TD droit administratif
Publié le 06/10/2023
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“Le droit doit être stable, mais il ne doit pas rester immobile”; ces mots de Roscoe Pound dans
son ouvrage The Justice According The Law, témoignent à la fois d’une continuité du droit ou
plutôt d’un fil conducteur que lui confère la Constitution érigée en norme suprême; également cette
citation évoque le caractère évolutif du droit qui doit conjointement être modifié avec les époques,
les régimes ou encore avec des phénomènes sociétaux ou environnementaux.
Présentement, l'Arrêt
Koné qui nous est demandé de commenter, manifeste explicitement le caractère évolutif du droit
français.
Dans cette affaire, Mr Koné réside en France au moment d’une demande d’extradition de l'État
malien au motif de « complicité d’atteinte aux biens publics et enrichissement illicite relatifs aux
fonds transférés hors du Mali provenant de trafics d’hydrocarbures ».
Ces faits d’accusation se
seraient déroulés au Mali quelques années auparavant.
L’état français recevant cette demande
d’extradition décide dans un premier temps de consentir à la livraison de Mr Koné; cependant le
requérant fait appel au motif que la charge portée à son égard décrète “une infraction politique ou
comme une infraction connexe à une telle infraction”, or selon ce dernier cette infraction n’est
qu’un motif qui en cache un autre.
En effet, Mr Koné explique que l’état du Mali demande son
extradition non pas pour une infraction, mais dans un but politique; or ni l’article 44 de l’Accord de
coopération en matière de justice entre la France et le Mali du 9 mars 1962, ni aucune autre norme
ne prévoit une solution juridique en cas d’extradition pour un but politique.
Dès lors, un problème se présente au juge : comment établir ou non l’extradition de Mr Koné si
aucune norme ne prévoit ce cas de figure ? C’est dans ces circonstances que cet Arrêt va faire
évoluer le droit français et notamment concernant les interprétations des normes du bloc de
constitutionnalité.
Dès lors, le problème qui assaille les juges dans cet Arrêt est de se demander si
un accord international peut être interprété à la lumière d’une norme constitutionnelle ? Ainsi, en
considération des faits nous établirons que le juge du Conseil d’état établit un nouveau PFRLR qui
interdira ou non l’extradition demandée dans un but politique (I), et que cet Arrêt admet une
résolution des faits assez inattendue qui confèrera au droit interne une supériorité comparativement
au droit international ( II ).
I / Le PFRLR interdisant l’extradition demandée dans un but politique
Dans cette affaire des plus complexes, le juge administratif a décidé de créer un nouveau principe
fondamental reconnu par les lois de la République se fondant sur un principe général du droit décrit
dans le préambule de 1948.
La tournure complexe de cette affaire est dûe à une nuance des termes
qui laisse sous-entendre une carence conventionnelle ( a ), nécessitant ainsi la création PFRLR,
mais cette création est- elle réellement une compétence conférée au Conseil d'État ? ( b )
1.
Une nuance des termes qui laisse sous-entendre une carence conventionnelle.
En tout état de cause, la convention franco-malienne sur l'extradition du 09/03/1962 n’exprimait
aucune règle censurant l'extradition demandée dans un but politique.
Elle n'interdit, en effet,
l'extradition que dès lors que celle-ci est fondée sur une infraction de caractère politique.
Il est dès
lors impératif pour le juge administratif de motiver ses décisions; pour ce faire, il doit se baser sur
un texte de loi et/ou sur une jurisprudence antérieure.
Cependant, il existe un autre groupe de
normes juridiques qui peuvent être utilisées comme fondement à une décision juridictionnelle.
Il
s’agit des principes généraux du droit et des principes fondamentaux reconnus par les lois de la
République ( PFRLR ), mais pour que le juge use de telles normes juridiques il est absolument
nécessaire que les conditions requises pour la consécration des PFRLR soient respectées.
Dans l’arrêt Koné, le juge administratif a consacré un PFRLR dans lequel il a consacré le refus
de la France d’extrader un étranger lorsque le but de la requête est politique.
Ainsi, on comprend
qu’il n’est pas possible et pour aucune autorité française de faire renvoyer un étranger dans son pays
d’origine lorsque les motifs avancés sont exclusivement politiques.
Ce principe est devenu une
norme constitutionnelle à laquelle ne peut déroger aucune autorité de la République.
Il est ainsi
question de nuance qui a très justement été relevée et prise en considération par le juge du Conseil
d'État; en effet, le terme d’infraction de caractère politique, selon Mr Koné, cache en réalité un
motif tout autre : celui d’une extradition dans un but politique.
Le Conseil d'État considérant ainsi
cette différence de degré doit agir en conséquence.
b) Les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République : un domaine
réservé au Conseil constitutionnel ?
La problématique posée par l’arrêt Koné réside dans la possibilité pour le Conseil d'Etat
d'appliquer un principe fondamental reconnu par les lois de la République qui n'aurait pas été
préalablement dégagé par le Conseil constitutionnel.
Certes, le juge administratif a déjà constaté
l'existence de tels principes comme notamment lors de l'Arrêt Amicale des Annamites de Paris du
11 juillet 1956 concernant la liberté d'association; de ces faits il avait été estimé que la découverte
de ces principes avait été transférée au juge constitutionnel.
C'est, d'ailleurs, la ligne que semblait
suivre le Conseil d’État puisque celui-ci se contentait de reprendre à son compte les principes
dégagés par le juge constitutionnel.
Avec l’arrêt Koné, la perspective est toute autre ! Le Conseil
d’État s'émancipe des dires et opinions du Conseil constitutionnel qu'il semblait s'astreindre à
respecter jusqu’alors.
Si cette solution peut surprendre, elle n'est en rien audacieuse au plan
juridique.
En effet, la Constitution attribue, certes au seul Conseil constitutionnel le pouvoir de
contrôler la constitutionnalité des lois, mais elle ne lui confère, à aucun moment, le monopole de
son interprétation.
Dès lors, le Conseil d’État peut et même doit en interpréter les dispositions,
comme il interprète, au titre de sa fonction de juger, toutes les autres normes juridiques dont il lui
revient d'imposer le respect aux actes administratifs.
Cet arrêt révèle que le juge administratif n’est pas qu’un juge de fond ou un juge qui fait des
compromis; en effet, ces lignes du Conseil d’état montrent et prouvent qu’il peut aussi être un juge
de principes.
Dans cet Arrêt, le Conseil d'État prend seul l'initiative et décide seul de se fonder sur
un principe fondamental reconnu par les lois de la République.
L’importance de ce....
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