Le discours rhétorique est-il nécessairement trompeur ? (dissertation)
Publié le 04/12/2022
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DM Philosophie :
Le discours rhétorique est-il nécessairement trompeur ?
Socrate dans Gorgias de Platon, interroge Calliclès : « les orateurs ne se sont-ils
pas plutôt lancés à la poursuite de tout ce qui peut faire du plaisir aux citoyens » au lieu
du « grand bien » ? Chercher à procurer du plaisir au lieu du Bien n’est-ce pas déjà
tromper ?
Le discours rhétorique théorisé par Aristote dans La Rhétorique basé sur le
triangle logos, pathos et ethos doit-être entièrement utilisé par l’orateur pour plaire et
persuader.
Il peut aussi utiliser une multiplicité de techniques oratoires : enthymème,
exemples à induction, pointes d’humour, formules percutantes et plus généralement : un
elocutio riche et protéiforme.
Ceci ajouté à la structuration et l’expression du discours
condition sine qua non de l’éloquence du rhéteur– composé de trois attributs :
dispositio, memoria et actio confère de la puissance à la thèse et aux arguments de
celui-ci c’est-à-dire l’inventio.
L’objectif du discours rhétorique est de persuader son
auditoire pour le rendre favorable à celui qui le prononce et l’a construit.
Mais,
persuader n’est ce pas déjà tromper ? Le discours rhétorique est-il alors nécessairement
trompeur ou peut-il être autre ? C’est-à-dire essaie t-il obligatoirement de donner
volontairement une idée erronée de la réalité, d’induire en erreur en usant de
mensonges, de dissimulations, de ruses, de flatteries ? Mais, voir le discours rhétorique
comme une technique seulement vouée à la tromperie n’est-il pas une vision réductrice
de ce discours ? Ne permet-il pas aussi, parfois, de défendre une vérité ? Ainsi le sujet
pose le problème de savoir : pourquoi le discours rhétorique peut-il être trompeur et à
quelles conditions ? Mais aussi, il nous pousse à déceler l’origine de la tromperie : ne
dépendrait-elle pas plus de la volonté de l’orateur que de son art oratoire ? Nous
étudierons que le discours rhétorique peut-être trompeur à cause des outils qu’il utilise
mais qu’il ne l’est pas nécessairement : l’orateur en est le maître ; puis qu’il aurait la
possibilité de conférer de la puissance à la vérité pour que l’auditoire se l’approprie.
Le discours rhétorique est un discours persuasif par sa forme : l’orateur utilise
divers procédés stylistiques et oratoires pour séduire son public et peut-être trompeur à
cause de ceci.
Le discours rhétorique veut séduire son auditoire pour le rendre complaisant.
En
effet, l’orateur, maître de son discours et maître de la tromperie qu’il contient va utiliser,
de nombreux procédés oratoires pour plaire à son auditoire.
Ainsi, premièrement, il peut
utiliser les pouvoirs de la parole.
L’utilisation d’énoncés performatifs, théorisés par
Austin, permet à la parole d’avoir un réel pouvoir d’action sur son auditeur.
Il peut
promettre diverses choses pour le séduire en établissant ainsi certaines réalités
effectives : il fait preuve d’engagement.
Néanmoins, souvent cette promesse n’est pas
tenu par les orateurs et devient un mensonge.
De plus, pour plaire l’orateur peut jouer
sur le triangle rhétorique : plus précisément l’ethos et le pathos.
Le pathos permet de
faire appel aux sentiments et émotions du public pour toucher ses affects.
Les
sentiments prennent alors la place de la raison et l’auditeur ne cherche plus la vérité.
De
plus, l’orateur va se servir de son ethos, c’est-à-dire de sa notoriété, son curriculum
vitae et même peut-être sa soit disant intégrité pour captiver.
Néanmoins, même s’il ne
possède pas un fort ethos, il adopte un ton et un style adapté à son public qui lui permet
de le séduire.
Ainsi, le discours rhétorique rend le public complaisant à l’orateur et à sa
thèse : il affaiblit sa raison permettant de persuader.
L’orateur peut contrôler l’opinion et persuader le public de thèse même fausse
ou malsaine.
En effet, l’orateur ayant rendu le public bienveillant envers lui va,
désormais, le persuader par des images et la contrainte.
Ainsi, l’orateur peut utiliser des
exemples rhétoriques qu’Aristote nomme : « paradeigma » qui permettent de faire d’un
exemple, c’est-à-dire d’un seul cas, une vérité générale ; le particulier incarne le
général.
Ceci permet de frapper le public et de le persuader en faisant appel à ses
connaissances mais surtout, ici, à une image percutante.
D’autre part, l’orateur peut se
servir d’enthymèmes qui permettent de rendre actif le public mais aussi de le flatter en
lui faisant découvrir inconsciemment la prémisse manquante.
Mais, le véritable
pourvoir de l’enthymème c’est qu’outre de rendre l’auditoire complaisant par son
introduction dans le discours, il contraint sa raison.
Effectivement, l’enthymème s’il est
bien construit permet de contraindre la raison restante après avoir été ébloui par un
magnifique discours et ainsi de le persuader.
L’enthymème est un véritable instrument
de tromperie car sa construction permet de faire passer pour vrai quelque chose de faux
étant donné que l’orateur contraint la raison de son public.
Par tous ses moyens,
l’orateur est libre de transmettre ses opinions, ses valeurs et sa parole politique
possiblement voué à tromper.
Ainsi, le discours rhétorique peut-être trompeur puisqu’il ne conduit pas
nécessairement au but de la raison : la vérité.
Il permet de plaire pour persuader à cause
de son caractère emphatique.
Le discours rhétorique devient un instrument puissant
pour tromper ; sa forme emphatique surpasse le fond : le logos grâce à l’utilisation de
procédés oratoires.
Ainsi il est certain que le discours rhétorique peut-être trompeur en
donnant une vision déformée, erronée de la vérité pour contrôler le peuple ou bien
même l’asservir.
Le discours rhétorique a le pouvoir de tromper son auditoire et ainsi de
lui faire acquérir des valeurs, des opinions et des points de vue politiques néfastes pour
la société.
Néanmoins, le caractère trompeur ne dépend-il pas de la volonté de l’orateur,
c’est-à-dire du message que le rhéteur veut transmettre : le logos, plus que des outils
qu’il utilise qui sont seulement des procédés, des techniques et des artifices permettant
de transmettre le mensonge ou la vérité ?
Le discours rhétorique n’est pas nécessairement trompeur.
Certes, il est possible
que l’orateur l’utilise pour persuader d’un mensonge, pour déformer la réalité mais il
peut aussi l’utiliser pour exprimer la vérité.
Alors ne dépend-il pas plus de la volonté de
celui-ci que des outils utilisés ? Mais, l’orateur est-il le seul fautif dans la tromperie ?
La tromperie d’un discours dépend de la volonté du rhéteur qui en est le seul
maître ! Si la volonté de l’orateur est bonne, la thèse qu’il défendra sera juste et
vertueuse et les arguments de même.
En effet, le logos est l’élément le plus important
du discours, c’est celui-ci qui fait du discours un discours trompeur ou non car il fait
appel à la rationalité du public.
Le logos du discours désigne la manière intellectuelle de
l’orateur de traiter de la réalité.
S’il la traite avec l’objectif de se rapprocher de la vérité,
l’orateur transmet à son public une thèse et des arguments vrais alors que s’il la traite
pour la manipuler et ainsi mentir dans son intérêt personnel, le discours rhétorique
devient trompeur.
Ainsi, le porte parole d’une association a pour vocation d’utiliser l’art
rhétorique pour défendre et exprimer le combat de celle-ci.
Ainsi, il utilisera de solides
arguments étayés d’exemples reconnus par tous pour convaincre le public de se joindre
à l’association.
Inversement, l’orateur ayant de mauvaises intentions, ou devant utiliser
le discours rhétorique pour défendre un individu qu’il sait coupable peut tromper.
D’une
part, Gorgias déclare au sujet du discours judiciaire dans l’Éloge d’Hélène : « Les
plaidoyers judiciaires font partie d’un genre dans lequel un seul discours peut tenir sous
le charme et persuader une foule nombreuse, même s’il dit pas la vérité ».
Alors,
l’avocat peut dans ce cas convaincre d’un logos faux « pourvu qu’il [le discours] ait été
écrit avec art » et faire disculper un criminel.
D’autre part, un homme politique qui a
pour seule volonté d’être élu plus que d’améliorer la cité ou le pays pour acquérir le
pouvoir peut ainsi controverser des faits ou l’histoire pour récupérer des électeurs naïfs
ayant peu de savoirs ou se laissant manipuler par l’art rhétorique et convaincre de son
opinion par une thèse et des arguments mensongers.
Ainsi, le caractère trompeur du
discours dépend de la volonté de l’orateur, mais ne dépend-il pas aussi du public ?
Un discours trompeur face à un public érudit et un autre ignorant et/ou naïf n’a
pas le même effet.
La plupart des hommes, les moins cultivés, ne sont pas capables de
se remémorer des faits passés,....
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