Le dormeur du val
Publié le 19/03/2025
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Onglet 1
Le dormeur du val
Introduction
Dans Soleil et Chair, lorsqu 'Arthur Rimbaud écrit : « Le monde a soif d'amour, et tu viendras l'apaiser »,
il exprime son idéal d'une nature vivifiante et maternelle, capable de combler le manque d'amour et de
spiritualité des hommes.
Pour le poète, la nature est une force primordiale, universelle, intimement liée à
la vie et au sacré.
Elle représente un lieu de réconciliation, un retour aux origines où les âmes
tourmentées peuvent trouver paix et sérénité.
Cette vision semble tout aussi transparaître dans le
poème Le Dormeur du Val, poème engagé figurant dans les Cahier De Douai où la nature semble offrir
une ultime consolation à un jeune soldat endormi.
Lecture expressive
Nous verrons donc au travers de cette lecture linéaire Comment Rimbaud présente les atrocités de
la guerre en totale opposition avec son idéal à lui, la nature, en suivant en grande partie le
découpage naturel du texte.
Nous aborderons en premier temps le cadre idyllique et bucolique décrit à
la première strophe, puis le portrait du jeune soldat endormi dépeint à la deuxième strophe.
Pour finir
sur les deux tercets, qui laissent d’abord entrevoir, puis affirmer une triste chute.
Le dormeur du val ⇒ dort/meurt
C’est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls, il dort.
Souriant comme
Sourirait un enfant malade, il fait un somme :
Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine;
Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine
Tranquille.
Il a deux trous rouges au côté droit
I. Cadre bucolique (l.1 à l.4)
C’est un trou de verdure où chante une rivière
Accrochant follement aux herbes des haillons
D’argent; où le soleil, de la montagne fière,
Luit : c’est un petit val qui mousse de rayons.
Cette première strophe est l’instauration d’un cadre bucolique.
En effet, nous pouvons le constater par
le champ lexical de la nature “verdure”, “herbes des haillons” “montagne”.
Cependant, dès le début du
poème, la nature prend une dimension symbolique, surtout si nous sommes déjà familier avec l’écriture
de rimbaud.
En effet, dans le vers “c’est un trou de verdure” “trou” renvoie un cocon de paradis, mais
surtout à une figure maternelle qui nous développerons plus tard.
Nous pouvons aussi relever une personnification filée qui se manifeste à la ligne 1 “chante une rivière”,
à la ligne 2 “accrochant follement” et “la montagne fière”.
Nous assistons donc à une personnification de
la nature qui évoque un endroit agréable et une nature fière de sa création.
La lumière porte une dimension symbolique essentielle au poème qui nous pouvons apercevoir dès la
première strophe par la métaphore “Accrochant follement aux herbes des haillons D’argent” (l.2) qui
évoque l’éblouissement des reflets du soleil sur l’eau qui porte aussi un rejet insistant sur “D’argent”.
Cette dimension est renforcée par le rejet de la ligne 3 à 4.
Le soleil ne luit pas, il baigne de lumière le
paysage “c’est un petit val qui mousse de rayons’.
La lumière est tellement dense qu’elle en devient presque matérielle, elle se dépose sur la surface des
choses, elle devient liquide.
La lumière a donc une dimension métaphysique,
Ainsi donc, dans cette première strophe, Rimbaud dresse un cadre verdoyant et agréable qui ne laisse
pas supposer le caractère engagé du poème.
Pourtant, en ajoutant un personnage dans la seconde
strophe, notamment annoncé par homophonie du terme “luit”, le poète peaufine peu à peu son tableau.
II. Portrait du soldat endormi (l.5 - l.8)
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue,
Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu,
Dort; il est étendu dans l’herbe, sous la nue,
Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Le portrait commence directement par le vers “Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue” (l.5).
En premier lieu, il semble dissonant de placer l’adjectif à la suite du nom.
Il serait plus agréable de dire
“un jeune soldat”.
Par là, on a une accentuation sur jeune : jeune, comme rimbaud.
Ici, on ressent une
proximité, en effet, ce n’est qu’un concours de circonstance qui ont fait qu’il n’est pas à la place du
soldat.
La position du soldat est porteuse d’ambiguïté.
Elle fait d’abord penser au sommeil avec un champ
lexical dans l’ensemble de la strophe : “bouche ouverte” ; “Dort” ; “étendu” ; “lit”.
Le verbe “dort” est d’ailleurs repris par 3 fois (v.
7 ; 9 ; 13), comme pour insister sur l’immobilité du
corps.
Comme dans la première strophe, les enjambements mettent des termes en valeur : “Dort” au vers 7 et
“Pâle” au vers 8.
On voit clairement que le personnage se dégage du paysage dans lequel il se trouve.
Il n’entre pas en
harmonie avec la nature.
Son immobilité parfaite s’oppose au mouvement incessant de la nature, rappelée par les références à
l’eau (toujours en mouvement) : “baignant” ; “pleut”.
De plus, au niveau des couleurs, l’antithèse du vers 8 permet d’opposer “pâle” avec la métaphore “la
lumière pleut”.
Donc dans cette strophe, la nature continue d’évoquer la continuité de la vie et l’harmonie, mais le
soldat fait tâche.
Lui seul ne bouge pas, lui seul est pâle, et la chaleur de la première strophe ne semble
pas pouvoir le réchauffer.
Au contraire, la seconde strophe insiste davantage sur le froid : “frais cresson
bleu” ; “tête nue”.
Cependant cette opposition semble ne pas faire sens dans une certaine mesure.
En effet, la deuxième
strophe est aussi marquée par un contact intime fort entre la nature et le soldat, renvoyant à une idée de
communion.
“nuque baignant dans le frais cresson bleu”,
“il est étendu dans l’herbe [...] dans son lit vert”,
Le vers “Les pieds dans les glaïeuls” évoque une position peu compatible avec celle de la sieste.
Par
ailleurs, la récurrence de la préposition “dans” tout au long de la strophe renforce cette idée de
communion.
Ici, le contact avec la nature est d’une autre dimension.
Le soldat revient à la nature
Les actions de ce soldat, son histoire par la guerre le place certes en opposition avec la nature, mais
par son repos il revient à elle.
L’homme est fait de terre et il revient à la Terre.
Ainsi, la description du soldat dans cette strophe permet d’introduire des oppositions qui bouleversent
l’harmonie naturelle, tout en l'accentuant.
La strophe suivante s’intéresse plus encore à l’immobilité du
soldat.....
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