crises financières
Publié le 27/03/2024
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Synthèse du chapitre
Problématique : Si l’ère industrielle a marqué le début d’un processus de croissance qui s’est
étendu à la plupart des pays, cette dernière est loin d’être un long fleuve tranquille.
Les
phases d’expansion alternent en effet avec celles de récession voire de dépression.
Ces
périodes de crise peuvent souvent être liées à des crises financières, dont, au cours du siècle
dernier, la crise de 1929 et celle de 2008 sont les plus connues.
Mais comment naissent les
crises financières ? Comment se propagent-elles à l’économie « réelle », c’est-à-dire
comment se traduisent-elles en récession et en montée du chômage ? Et comment les
régulateurs financiers peuvent-ils tenter de les prévenir ?
I.
Comment les crises financières naissent-elles ?
A) Les caractéristiques des crises financières
1.
La « Grande Dépression » : la crise des années 1930
Au début des années 1920, les Etats-Unis connaissent une phase de croissance rapide,
alimentée par le développement du fordisme et ses formidables gains de productivité, ainsi
que par le développement du crédit à la consommation.
Ce dynamisme économique fait
monter les cours boursiers.
La spéculation se développe : de nombreux acteurs (qu’ils soient
financiers ou de simples petits porteurs) achètent des actions en souscrivant des emprunts,
qu’ils remboursent en revendant les actions en réalisant une plus-value.
La phase haussière
du cycle boursier génère des comportements mimétiques source de prophéties autoréalisatrices : si l’opinion majoritaire est que les cours vont continuer de monter, tout le
monde achète des actions, ce qui fait… monter les cours ! Mais on assiste alors à une
déconnexion entre les cours boursiers (l’indice Dow Jones est multiplié par près de 4 entre
1920 et 1929) et la situation économique sous-jacente (un ralentissement économique
survient en 1927) : une bulle financière s’est formée.
Cette dernière éclate en octobre 1929.
Des rumeurs selon lesquelles des gros porteurs
vendent leurs titres pour prendre leurs gains génèrent un vent de panique : les
comportements mimétiques et les prophéties auto-réalisatrices entrent une nouvelle fois à
l’œuvre, mais cette fois-ci concourent à la chute des prix des actions.
Tous ceux qui avaient
emprunté pour acheter des actions voient le prix de leur collatéral (les actions qu’ils avaient
en garantie de leur prêt) baisser, et sont contraints de procéder à des ventes forcées, qui
accélèrent la chute des cours.
De 1929 à 1932, l’indice Dow Jones perd 80% de sa valeur, la
production industrielle américaine a baissé de moitié et le taux de chômage est passé de 3%
à 25% de la population active.
C’est la « Grande dépression », qui se propagera à l’ensemble
des pays industrialisés.
2.
La « Grande Récession » : l’éclatement de la crise de 2008
Au début des années 2000, les Etats-Unis connaissent une période de croissance rapide.
Les
technologies numériques semblent enfin produire leurs effets, et le crédit est abondant et peu
coûteux dans un contexte où la banque centrale a baissé ses taux directeurs.
Des innovations
financières se développent au travers de la titrisation : les crédits immobiliers accordés par
les banques sont regroupés puis découpés en titres financiers revendus sur les marchés
internationaux à des banques, compagnies d’assurance, fonds d’investissement.
On pense
alors que cette technique aboutit à une diversification des risques, d’autant qu’en cas de
problème de remboursement d’un emprunteur, il suffit de saisir sa maison et de la vendre,
dans un contexte où les prix de l’immobilier sont en hausse depuis plus de 15 ans.
Mais on
assiste en réalité à la formation d’une bulle immobilière.
La hausse des prix génère des
comportements mimétiques (et donc des prophéties auto-réalisatrices) et du surendettement.
Les banques accordent des crédits même à des ménages avec des capacités de
remboursement limitées (ce segment de clientèle est dénommé « subprime ») puisqu’elles en
ont transféré le risque à des investisseurs internationaux.
Mais à partir de 2005-2007, les
taux d’intérêt remontent, les échéances des crédits immobiliers (à taux variable aux USA)
deviennent trop élevées pour une partie des emprunteurs.
Les taux de non-remboursement
explosent, ce qui aboutit à des saisies immobilières en chaîne.
Problème : il n’y a plus
d’acheteurs, et les banques qui ont saisi les biens immobiliers procèdent à des ventes forcées
qui fait baisser les prix du collatéral (le bien immobilier en gage du prêt), accentuant la crise
immobilière, qui va se transformer en crise financière et en crise économique.
B) Le déroulement des crises financières
1.
La formation et l’éclatement des bulles spéculatives
Le principal problème des marchés financiers est qu’ils brassent des sommes gigantesques
d’argent et qu’ils fonctionnent en situation d’incertitude radicale car personne ne peut
posséder l’ensemble de l’information disponible pour former ses anticipations et être sûr
qu’elles soient justes.
Les investisseurs n’ont pas d’autre choix que d’adopter des
comportements mimétiques.
Ce comportement mimétique est en effet renforcé par le fait que dans l’activité financière il
existe de l’asymétrie d’information.
Si un agent n'a pas d'informations sur un titre, il peut
croire qu'un autre agent qui réalise une opération (achat ou vente) détient, lui, une
information privilégiée qui justifie son acte.
Par exemple si un agent A voit qu'un agent B
achète des titres d'une entreprise, l'agent A peut croire que l'agent B détient des informations
particulières, par exemple que B sait que cette entreprise va faire des annonces positives,
donc que son cours va augmenter.
L'agent A a alors intérêt à imiter l'agent B.
Les comportements mimétiques consistent donc à adopter comme comportement rationnel
l’imitation du comportement des autres agents en situation d’incertitude.
Dès 1936, John M.
Keynes montre que les agents qui spéculent sur les marchés financiers
prennent une décision de cession ou d'achat de titres en fonction du comportement qu'ils
pensent que les autres vont adopter.
Il utilise la métaphore du concours de beauté, où des
agents sont amenés à élire une reine de beauté et sont récompensés s'ils ont choisi la
gagnante.
Les participants n'ont alors pas intérêt à voter pour la personne qu'ils trouvent
personnellement la plus belle, mais à voter selon ce qu'ils pensent être l'opinion des autres…
Ces comportements mimétiques vont être à l’origine de prophéties auto-réalisatrices : si les
intervenants sur le marché pensent qu’un certain événement va se produire (par exemple
une baisse des cours), ils vont réagir en conséquence (vendre leurs actions) et leur réaction
collective va provoquer la réalisation de cet événement qui autrement ne se serait pas
produit.
Les prophéties auto-réalisatrices sont des annonces d’effets d’une action qui vont la
provoquer et ainsi assurer la véracité de ces effets.
Les investisseurs vont alors former les mêmes anticipations que l’anticipation moyenne,
conventionnelle sur le marché et donc la renforcer.
En effet, si des agents veulent et achètent un titre, son cours va augmenter.
Dans cette
situation, il est donc intéressant pour tous les agents d'acheter le plus rapidement possible ce
titre afin de le revendre une fois que son cours aura augmenté.
Symétriquement, si des
agents vendent un titre, l'offre risque d'excéder la demande et le cours du titre diminuer.
Un
agent rationnel a donc tout intérêt à revendre ses titres avant que le cours ne baisse.
Ainsi,
lorsque beaucoup d'agents ont un certain comportement (achat ou vente de titre), un agent
rationnel a tout intérêt à les imiter.
Or, en vendant ou en achetant comme les autres, les
agents contribuent à l'évolution de la valeur d'un titre.
En effet, si tous les agents vendent un
titre, l'offre excède la demande et son cours baisse.
Ces phénomènes de mimétisme peuvent provoquer des bulles spéculatives : exemple le cours
d'une action atteindra une valeur qui est bien trop élevée par rapport à l'état de santé
économique de l'entreprise en question, ceci étant le résultat de comportement spéculatif
mimétique sur cette action.
Des titres peuvent atteindre une valeur déconnectée de leur
valeur fondamentale quand, par mimétisme, les agents les achètent parce qu'ils anticipent
que les autres vont aussi les acheter, ce qui provoque effectivement une hausse des cours et
la formation de la bulle dans une période d’euphorie financière.
Mais, une fois constaté que la valeur atteinte est bien trop excessive, certains investisseurs
avisés revendent leurs titres, et par mimétisme les autres les imitent et vendent également,
suscitant une panique boursière et l’éclatement la bulle.
C’est l’alternance de phases de confiance – menant à l’euphorie boursière – et de défiance –
menant à la panique – qui sont à la base de la logique des crises financières.
L’économiste
Herman Minsky appelait cela le « paradoxe de la tranquillité » : c’est dans les périodes
d’optimisme et d’expansion des valeurs boursières, un calme apparent, que se préparent les
futures crises financières.
2.
Prise de risques excessifs et faillites bancaires en chaîne
Les banques investissent par de nombreux moyens sur les marchés financiers en achetant
pour leur compte ou celui de leurs clients des titres financiers (actions et obligations
d’entreprises, Bons du Trésor des Etats) pour rémunérer des produits d’épargne et de
placement qu’elles proposent à leurs clients, par exemple les assurances-vie.
De ce fait, l’éclatement d’une bulle financière peut mettre en difficulté une banque qui....
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