tard ! ».
Tous ces termes représentent le décompte du temps, instruments ou
moments que l’homme a créé pour mesurer son temps.
V.
9 à 12 :
Trois mille six cent fois par heure, la Seconde
Chuchote : Souviens-toi !-Rapide, avec sa voix
D’insecte, Maintenant dit : je suis Autrefois ,
Et j’ai pompé ta vie avec ma trompe immonde !
La seconde est personnifiée, elle chuchote.
Mais aussi animalisée : sa voix est celle d’un insecte qui
imite le tic-tac de l’Horloge qui répète inlassablement ce bruit régulier durant trois mille six cents
secondes que compte une heure.
Le poème complet fait d’ailleurs 24 vers comme les 24 heures d’une
journée et les alexandrins comportent douze syllabes ce qui forme la moitié de ces 24 heures.
La seconde, personnifiée, répète « Souviens-toi » qui revient comme un refrain, au vers 2 et au vers
10, puis au vers 13 dans toutes les langues, ainsi qu’au vers 19.
L’antithèse entre « Maintenant » et « Autrefois » marquent le passage inexorable du temps.
La métaphore de l’insecte monstrueux qui pompe la vie avec sa trompe immonde reprend des
éléments fantastiques du début du poème : l’horloge qui....
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