Une société sans élites est-elle possible ?
Publié le 28/04/2024
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«
Introduction :
"Une société prospère dépend de la manière dont les élites utilisent leur pouvoir pour le bien
commun plutôt que pour leur intérêt personnel." Lorsque le philosophe autrichien Karl
Popper dit cela, il suggère que la place des élites dans les sociétés peut-être à la fois d’une
grande richesse, dès lors où ils usent de leur pouvoir pour faire prospérer les sociétés.
Ils
ont la possibilité d’influencer positivement le plus grand nombre.
Toutefois et c’est ainsi que
se trouve toute la complexité de la place des élites, ils ne doivent pas faire usage de leur
influence pour leurs propres intérêts uniquement.
Mais qu'entend-on par le terme d’élite ? Le
concept d'élite renvoie à un groupe restreint de personnes qui détient un pouvoir, une
influence ou une autorité particulièrement marqués au sein d'une société.
Ces élites peuvent
émerger en raison de divers facteurs tels que la richesse, l'éducation, ou d'autres formes de
privilèges.
Dans ce cas et selon les dires de Karl Popper, pourrait-on imaginer une société
sans ces élites ? Le sujet interroge la faisabilité d'une société dépourvue d'élites, où le
pouvoir serait équitablement partagé entre tous les membres.
Cela soulève des questions
fondamentales sur la nature humaine, la structuration sociale, et la possibilité de créer des
modèles alternatifs aux systèmes qui favorisent la concentration du pouvoir.
Nous explorerons premièrement les arguments en faveur de cette possibilité.
Ensuite nous
verrons les obstacles potentiels à la réalisation d’une société anti-élitiste.
Et finalement nous
citerons les limites des modèles égalitaires.
Partie 1 : Les arguments en faveur de la possibilité d'une société sans élites
L’existence d’élites au sein de la société paraît contradictoire avec le fonctionnement
d’un système politique démocratique qui suppose l’égalité des citoyens.
A travers l’histoire
les hommes ont tenté de fonder des sociétés au sein desquels il n’existerait pas de pouvoir
direct, pas de concentration du pouvoir, une société dans laquelle les hommes évoluent
ensemble sur un pied égalitaire.
Prenons les revendications anarchistes, en particulier son
versant non-violent.
En 1840, dans l'histoire de l'anarchisme, Pierre-Joseph Proudhon est
le premier théoricien qui revendique explicitement la qualité d' «anarchiste».
Une société
anarchique, dans son idéal, rejette l'idée d'une hiérarchie rigide et permanente, y compris
celle des élites.
L'anarchisme favorise l'égalité sociale, économique et politique esquissant
des modèles de société dépourvus d'élites.
En mettent l'accent sur la coopération volontaire,
l'auto-organisation et le partage équitable des ressources.
De nombreux anarchistes
critiquent le capitalisme en raison de son potentiel à créer des inégalités économiques et à
concentrer le pouvoir entre les mains d'une minorité.
Les élites économiques sont souvent
perçues comme des obstacles à une répartition équitable des ressources.
Ce modèle
idéalise une société où les individus collaborent dans un cadre décentralisé, évitant ainsi la
formation d'une élite centralisée.
Certains penseurs ont soutenu que la justice sociale exige
une répartition équitable du pouvoir.
Le philosophe et économiste indien Amartya Sen a mis
en avant l'idée du "capabilité" comme fondement de la justice sociale.
Il soutient que la
justice sociale nécessite non seulement l'égalité de ressources, mais aussi l'assurance que
chaque individu a la capacité de mener une vie qu'il a raison de valoriser.
Une répartition
équitable du pouvoir est considérée comme un moyen d'assurer cette capacité pour tous.
En
éliminant les élites, la société pourrait favoriser une participation démocratique plus
égalitaire, où les décisions collectives seraient prises en tenant compte des besoins et des
aspirations de l'ensemble de la population.
Des expériences historiques, telles que les communautés utopiques du XIXe siècle,
ont tenté de créer des sociétés sans élites en mettant en place des structures basées sur la
coopération et le partage.
Bien que beaucoup de ces expériences aient été éphémères,
elles offrent des perspectives sur la possibilité d'organiser des sociétés sans une
concentration formelle du pouvoir.
New Harmony aux États-Unis, fondée par Robert Owen
en 1825, visait à établir une communauté basée sur des principes de coopération, de
partage des ressources et d'éducation égalitaire.
L'idée était de créer une société sans
classes sociales, où le travail et les biens seraient partagés équitablement.
Cependant, des
dissensions internes et des problèmes financiers ont contribué à l'échec de la communauté.
L'anthropologie révèle des exemples de sociétés autochtones qui ont maintenu des
structures égalitaires, où le pouvoir est distribué de manière plus horizontale.
Ces sociétés,
caractérisées par des mécanismes de prise de décision participatifs, soulignent la possibilité
d'une cohabitation sans élites dominantes.
Les sociétés inuites du Canada, du Groenland et
de l'Alaska par exemple étaient souvent organisées de manière égalitaire.
La vie
communautaire reposait sur la coopération, la chasse collective et le partage des
ressources.
Ces arguments en faveur d'une société sans élites s'appuient sur des idéaux d'égalité, de
coopération volontaire et de participation démocratique, suggérant que des modèles
alternatifs peuvent être envisagés pour créer des sociétés plus inclusives et équitables.
Cependant, il est essentiel de rendre compte des obstacles potentiels et des limites de ces
modèles pour obtenir une vision plus complète de la question.
Partie 2 : Les obstacles à la réalisation d'une société sans élites
Les inégalités socio-économiques constituent un obstacle majeur à la réalisation d'une
société sans élites.
Les disparités de richesse peuvent conduire à la formation naturelle de
classes privilégiées, car la possession de ressources matérielles confère souvent un pouvoir
accru.
Les structures économiques favorisant l'accumulation inégale des richesses peuvent
donc compromettre les efforts visant à éliminer les élites.
L'accès inégal aux ressources et
aux opportunités crée des avantages structurels pour certains individus.
Dans son œuvre
majeure "Du Contrat Social", Jean-Jacques Rousseau aborde la question de l'inégalité
sociale, s'interrogeant sur la façon dont l'accumulation de la propriété contribue à la création
d'une élite et à la perpétuation des inégalités.
Les inégalités dans l'éducation, l'emploi, les
revenus peuvent perpétuer des disparités qui entravent les aspirations à une société sans
élites.
L’idée de concentration du pouvoir est un concept même qui rend la disparition des élites
plus complexe.
En effet, une tendance naturelle à la concentration du pouvoir peut se
produire, même en l'absence d'élites formelles.
Les hommes diffèrent par leurs
compétences, leurs talents, leurs ressources ou d'autres caractéristiques qui leur confèrent
une certaine influence ou autorité.
Ces différences peuvent conduire naturellement à la
concentration du pouvoir entre les mains de ceux qui sont perçus comme étant plus
compétents ou plus aptes.
De même, les hommes seuls ou en groupes cherchent souvent à
consolider leur influence, conduisant à la création de nouvelles formes de hiérarchie et
d'autorité informelle.
Les êtres humains ont souvent des tendances grégaires, cherchant à
se regrouper avec des individus partageant des intérêts communs.
Ces regroupements
conduisent à des dynamiques de pouvoir où certains groupes ont une influence
disproportionnée sur d'autres créant une élite au sein même d’une société dans un domaine
plus qu’un autre mais qui n’a pas les caractéristiques de l’élite stéréotypée.
Société
égalitaire ou non, certains hommes ont une tendance naturelle à être le porte-parole, à plus
ou moins grande échelle, d’un groupe.
Cette émergence naturelle de domination, peut créer
des dynamiques de pouvoir informelles, remettant en question l'idée d'une répartition totale
et équitable du pouvoir.
Ces obstacles soulignent les défis auxquels une société sans élites pourrait être confrontée.
Ils soulignent la nécessité de repenser les structures économiques, d'investir dans des
systèmes éducatifs équitables comme l’a fait la Norvège notamment en consacrant 6,6% du
son PIB au secteur éducatif en 2019, et de promouvoir des mécanismes de prise de
décision participatifs pour réduire les inégalités.
Cependant, la complexité de ces problèmes
met en lumière la difficulté de parvenir à une élimination totale et durable des élites dans
une société donnée.
Partie 3 : Les limites des modèles égalitaires
Nous sommes dans une société où les demandes sont de plus en plus précises et
complexes.
Cette ère capitaliste qui nous pousse à innover demande une main d'œuvre de
plus en plus technique.
Les sociétés modernes sont devenues complexes, avec des
domaines tels que la science, la technologie et la médecine nécessitant une spécialisation
approfondie.
Dans ce cas, il....
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